lutte contre l'exclusion
Question de :
Mme Muguette Jacquaint
Seine-Saint-Denis (3e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
Mme Muguette Jacquaint attire l'attention de Mme la ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion sur la progression de la pauvreté et de l'exclusion dans notre pays. Avec un million de érémistes, 6 % de la population vivant au-dessous du seuil de pauvreté et deux millions et demi de chômeurs, ce phénomène a pris une ampleur inégalée. C'est ce qu'a mis en évidence, à l'occasion de son dixième anniversaire, le réseau Alerte qui fédère une quarantaine d'associations oeuvrant dans ce domaine, dont ATD, Quart-Monde, Emmas, le Secours populaire et le Secours catholique. Alerte a voulu ainsi lancer un véritable cri d'alarme face à l'ampleur du phénomène en soulignant que la lutte contre la pauvreté et l'exclusion ne pouvait demeurer du seul ressort des associations et qu'elle devait également mobiliser les entreprises et les organisations syndicales. Pour autant, il est paradoxal que l'État relâche son effort dans ce domaine. Elle lui demande en conséquence, si elle a l'intention de rétablir, dans le prochain budget, les crédits de la politique de la ville qui ont diminué pour certaines associations luttant contre la pauvreté et l'exclusion.
Réponse publiée le 15 novembre 2005
Des trois approches de la pauvreté généralement retenues : pauvreté monétaire, pauvreté en termes de conditions de vie et pauvreté dite « administrative », mesurée par les minima sociaux, seules les deux dernières peuvent être mobilisées pour appréhender les évolutions récentes. Les données utilisées pour estimer la pauvreté monétaire, basées sur l'analyse des revenus fiscaux des ménages, ne sont disponibles actuellement que jusqu'à la seule année 2001. À cette date, il apparaissait que le taux de pauvreté monétaire relative montrait une stabilité depuis 1996, situant la France à un niveau proche de la moyenne de l'Union européenne, avec une proportion de ménages pauvres de 11 %, contre 12 % en moyenne européenne lorsque celle-ci est calculée avec un seuil de 60 % du revenu médian (utilisé habituellement pour les comparaisons internationales). Concernant l'approche en, termes de conditions de vie, l'indicateur synthétique, basé sur 2 indicateurs élémentaires, dessine une amélioration en 2003-2004. L'amélioration porterait plus spécifiquement sur les conditions de logement en termes de confort (diminution des déclarations d'absence dans le logement de salle de bains, de toilettes, de système de chauffage...). L'approche fondée sur les minima sociaux dessine une évolution qui semble plus en phase avec les difficultés observées sur le marché du travail. Il convient toutefois d'interpréter les données avec précaution car les évolutions des nombres d'allocataires de minima sociaux sont sensibles aux modifications de réglementation : celles concernant les minima, sociaux eux-mêmes, mais aussi celles d'autres dispositifs comme, par exemple, l'indemnisation du chômage. Après avoir diminué au cours des années 2000 à 2002, le nombre d'allocataires de minima sociaux s'est accru, de 1,6 % en 2003, les données 2004 n'étant pas encore disponibles pour l'ensemble des minima sociaux. Fin 2003, 3,3 millions de personnes étaient allocataires de l'un des neuf dispositifs destinés à garantir un minimum de ressources aux personnes ou aux ménages. En incluant les ayants droit (enfants et conjoints des allocataires), 6 millions de personnes étaient ainsi couvertes par les minima sociaux. Après avoir diminué au cours des années 2000 et 2001, le nombre d'allocataires du RMI a augmenté de 1,6 % en 2002, de 4,9 % en 2003 et de 8,2 % en 2004. Ces évolutions reflètent largement les difficultés persistantes sur le marché du travail, accentuées par le contexte économique. La forte augmentation constatée en 2004 est aussi une conséquence de la réforme du système d'assurance chômage décidée fin 2002. Depuis 2003, le Gouvernement a pris un ensemble d'initiatives tendant à apporter des réponses aux situations de grande difficulté auxquelles sont confrontées des personnes durablement éloignées de l'emploi et ou ne pouvant exercer l'ensemble de leurs droits sociaux, économiques ou familiaux. Ainsi, le 6 juillet 2004, pour la première fois depuis le vote de la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, s'est tenu le comité interministériel de lutte contre l'exclusion, précédé d'une conférence nationale. Le comité interministériel a pris de nombreuses mesures en faveur des populations confrontées à des situations particulièrement difficiles, qu'il s'agisse de renforcer l'accès aux droits fondamentaux ou d'apporter des réponses en matière de logement ou d'hébergement. En matière d'emploi, il est apparu nécessaire de donner un nouvel élan à la politique gouvernementale. C'est pourquoi le plan et la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 ont posé comme « priorité absolue » le retour à l'activité, privilégiant la sortie des logiques d'assistance, avec : un service public de l'emploi rénové, plus réactif et mieux coordonné, un accompagnement renforcé et plus individualisé des demandeurs d'emploi en difficulté ; une meilleure insertion professionnelle des jeunes, notamment par une relance de la formation en apprentissage ; une réorganisation des contrats aidés et la création du contrat d'avenir directement accessible aux titulaires de minima sociaux ; diverses mesures en faveur du développement de l'activité économique et de la création d'entreprises ; un soutien accru au secteur de l'insertion par l'activité économique pour mieux répondre aux attentes d'un public particulièrement fragile. La prévention des situations d'exclusion a également fait l'objet d'un renforcement dans le cadre du plan et de la loi pour la cohésion sociale, qu'il s'agisse des dispositifs relatifs au logement ou à l'égalité des chances pour les enfants en fragilité. Diverses dispositions prévues dans le cadre du programme quinquennal de rénovation urbaine ont été réévaluées. Ainsi, ce sont 500 000 logements locatifs sociaux nouveaux qui sont programmés de 2005 à 2009, auxquels s'ajoute la remise à disposition de 300 000 logements privés. En outre, les différentes mesures relatives à la prévention des expulsions ont été mises en oeuvre, notamment le guide d'information sur les procédures préventives, en direction des travailleurs sociaux. En mettant l'accent sur la nécessité de développer les apprentissages fondamentaux, le Gouvernement a donné une inflexion forte à la politique de l'éducation afin d'apporter une réponse à l'une des causes principales de l'échec scolaire et des difficultés rencontrées par certains jeunes au moment de leur insertion dans le monde du travail. Aussi, la prévention de l'illettrisme et du décrochage scolaire a fait l'objet d'une mobilisation particulière dans le cadre du plan de cohésion sociale, avec la création d'équipes de réussite éducative qui ont bénéficié d'une mise en place rapide. La situation des populations vulnérables a fait l'objet d'une attention spécifique, qu'il s'agisse des questions d'hébergement, de logement adapté ou d'aide alimentaire. Ainsi, la loi de cohésion sociale a créé un critère de priorité pour leur accès au logement social. Dans le domaine de l'aide alimentaire, l'effort de l'État a plus que quadruplé de 2002 à 2005, passant de 4 millions d'euros à plus de 18 millions cette année. Les crédits de la lutte contre l'exclusion, conformément à l'annonce du ministre devant le Conseil national des politiques de lutte contre l'exclusion (CNLE) du 16 septembre 2005, n'ont fait l'objet d'aucune mesure de régulation budgétaire. Le budget total consacré au programme en faveur de la lutte contre l'exclusion sociale s'élève à 804 millions d'euros pour 2005. En outre, 70 millions d'euros de crédits complémentaires ont été obtenus en cours d'année pour faire face aux besoins qui se sont exprimés sur le terrain. S'agissant des crédits de la politique de la ville, la priorité du budget 2006 est la stabilisation et la sanctuarisation des financements dédiés à l'accompagnement social, dans le cadre du Fonds interministériel à la ville (FIV). 106 millions d'euros seront ainsi conduits en direction des habitants des quartiers en difficulté.
Auteur : Mme Muguette Jacquaint
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : intégration, égalité des chances et lutte contre l'exclusion
Ministère répondant : cohésion sociale et parité
Signalement : Question signalée au Gouvernement le 8 novembre 2005
Dates :
Question publiée le 24 mai 2005
Réponse publiée le 15 novembre 2005