Question écrite n° 63282 :
fonctionnement

12e Législature

Question de : M. Thierry Mariani
Vaucluse (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Thierry Mariani appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les suites données aux demandes de visa pour motif « judiciaire ». En effet, lorsqu'un étranger est convoqué par la justice française, il semble que sa demande de visa doit être quasi automatiquement acceptée et que son entrée et sa circulation sur le territoire soient libres. Par exemple, il lui a été récemment rapporté les faits suivants : un ressortissant étranger condamné en France en 1998 à deux mois d'emprisonnement pour violences familiales, retourné dans son pays où il a aussi été condamné à un an d'emprisonnement pour d'autres faits, a été convoqué par la justice française pour une éventuelle mise en examen dans le cadre d'une procédure criminelle. Or, alors que le ministère des affaires étrangères considère que la présence sur le territoire français de cette personne est constitutive d'une menace pour l'ordre public, le ministère de la justice estime que le refus de visa porterait atteinte à la présomption d'innocence, au droit à un procès équitable et au respect des droits de la défense. Pour autant, aucune garantie comme, par exemple une escorte policière de l'étranger durant un séjour strictement nécessaire à l'audition, n'est fournie à l'autorité qui doit délivrer le visa, qui ne peut qu'être touristique. Aussi il le prie de bien vouloir lui indiquer tout d'abord sa position sur cet exemple. De plus, il souhaite connaître les raisons pour lesquelles il ne serait pas possible pour un juge d'instruction de demander la mise en place d'une escorte policière et s'il est possible de mettre en place une escorte policière, les conditions de cette mise en place. Enfin, il souhaite savoir s'il ne pourrait pas être envisagé de créer un nouveau type de visa spécifique à ce genre d'affaires, qui pourrait s'appeler « visa judiciaire ».

Réponse publiée le 15 novembre 2005

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que la Cour européenne des droits de l'homme, dans sa jurisprudence prise en application des dispositions de l'article 6-3 c de la convention européenne des droits de l'homme, a affirmé que le « droit de se défendre efficacement » incluait celui d'être mis en mesure de comparaître soi-même devant la juridiction ayant délivré la convocation (CEDH 23 novembre 1993, Poitrimol c/France § 35). L'article 80-1 du code de procédure pénale dispose notamment que le juge d'instruction « ne peut procéder à (la) mise en examen qu'après avoir préalablement entendu les observations de la personne ou l'avoir mise en mesure de les faire, soit dans les conditions prévues par l'article 116 relatif à l'interrogatoire de première comparution, soit en tant que témoin assisté (...) ». S'agissant de l'affaire évoquée en guise d'exemple dans la question, le magistrat instructeur, à qui la personne mise en cause avait fait connaître son adresse à l'étranger, devait procéder à sa convocation et son audition afin de pouvoir envisager son éventuelle mise en examen. La délivrance d'un visa pour motif « judiciaire » n'est pas pour autant automatique. Ainsi, en l'espèce, la délivrance du visa n'a pu intervenir tant que la personne concernée n'a pas été en mesure de fournir des garanties suffisantes concernant son hébergement et ses moyens de subsistance durant son séjour sur le territoire national. Le recours à une éventuelle escorte policière exigerait, s'agissant d'une information judiciaire, la délivrance d'un mandat par le juge d'instruction. Un tel outil juridique n'a vocation à être utilisé qu'à l'encontre des personnes en fuite ou refusant de déférer à une convocation judiciaire.

Données clés

Auteur : M. Thierry Mariani

Type de question : Question écrite

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 19 avril 2005
Réponse publiée le 15 novembre 2005

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