Question écrite n° 53834 :
détention provisoire

12e Législature

Question de : M. Jean Dionis du Séjour
Lot-et-Garonne (1re circonscription) - Union pour la Démocratie Française

Avant qu'une « sanction » ne soit définitivement prononcée, la mise en détention provisoire est déjà une « peine ». Cette mise en détention est décidée au vu des premières investigations sur la réalité de l'infraction commise par telle ou telle personne. Elle s'appuie parfois sur une approche limitée de la personnalité de l'auteur présumé et éventuellement de la victime. Or une approche approfondie est possible grâce au concours de personnes qualifiées choisies dans le secteur sociaux ou médicaux. En conséquence, M. Jean Dionis du Séjour demande à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, s'il n'est pas important de réduire les incarcérations provisoires prononcées parfois trop rapidement et les remplacer par une garde à vue supplémentaire généralisée pour pouvoir affiner le dossier de personnalité avant la comparution de l'auteur présumé devant une juridiction collégiale.

Réponse publiée le 4 avril 2006

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire qu'il résulte des articles 137 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale que la détention provisoire ne constitue pas une reconnaissance de culpabilité, mais une mesure de sûreté exceptionnelle qui ne peut être ordonnée ou maintenue que si elle constitue l'unique moyen de mener à bien les investigations au regard des nécessités de l'instruction, de la personnalité du mis en examen et/ou du trouble exceptionnel et persistant porté à l'ordre public. En outre, afin de réunir des éléments d'information précis sur l'intéressé et en application des articles 41 et 81 du code de procédure pénale, l'autorité judiciaire peut ordonner que soit diligentée une enquête sociale rapide, de nature à l'éclairer sur la personnalité, la situation de famille et les conditions de vie du mis en examen. Cette enquête est obligatoire lorsque ce dernier est âgé de moins de vingt-et-un ans et que la peine encourue n'excède pas 5 ans d'emprisonnement. Toute décision de placement en détention provisoire doit donc, notamment, reposer sur des éléments de personnalité, et n'est jamais fondée sur la réalité de l'infraction reprochée l'intéressé est présumé innocent tant qu'il n'a pas été jugé et condamné, et les investigations judiciaires diligentées sous la direction du magistrat instructeur ont précisément pour objectif de réunir les éléments de preuve, à charge comme à décharge, relatifs à l'infraction en cause. De surcroît, la détention provisoire présente des garanties procédurales, protectrices des libertés individuelles, plus solides que la garde à vue, ce qui explique que la durée de cette dernière doit rester limitée. En effet, la garde à vue est définie par la doctrine comme constituant une mesure restrictive de liberté pouvant être mise en place par les officiers de police judiciaire à l'encontre de toute personne, majeure ou mineure âgée de plus de treize ans et présentant une ou plusieurs raisons plausibles d'avoir commis ou d'avoir tenté de commettre une infraction punie d'une peine d'emprisonnement. Contrairement à la détention provisoire, qui ne peut être ordonnée que par une autorité judiciaire distincte des autorités de poursuite et du magistrat instructeur, la décision de placement en garde à vue incombe donc aux enquêteurs, présentant en cela de moindres garanties que les mandats de dépôts judiciairement décernés. En outre, la décision de placement en garde à vue n'est pas juridictionnelle et, si son bien-fondé comme son déroulement sont contrôlés par le procureur de la République ou le juge d'instruction, elle n'est pas pour autant susceptible d'appel. Tout placement sous mandat de dépôt peut à l'inverse faire l'objet de voies de recours. Il y a lieu d'ajouter que le placement en détention provisoire ne peut être ordonné qu'à l'issue d'un débat contradictoire, au cours duquel le mis en examen peut présenter, directement et par l'intermédiaire d'un avocat de son choix ou commis d'office, toutes observations utiles, et notamment tout élément de personnalité à l'appui de ses moyens de défense. Dès lors, il apparaît aussi inopportun que juridiquement infondé de substituer des mesures de garde à vue à des placements en détention provisoire, les deux mesures ne répondant pas aux mêmes objectifs et ne présentant pas les mêmes garanties procédurales pour les personnes mises en cause.

Données clés

Auteur : M. Jean Dionis du Séjour

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 21 décembre 2004
Réponse publiée le 4 avril 2006

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