Question écrite n° 65465 :
ventes par correspondance

12e Législature

Question de : M. Antoine Herth
Bas-Rhin (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Antoine Herth attire l'attention de M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation sur le problème des pratiques abusives auxquelles se livrent certaines sociétés de vente par correspondance, en faisant miroiter à leurs clients, souvent des personnes âgées, des gains alléchants qui se révèlent être, dans la majorité des cas, une tromperie pure et simple. En effet, des sociétés peu scrupuleuses usent de tous les artifices publicitaires possibles pour induire en erreur leurs clients, parfois au mépris de la loi. Ainsi, les clients sont incités à commander des produits quelconques dans l'espoir de gagner des sommes importantes, alors même que le nombre de gagnants est en réalité plus que minime. Aussi, il souhaiterait connaître les dispositions qu'il entend prendre en vue de faire cesser ces pratiques et d'apporter une meilleure protection juridique aux clients victimes du cynisme et des mensonges de ces sociétés de vente par correspondance.

Réponse publiée le 7 juin 2005

Le code de la consommation impose aux organisateurs de loteries commerciales des règles strictes de présentation et d'information des consommateurs ainsi que le dépôt du règlement chez un huissier chargé d'en vérifier la régularité. Afin d'éviter toute ambiguïté dans l'esprit de certains consommateurs qui pourraient croire que le fait de passer commande leur facilite l'accès au jeu ou à certaines modalités de sélection, voire augmente leurs chances de gagner, l'article L. 121-36 de ce code, qui crée une dérogation à la prohibition générale des loteries posée par la loi du 21 mai 1836, pose le principe d'une gratuité totale avant et pendant l'opération de loterie pour le participant et impose que le bulletin de participation à la loterie commerciale soit distinct de tout bon de commande de bien ou d'offres de services. Il en résulte que le bulletin de participation doit être détaché ou détachable du bon de commande. Dans cet esprit et pour éviter de dénaturer le caractère purement promotionnel et entièrement gratuit d'une participation à une loterie commerciale, les documents qui présentent l'opération publicitaire (la loterie) ne doivent susciter aucune confusion avec un document administratif ou bancaire au nom du consommateur ou encore avec une publication de la presse d'information. Par ailleurs, les consommateurs peuvent se prévaloir des dispositions de l'article L. 121-38 du code de la consommation pour obtenir gratuitement, lorsqu'il n'est pas annexé aux documents publicitaires, le règlement des opérations d'une loterie commerciale. De surcroît, les dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation relatives à la publicité trompeuse ou de nature à induire en erreur permettent de sanctionner les opérateurs indélicats qui présentent, sous le couvert de jeux-concours, des loteries publicitaires ne respectant pas les prescriptions de l'article L. 121-36 du même code. Le caractère ambigu des messages adressés au consommateur permet de relever le délit de publicité trompeuse. Depuis plusieurs années, des instructions régulières sont données aux services déconcentrés de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pour qu'ils maintiennent leur vigilance en matière de contrôle des loteries commerciales. Les actions de la DGCCRF ont permis d'améliorer de manière significative la situation et de moraliser le secteur des loteries même si un nombre très réduit d'opérateurs, bien connus et fréquemment condamnés, persévèrent dans leurs pratiques indélicates. Les infractions représentent actuellement moins de 1 % de l'ensemble des procédures transmises aux parquets au titre des différentes infractions au code de la consommation. De plus, les professionnels de la vente par correspondance ont amélioré leur code de bonne conduite conformément aux préconisations du Conseil national de la consommation (CNC). En outre, deux arrêts de la Cour de cassation marquent la volonté du juge face aux pratiques indélicates de certaines sociétés de vente par correspondance. Un arrêt de la Cour de cassation du 9 novembre 1999 a reconnu que la multiplicité des courriers ainsi que les méthodes comminatoires de la société émettrice de ces messages qui incitent les consommateurs à renvoyer le plus vite possible leur bon de participation au jeu, sous peine de perdre tout droit à participer au tirage, permettaient de fonder la qualification de mauvaise foi intentionnelle à l'encontre de la société. La Haute Cour a considéré que la privation du gain promis et les frustrations nées de cette fausse espérance constituaient une cause de préjudice et qu'il devait faire l'objet, au cas d'espèce, d'une indemnisation. Plus récemment, un arrêt de la Cour de cassation du 6 septembre 2002 a reconnu l'engagement de la responsabilité contractuelle de l'entreprise dès lors que, par un courrier personnalisé à un particulier, celle-ci lui avait annoncé de façon affirmative l'obtention d'un gain alors que ce n'était qu'une simple éventualité. La Haute Cour considère que la société a créé volontairement un « quasi-contrat » et s'est donc engagée à l'exécuter (art. 1371 du code civil). Cet arrêt oblige ainsi les sociétés de vente par correspondance qui proposent des opérations promotionnelles à se montrer plus claires et plus loyales dans la présentation de leurs offres et à cesser de faire espérer des gains illusoires par des faux-semblants. L'analyse des jurisprudences qui ont suivi cet arrêt de la Cour de cassation, dont celles de la cour d'appel d'Amiens du 8 octobre 2002 et du 22 novembre 2004, confirme les conclusions de la Haute Cour. Ces jurisprudences ultérieures révèlent que les juridictions ont désormais la possibilité de retenir une gamme plus étendue de fondements : fondement contractuel ou délictuel, retenant ou non l'existence d'une faute de l'opérateur ; condamnation sur la base d'utilisation de formules à sens caché et/ou sur celle du caractère répétitif et inconditionnel de l'annonce de gains ; condamnation pour non mise en évidence du caractère aléatoire du gain ; condamnation pour utilisation d'une typographie extrêmement réduite et peu lisible pour le consommateur. Ces fondements permettent une lutte plus efficace contre les pratiques indélicates de certains opérateurs en donnant le choix aux juridictions de retenir les fondements les plus adaptés aux circonstances de la cause comme le démontrent les attendus et les conclusions de la Cour d'appel d'Amiens, ce qui conduit à un renforcement de la protection des consommateurs. Dans ce contexte de décisions judiciaires favorables à la protection des consommateurs, les services de contrôle de la DGCCRF poursuivront leurs actions de vérification des messages publicitaires élaborés par les organisateurs de loteries commerciales et dresseront un procès-verbal chaque fois qu'une infraction sera constatée. Les consommateurs de bonne foi seront invités à se constituer partie civile à l'appui d'une procédure pénale ou à saisir directement les tribunaux civils en vue d'obtenir le versement du gain promis lorsque l'organisation d'une loterie annoncera un gain à une personne nommément désignée sans mettre en évidence l'existence d'un aléa tel qu'un prétirage au sort.

Données clés

Auteur : M. Antoine Herth

Type de question : Question écrite

Rubrique : Ventes et échanges

Ministère interrogé : PME, commerce, artisanat, professions libérales et consommation

Ministère répondant : PME, commerce, artisanat, professions libérales et consommation

Dates :
Question publiée le 17 mai 2005
Réponse publiée le 7 juin 2005

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