lutte contre la faim
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Un « Dakar agricole », forum international visant à réduire la « fracture » entre paysans du Nord et du Sud, s'est dernièrement tenu à Dakar pour essayer de générer une équité et un développement agricoles durables dans le monde. Cinq chefs d'État africains ainsi que le président français ont assisté à l'ouverture de ce rassemblement voulu par leur homologue sénégalais. Quelque 500 représentants des milieux politique, économique, scientifique, de la société civile et paysanne venus du monde entier ont fait le déplacement dans un grand hôtel de Dakar, qui accueille les débats pendant deux jours. L'intervention la plus remarquée a été celle du professeur Rajalakshmi Swaminathan, ingénieur agronome à l'origine de la « Révolution verte » dans le sud de l'Inde, qui a souligné la nécessité de diversifier les cultures et le développement des systèmes d'irrigation pour limiter la famine. Or lorsque l'on sait que la « Révolution verte » s'est basée certes sur un système agricole qui suppose la sélection minutieuse de variétés à haut potentiel génétique de rendement, et une irrigation bien maîtrisée, mais sur un recours massif aux engrais et pesticides qui sont hautement nocifs pour l'homme et l'environnement, on peut légitimement s'interroger sur l'orientation qu'il préconise aux États africains. Visiblement, les leçons n'ont pas été retenues en la matière et l'acharnement à vouloir poursuivre dans la pire des voies écologiques demeure intacte. Il a, par ailleurs, exhorté l'assistance à se pencher sur « la formation des agriculteurs » ainsi que sur « le choix de produits à forte valeur ajoutée grâce à la biotechnologie », faisant ainsi l'apologie des OGM qui sont largement contestés partout dans le monde. Si le « Dakar agricole » a voulu favoriser une réflexion collective sur la résorption de la fracture agricole mondiale, ouvrir des perspectives pour les espaces agricoles en développement et les zones défavorisées, au moment où le cycle de Doha à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) entend placer au centre de ses préoccupations les besoins, les intérêts des pays du Sud, le scénario envisagé n'est absolument pas écologiquement responsable ni gage d'un réel développement durable exempt d'effets collatéraux induits majeurs. En conséquence, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande à M. le ministre des affaires étrangères de lui indiquer si la France entend exhorter les pays du Sud à ne pas suivre le modèle prôné par le professeur Rajalakshmi Swaminathan, qui est en fait celui des grandes multinationales céréalières, mais plutôt à suivre un modèle respectueux de la diversité biologique et de l'environnement.
Réponse publiée le 7 juin 2005
Comme l'honorable parlementaire le souligne, le Dakar Agricole a été un forum international organisé à l'initiative des pays du Sud, et notamment du Sénégal, dans le but de promouvoir l'équité et un développement durable dans le secteur agricole, et de réduire, ainsi, la fracture entre paysans du Nord et du Sud. Ce forum a été voulu par ses promoteurs comme un lieu d'échanges et de partages d'expériences. Les communications faites à cette occasion ne valent donc pas pour acceptation sans réserve. La lutte contre la pauvreté en milieu rural et le plein exercice de la souveraineté alimentaire sont des enjeux majeurs pour les pays du Sud et tout spécialement pour l'Afrique. La communication du professeur Rajalakshimi Swaminathan a participé de cette réflexion collective par sa référence historique à la révolution verte et par l'impact de cette dernière sur la production agricole en Inde. Les effets environnementaux désastreux de pratiques agricoles mal maîtrisées ou inconsidérées sont une réalité dont chacun aujourd'hui doit tenir compte. La réponse au défi agricole en Afrique passe nécessairement par une amélioration de la productivité des systèmes agraires qui ne peut se concevoir en dehors des principes du développement durable et d'une gestion raisonnée des ressources naturelles. L'un des objectifs de la lutte contre la pauvreté en milieu rural est d'accroître les revenus agricoles grâce à une amélioration des capacités productives et à un accès accru aux services et aux marchés. Cet objectif est indissociable de celui d'élimination de la précarité qui doit permettre aux populations rurales d'envisager et de maîtriser leur avenir. La lutte contre la pauvreté en milieu rural prend ainsi une dimension environnementale fondamentale. C'est sur cette approche que repose la stratégie de coopération du ministère des affaires étrangères dans le secteur agricole. Le ministère entend ainsi promouvoir une agriculture familiale performante et organisée, fondée sur des pratiques respectueuses de l'environnement et offrant toutes garanties de durabilité. Les actions soutenues par le ministère des affaires étrangères lient ainsi l'organisation professionnelle agricole, l'aménagement et la gestion des terroirs, la conservation des sols et des couverts arborés, la maîtrise de la fertilité et l'économie de l'eau. À partir des enseignements tirés des expériences menées, la France entend promouvoir l'éducation et la formation à l'utilisation de pratiques agricoles durables, respectueuses de l'environnement et la biodiversité.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 1er mars 2005
Réponse publiée le 7 juin 2005