Question écrite n° 63719 :
pays en voie de développement

12e Législature

Question de : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste

La tuberculose fait figure de parent pauvre par rapport aux moyens engagés dans la lutte contre le sida et la stratégie de lutte de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en la matière est vivement critiquée. En effet, à l'échelle planétaire, les estimations annuelles sont impressionnantes : 9 millions de nouveaux cas de tuberculose, 1,7 million de décès. Mais c'est de loin sur le continent africain, où tuberculose et sida sont étroitement imbriqués, que la situation est le plus dramatique. Au point que des organisations non gouvernementales comme Médecins sans frontières n'hésitent pas à remettre ouvertement en cause la stratégie de lutte antituberculeuse de l'OMS, engagée au milieu des années quatre-vingt-dix. Le bilan 2005 a de quoi faire frémir. En effet, depuis dix ans, le nombre de malades tuberculeux a été multiplié par quatre à cinq en Afrique, et par un facteur six à sept dans les pays les plus touchés par le sida. Sur ce continent, la tuberculose progresse de 4 % par an, alors qu'elle est stable ou en régression dans la plus grande partie du monde. En clair, l'épidémie de sida a fait flamber la tuberculose, et l'Afrique doit désormais faire face à un couple infernal : jusqu'à la moitié des malades vivant avec le VIH contractent la tuberculose, qui est devenue la première cause de mortalité dans le sida. Le scandale, c'est qu'aujourd'hui seulement la moitié des malades ont accès à un traitement efficace mais les outils de détection mis à disposition sont hélas très rudimentaires. En effet, dans la stratégie de l'organisation onusienne, la détection des cas repose en effet sur l'examen direct des crachats, à la recherche du bacille de Koch. Or ce test reste négatif dans plus de la moitié des cas de tuberculose, en particulier chez les enfants et les malades coinfectés par le VIH. Pour l'OMS, l'urgence est un doublement du budget, actuellement de l'ordre d'un milliard d'euros. Une partie de ces fonds supplémentaires pourraient être mobilisés afin de pouvoir stimuler la production de nouveaux outils de diagnostic et de traitement de la tuberculose et de renforcer les structures et le personnel de santé. Les outils diagnostiques et les traitements sont donc obsolètes et inefficaces, le test de diagnostic ayant été élaboré il y a cent vingt-trois ans, et les médicaments, conçus il y a cinquante ans. Mais c'est surtout contre le principe du DOTS « traitement de courte durée sous supervision directe » que s'insurge l'ONG. Pendant toute la durée du protocole (au moins six mois), les patients doivent venir quotidiennement au dispensaire chercher leurs médicaments. Nécessaire soutien du malade, plaide l'OMS, pour s'assurer de la bonne observance et éviter la survenue de dramatiques résistances aux antituberculeux. Or ceci est considéré par les ONG comme une infantilisation inutile et qui ne tient pas compte des réalités, rappelant que des patients habitent couramment à plusieurs heures de marche du centre de santé. Ces divergences de vues démontrent le décalage entre les positions pragmatiques des ONG et celles dogmatiques de l'OMS, mais surtout le cuisant échec de ces dernières. Compte tenu de ces éléments, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande à M. le ministre des affaires étrangères de lui indiquer s'il entend oeuvrer auprès du secrétariat général de l'ONU afin que la politique de l'OMS en matière de lutte contre la tuberculose soit révisée dans le sens de celles souhaitées par les ONG.

Réponse publiée le 25 octobre 2005

La situation de l'endémie tuberculeuse est en effet très préoccupante. L'Organisation mondiale de la santé, qui au milieu des années 1990 prévoyait d'axer ses actions dans le cadre de « Stop TB » sur les vingt-deux pays à plus grand nombre de cas, a adapté sa stratégie pour que tous les pays puissent bénéficier des mêmes modes de traitement. La France soutient la lutte contre la tuberculose au travers d'un projet avec l'Union internationale de lutte contre la tuberculose et les maladies respiratoires et d'un engagement financier massif au Fonds mondial sida tuberculose et paludisme en mai 2005, une réunion de l'ensemble des acteurs de la lutte contre la tuberculose, organisée par l'Organisation mondiale de la santé et à laquelle les responsables de Médecins sans frontière ont participé, a permis de faire le point sur les problèmes soulevés par cette organisation. De cette réunion il ressort que, premièrement, les documents de référence écrits en 1995, réactualisés par l'Organisation mondiale de la santé en 2002 sur la base des expériences accumulées entre 1995 et 2001, prennent en compte une partie des observations faites par Médecins sans frontières ; deuxièmement, le test utilisé pour le diagnostic date certes de plus de cent ans mais reste aujourd'hui, même dans les pays du Nord, le seul capable de donner un résultat dans la journée. Il n'existe aucun autre test rapide qui puisse lui être substitué, les cultures demandant plusieurs semaines avant de donner des résultats. Sa rapidité et la possibilité de sa réalisation dans tous les centres de santé font que ce test est toujours d'actualité ; troisièmement, dans le cadre du développement de nouveaux outils, l'Organisation mondiale de la santé et ses partenaires testent actuellement sur le terrain une adaptation des méthodes de culture rapide afin de pallier les inconvénients de la méthode traditionnelle. Depuis 2001, l'Organisation mondiale de la santé a formé avec ses partenaires trois groupes de travail, un pour le développement de nouveaux médicaments, un autre pour de nouveaux tests diagnostics, et un troisième pour le développement de nouveaux vaccins La politique de lutte contre la tuberculose préconisée par l'Organisation mondiale de la santé est donc en continuelle adaptation et les problèmes soulevés par Médecins sans frontières sont, à l'heure actuelle, pris en compte par le partenariat « Stop TB ». Lors de la 58e assemblée mondiale de la santé du 16 au 28 mai 2005, la France a activement soutenu une résolution sur la lutte contre la tuberculose et son financement par laquelle le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé est prié de « promouvoir la recherche et le développement de nouveaux instruments de lutte dans le cadre du plan mondial destiné à mettre fin à la tuberculose » La France soutient l'Union internationale de lutte contre la tuberculose et les maladies respiratoires depuis le début des années 1990 grâce à des projets du fonds de solidarité prioritaire. Aujourd'hui, un projet de 2 200 000 euros est en cours et doit se poursuivre jusqu'en 2006. Il soutient cette structure, complémentaire des actions de l'Organisation mondiale de la santé pour apporter un appui aux programmes de lutte contre la tuberculose des pays de la zone de solidarité prioritaire et permettre la visibilité des réseaux francophones des acteurs de lutte contre le tuberculose. La France est le deuxième contributeur au Fonds mondial sida, tuberculose et paludisme pour un montant de 150 millions d'euros pour les années 2004 et 2005. Elle entend accroître sa contribution en 2006 et 2007 et doubler son montant. Créé en 2002, le Fonds finance aujourd'hui plus de 60 % des apports internationaux à la lutte contre la tuberculose à laquelle il a consacré à ce jour 13 % de ses ressources. La France sera particulièrement vigilante sur l'évolution des groupes de travail mis en place par l'Organisation mondiale de la santé pour le développement de nouvelles stratégies de diagnostic et de nouveaux traitements.

Données clés

Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 26 avril 2005
Réponse publiée le 25 octobre 2005

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