traité de non-prolifération nucléaire
Question de :
M. Philippe Vuilque
Ardennes (2e circonscription) - Socialiste
M. Philippe Vuilque appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la conférence de révision du traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Cette conférence aura lieu à l'ONU à New York du 2 au 31 mai 2005. Alors que de nombreux États ne respectent pas le TNP, cherchant à acquérir la dissuasion nucléaire, il lui demande quelle est la position de la France sur ce sujet. Il souhaite également savoir quelles sont les voies possibles vers un désarmement nucléaire du monde, objectifs tant du TNP que de l'Union européenne.
Réponse publiée le 25 octobre 2005
La prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs constitue une menace à la paix et à la sécurité internationale. Ce principe a été établi par le Conseil de sécurité depuis 1991, et confirmé par l'adoption à l'unanimité de la résolution 1540 le 28 avril 2004. Le régime de non-prolifération nucléaire, qui avait déjà été menacé au moment de l'éclatement de l'URSS et de la découverte des programmes iraquiens en 1991, fait face aujourd'hui à de nouveaux défis : universalité inachevée avec trois États restés en dehors de l'architecture du TNP ; un cas d'annonce de retrait du traité (Corée du Nord) ; découverte de deux programmes clandestins, en plus de celui de la Corée du Nord (Iran, Libye) ; révélations sur de nouveaux réseaux de prolifération (réseaux du Dr Khan). La France a fait du renforcement du régime multilatéral de non-prolifération l'une de ses priorités. Elle a fait des propositions fortes, notamment dans le cadre du G8 et de la conférence d'examen du TNP et continuera son action déterminée pour lutter contre la prolifération nucléaire. Depuis de nombreuses années, quatre pays, l'Iraq, la Libye, l'Iran et la Corée du Nord, suscitaient des préoccupations en matière de prolifération nucléaire. Le programme à vocation militaire irakien a été démantelé par l'AIEA sous l'autorité du Conseil de sécurité des Nations unies. Le programme libyen est en cours de démantèlement suite à l'accord conclu avec le Royaume-Uni et les États-Unis en décembre 2003. La France a eu à plusieurs reprises l'occasion de marquer sa préoccupation face à la crise nucléaire nord-coréenne. Ce pays a poursuivi depuis des années des activités proliférantes nucléaires et de missiles balistiques. Nous avons notamment à l'esprit les risques majeurs qui pèsent sur les pays de la région avec lesquels nous avons des liens étroits. Dans ce contexte, la France réaffirme son soutien au processus de discussions à six(1), qui a pour objectif de rechercher par la voie diplomatique un règlement de la question nucléaire nord-coréenne. Nous notons avec satisfaction la déclaration conjointe publiée dans ce code le 19 septembre 2005. Concernant l'Iran, la France a engagé depuis 2003 avec le Royaume-Uni, l'Allemagne et le secrétaire général du Conseil, Haut Représentant pour la PESC, un processus diplomatique pour résoudre la crise de prolifération nucléaire ouverte par les révélations d'activités clandestines liées à l'enrichissement de l'uranium. Notre objectif est d'obtenir la garantie objective de la finalité exclusivement pacifique des activités nucléaires de Téhéran, par l'exclusion de toute possibilité de développer les capacités de production de matières fissibles (2) utilisables pour fabriquer une arme nucléaire. Parmi les différents aspects de la lutte contre la prolifération des ADM et de leurs vecteurs, à laquelle le risque de terrorisme nucléaire et radiologique ajoute une dimension particulièrement préoccupante, le renforcement du régime de non-prolifération nucléaire est un enjeu fondamental pour la communauté internationale, et l'une des priorités de l'action diplomatique de la France. Avec la très grande majorité de la communauté internationale, nous estimons en effet que ce régime joue un rôle irremplaçable dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Dans cette perspective, la France a déployé ses efforts ces dernières années, tant au sein des enceintes internationales (résolution 1540 du conseil de sécurité des Nations unies du 28 avril 2004, stratégie commune de l'Union européenne du 13 décembre 2003, initiatives du G8 de 2002, 2003 et 2004, propositions de la France dans les enceintes TNP, au Groupe des fournisseurs nucléaires...), que par des initiatives ad hoc (participation de la France à l'initiative de sécurité contre la prolifération - PSI - sur les interceptions de cargaisons proliférantes). La France oeuvre en faveur de la pérennité et de l'universalité du TNP, qu'elle considère comme la pierre angulaire du régime de non-prolifération nucléaire. Nous cherchons, chaque fois que cela est possible, à renforcer l'efficacité des normes de non-prolifération, et à en élargir le champ d'application aux Et ts restés en dehors du régime actuel. Nous veillons dans le même temps à préserver la possibilité de coopérations dans le domaine des usages pacifiques de l'énergie nucléaire, telles qu'elles sont prévues par le TNP. Parallèlement au renforcement du régime de non-prolifération, la France est attachée à la mise en oeuvre des dispositions du TNP sur le désarmement nucléaire et le désarmement général et complet (article VI du Traité). Les décisions prises depuis la fin de la guerre froide par la France revêtent à cet égard une portée qui est sans commune mesure avec les décisions comparables des autres États dotés. La France a en effet largement participé aux efforts de désarmement nucléaire permis par l'amélioration des conditions de sécurité après la fin de la guerre froide : arrêt des essais, adhésion au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE), réduction significative de notre arsenal (réduction de moitié du nombre des vecteurs nucléaires), abandon de la composante sol-sol, réduction du nombre de sous-marins lanceurs d'engins, réduction de la posture d'alerte, fermeture et démantèlement du centre d'essais du Pacifique, fermeture et démantèlement des installations de production de matières fissiles pour les armes nucléaires de Pierrelatte et Marcoule, réduction de près de 60 % des crédits alloués au nucléaire de défense notamment. Nos objectifs sont aujourd'hui de préserver et mettre en oeuvre les priorités du désarmement nucléaire arrêtées par les États parties au TNP lors de la conférence d'examen et de prorogation de 1995 : entrée en vigueur du TICE, ce qui n'est toujours pas le cas huit ans après la fin de la négociation, et lancement de la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles. Les efforts de réduction globale des arsenaux se poursuivent par ailleurs entre les États-Unis et la Russie, pays dont les capacités sont sans commune mesure avec celles des autres États dotés. D'une manière générale, la France estime que la question du désannement nucléaire ne doit pas être approchée d'une manière détachée des réelles préoccupations de sécurité du moment, et des autres aspects du désarmement général et complet. Aujourd'hui, ce sont le contournement des normes et le non-respect des engagements de non-prolifération qui menacent la crédibilité et la pérennité des instruments multilatéraux, et plus particulièrement l'avenir du régime fondé sur le TNP. La France prend toute sa part à la consolidation du TNP dans tous ses aspects, en particulier dans le cadre du processus d'examen qui se poursuivra jusqu'à la prochaine conférence d'examen de 2010. (1) États-Unis, Russie, Chine, Corée-du-Sud, Japon, Corée-du-Nord ; (2) Enrichissement, retraitement, réacteur à eau lourde.
Auteur : M. Philippe Vuilque
Type de question : Question écrite
Rubrique : Traités et conventions
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Dates :
Question publiée le 10 mai 2005
Réponse publiée le 25 octobre 2005