lutte contre le racisme
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
C'est un constat qui n'est pas nouveau : la couleur de peau des plaignants est une donnée récurrente dans les bavures policières examinées par la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS). Il y a un an, l'ancien président de la Cour de cassation s'était lui-même dit « frappé par la couleur de peau et la fréquence statistique de personnes étrangères et/ou ayant des noms à consonance étrangère » parmi les victimes de violences policières, et avait promis que la CNDS travaillerait sur ce point. Ce rapport annuel est également marqué par une nouvelle progression du nombre de dossiers examinés par la CNDS. En 2004, la commission a été saisie de 97 dossiers contre 70 en 2003, soit une hausse de 38 %. La très grande majorité des saisines concerne des fonctionnaires de la police nationale et de l'administration pénitentiaire. Ces sont les jeunes issus de l'immigration maghrébine ou africaine pourtant français pour 64 % d'entre eux qui en sont les principales victimes. Par ailleurs, le sentiment d'impunité est aussi une cause importante de dérapage, selon la CNDS. Pourtant, souligne la CNDS, il y a parmi les interpellés des acteurs de la vie locale, des cadres et des artistes. Dans ce contexte, les actes racistes sont minimisés, couverts au nom de la solidarité entre collègues. Dans ses conclusions, l'étude de la CNDS note, entre autres, « qu'une fracture s'établit, pouvant amener des citoyens à pouvoir douter de vivre dans un État de droit s'ils ne sont pas traités comme tels ». Compte tenu de ces éléments regrettables, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales de lui indiquer les mesures urgentes qu'il entend prendre au sujet de ce dossier.
Réponse publiée le 18 octobre 2005
Le respect des règles républicaines et de déontologie des forces de police et de gendarmerie est impératif dans un État de droit et des directives constantes font, comme dans tout État démocratique, l'objet de rappels périodiques en ce sens. Toutefois, les 117 000 policiers, parce qu'il leur incombe de veiller au respect de la loi, de mettre en oeuvre la contrainte légitime et ainsi de préserver la paix publique, se trouvent en première ligne face aux multiples formes de violence qui marquent les rapports sociaux et dont l'intensité varie sur l'ensemble du territoire national. L'année dernière, 2,6 millions de missions de police secours ont été effectuées, 400 000 mesures de garde à vue prononcées et 700 000 personnes mises en cause. Cette même année, comme le relève l'observatoire national de la délinquance, le nombre de violences dont ont été victimes les dépositaires de l'autorité s'est élevé à 21 723 faits constatés (soit + 90,2 % par rapport à 1996) et 3 852 policiers ont été blessés lors de l'exercice de leurs missions. En 2004, les allégations de violences illégitimes, rapportées à l'activité des services de police (missions de secours), ont concerné 0,03 % des interventions de police. Et, alors que le contrôle exercé par l'autorité judiciaire dans le cadre des activités répressives des services de police est permanent et sans complaisance, 98 % des plaintes déposées pour des faits de violences illégitimes font l'objet, à Paris par exemple, d'un classement sans suite par le Parquet du tribunal de grande instance. La culture de résultat, instituée par le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, se mesure également par la qualité des relations professionnelles que les policiers entretiennent avec les citoyens, qu'ils soient victimes, témoins ou délinquants. Le 25 février 2005, par un message adressé à l'ensemble des personnels et intitulé « une police professionnelle appréciée des citoyens et davantage respectée », le ministre de l'intérieur a rappelé l'exigence de discernement et de proportionnalité dans l'usage de la force quand il s'avère nécessaire pour prévenir des désordres supérieurs. De même, le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire veille attentivement au respect des règles déontologiques exposées tant dans le statut général de la fonction publique (principe de neutralité du service public) que dans le règlement général d'emploi de la police nationale (exercice du pouvoir disciplinaire par l'autorité hiérarchique en cas de manquement) et dans le code de déontologie de la police nationale (intégrité, impartialité, exemplarité et respect absolu des personnes quelles que soient leur nationalité ou origine, leur condition sociale ou leurs convictions). Depuis 1999, un guide pratique de déontologie de la police nationale est diffusé dans toutes les écoles de formation de la police nationale. L'origine des plaignants, leur appartenance ou non à des groupes que la commission qualifie de « minoritaires » ne peuvent faire l'objet d'aucun traitement statistique. La législation française, notamment la loi relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés proscrit de manière générale la possibilité de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître, directement ou indirectement, les origines raciales ou ethniques des personnes, qu'il s'agisse d'auteurs ou de victimes d'infraction, et de fonctionnaires de police. Toutefois, si la police se trouve parfois au point de confrontation avec les populations issues de l'immigration, elle est également le reflet de cette société. Ainsi, la police nationale intègre dans ses rangs des fonctionnaires de tous horizons. À cet égard, les recrutements récents lui ont permis de s'ouvrir davantage sur la diversité de la société et ses réalités sociales. La présence notable de nombreux fonctionnaires originaires d'outre-mer, du Maghreb, ou ayant des noms à consonance étrangère est attestée dans la composition des équipages qui interviennent quotidiennement, notamment dans les quartiers classés en zone urbaine sensible, à forte population jeune et issue de l'immigration. L'usage des pouvoirs de contrainte hors des cas légaux constitue une atteinte indiscutable et inadmissible aux libertés publiques. Les programmes des formations initiale et continue des gradés et gardiens de la paix, officiers et commissaires de police comportent donc tous des enseignements en matière de déontologie (de 10 à 31 heures), de connaissance des populations et de sensibilisation aux actes racistes, antisémites ou xénophobes. Ces enseignements correspondent d'ailleurs aux propositions émises par la CNDS. Le centre national d'études et de formation de la police nationale propose régulièrement des journées d'études consacrées, par exemple, à l'initiation à la civilisation arabo-musulmane ou àl'islam des jeunes. Ces stages ont pour objectif une plus grande compréhension des différentes cultures. Le ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire participe pleinement, en effet, au dispositif gouvernemental de lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie par sa politique de recrutement, de formation initiale et continue des personnels en ce domaine. La diffusion depuis janvier 2005 d'un mémento procédural de lutte contre le racisme et l'antisémitisme à l'usage des services de police et de gendarmerie participe à la sensibilisation des personnels à ces questions. Le protocole d'accord sur la réforme des corps et carrières de la police nationale, signé le 17 juin 2004, prévoit le développement de la professionnalisation des gradés et gardiens de la paix ainsi qu'un renforcement de l'encadrement quotidien sur le terrain. Ces mesures seront à même de permettre un respect strict des règles de déontologie et répondent aux observations émises par la CNDS en ce domaine. Par ailleurs, la police nationale est l'une des institutions les plus contrôlées autorité hiérarchique, audits et enquêtes administratives de l'inspection générale de la police nationale, sanctions disciplinaires (entre 2001 et 2004 : de 2 109 à 2 563 sanctions prononcées, révocations multipliées par 2 - de 70 à 134 -), contrôles de l'autorité judiciaire, de la CNDS, d'organismes européens, sanctions pénales, sont autant de dispositifs qui n'ont pas d'équivalents en la matière.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droits de l'homme et libertés publiques
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Dates :
Question publiée le 10 mai 2005
Réponse publiée le 18 octobre 2005