héritiers
Question de :
M. Jacques Myard
Yvelines (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jacques Myard appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la nécessité de parachever l'évolution de notre droit vers une totale disparition des inégalités entre enfants légitimes, naturels, et adultérins en matière de successions. En effet, l'évolution de la société, et notamment l'extension du nombre de familles en union libre à partir des années 60 a conduit le législateur à mettre à égalité les enfants dits légitimes, issus du mariage, et les enfants naturels, nés d'un couple non marié. C'est pourquoi la loi du 3 janvier 1972 a supprimé cette distinction pour toutes les successions ouvertes après la publication de la loi. Néanmoins la loi du 3 janvier 1972 n'a pas supprimé l'inégalité entre enfants légitimes et naturels d'une part et enfants adultérins d'autre part nés d'un père ou d'une mère marié au moment de la naissance à un conjoint qui n'est pas parent de l'enfant. Or cette suprématie du mariage en matière de droits des héritiers a été condamnée par la Cour européenne des Droits de l'Homme comme contraire au principe de non-discrimination fondée sur la naissance. C'est pourquoi la loi du 3 décembre 2001 a supprimé cette distinction en alignant le droit de l'enfant adultérin sur celui de l'enfant légitime pour toutes les succession non liquidées au moment de sa publication. Or, compte tenu du délai parfois très long de la liquidation des successions, cette disposition induit une sorte de rétroactivité pour les successions ouvertes avant le 3 décembre 2001, et peuvent même s'appliquer à certaines successions ouvertes avant le 3 janvier 1972, alors que les dispositions de la loi du 3 janvier 1972 ne s'appliquent qu'aux successions ouvertes après cette date. Il en résulte que dans les successions ouvertes avant le 3 janvier 1972, et non liquidées au 3 décembres 2001, qui concernent certes un nombre très limité de cas. mais bien réels, le droit des enfants adultérins est identique à celui des enfants légitimes compte tenu de la loi du 3 décembre 2001, mais celui des enfants naturels est inférieur de moitié à celui des enfants légitimes et donc des enfants adultérins étant donnée la non-rétroactivité de la loi du 3 janvier 1972. L'ancienneté de ces successions, et leur nombre limité, permet dans la plupart des cas aux notaires de trouver un accord amiable entre les héritiers, dès lors qu'il s'agit le plus souvent d'entériner un partage de fait assez ancien. Mais l'ancienneté de certaines successions rend également dans certains cas difficile la recherche des héritiers qui souvent après deux ou trois générations n'ont plus de relations entre eux. Dans ces conditions, le caractère marginal de ces situations ne saurait justifier le refus de légiférer pour supprimer définitivement cette inégalité qui résulte de la combinaison de deux lois censées les corriger. Il lui demande en conséquence s'il entend étendre les dispositions de la loi du 3 janvier 1972 aux successions ouvertes avant cette date et non liquidées à ce jour.
Réponse publiée le 11 avril 2006
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral a supprimé l'ensemble des discriminations successorales subies par les enfants dont le père ou la mère était engagé dans les liens du mariage au moment de leur conception. Désormais, la part héréditaire et la réserve de ces enfants sont identiques à celles des autres enfants du défunt. Ces nouvelles dispositions sont applicables aux successions déjà ouvertes, mais qui n'ont pas été partagées à la date d'entrée en vigueur de la loi, sous réserve des accords amiables intervenus et des décisions judiciaires irrévocables. En ce qui concerne les enfants naturels simples, ils ne subissent plus de discriminations successorales depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 72-3 du 3 janvier 1972 sur la filiation. À l'époque, l'application de cette loi aux successions déjà ouvertes avait été écartée. De la combinaison des dispositions d'entrée en vigueur de ces deux lois, il résulte en droit que dans les successions ouvertes avant le 1er août 1972 et non encore partagées, les enfants naturels adultérins ont les mêmes droits que les enfants légitimes, tandis que les enfants naturels simples ont une part moindre. Bien que le nombre de successions concernées soit restreint, l'adoption par l'Assemblée nationale du projet de loi n° 2427 portant réforme des successions et des libéralités le 22 février dernier a permis de supprimer cette discrimination. En effet, le Gouvernement a émis un avis favorable sur un amendement visant à modifier le 2° du II de l'article 25 de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 et permettant désormais d'aligner rétroactivement les droits de tous les enfants naturels sur ceux des enfants légitimes.
Auteur : M. Jacques Myard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Donations et successions
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 31 mai 2005
Réponse publiée le 11 avril 2006