Question écrite n° 6754 :
caprins

12e Législature

Question de : Mme Ségolène Royal
Deux-Sèvres (2e circonscription) - Socialiste

Depuis le 15 mars 2002, la loi prévoit l'abattage de tous les troupeaux où un cas de tremblante est dépisté. Dans le département des Deux-Sèvres, des cas de tremblantes se sont révélés dans deux élevages. Depuis, un collectif contre l'abattage total s'est mis en place. Aujourd'hui, scientifiquement, nous connaissons peu de choses sur cette maladie animale. Rien ne nous permet de laiser croire à un problème de santé publique. Alors pourquoi être sur un objectif d'abattage total des troupeaux lors d'un cas de tremblante. Du point de vue des éleveurs, les mesures prises semblent non fondées sur le plan scientifique. Les agriculteurs s'opposent à tout abattage systématique du troupeau. Cette mesure brutale, uniquement dictée par un principe de précaution maximum et sans réelle justification scientifique met en péril des éleveurs et au-delà la filière caprine. La tremblante est une maladie très ancienne, sans risque de contamination à l'homme. A ce jour, condamner des troupeaux de chèvres atteints de tremblante sous couvert qu'ils pourraient cacher quelques cas d'ESB est absurde puisque la recherche ne permet pas de l'attester. Ils demandent la révision de l'arrêté du 15 mars 2002, qui fixe les mesures de police sanitaire relatives à la tremblante caprine, dans l'attente d'un test rapide de distinction entre tremblante et ESB. Ils estiment que si l'abattage total est une aberration, il faut par contre se donner les moyens d'accélérer les recherches pour faire la lumière sur ce problème et proposent que les élevages concernés soient placés sous surveillance sanitaire par la direction départementale, des services vétérinaires, un abattage partiel d'un nombre limité de caprins avec indemnisation sur expertise systématique du préjudice et une généralisation des tests sur les animaux réformés des élevages concernés afin d'avoir une meilleure connaissance de la maladie. Mme Ségolène Royal demande à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales quelles mesures il compte mettre en place pour répondre aux attentes des éleveurs caprins et sortir de l'impasse ceux déjà concernés par la maladie.

Réponse publiée le 7 avril 2003

La tremblante est une maladie réputée contagieuse des ovins et des caprins appartenant au groupe des encéphalopathies spongiformes transmissibles (EST). Maladie animale non zoonotique (c'est-à-dire non transmissible de l'animal à l'homme) et connue de longue date en France (depuis plus de deux cents ans), elle est systématiquement mortelle pour les animaux qui en sont atteints et elle se caractérise, dans sa phase clinique, par une symptomatologie nerveuse après une incubation longue allant de six mois à plusieurs années. L'attention portée aujourd'hui à cette maladie découle de l'hypothèse, à ce jour non confirmée, d'un passage dans les conditions naturelles de l'agent de l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) aux petits ruminants ; cette « ESB ovine » ne pouvant être distinguée de manière simple de la tremblante. Chez les petits ruminants l'agent de la tremblante dissémine très largement dans les tissus périphériques et il existe donc une possibilité qu'il puisse se retrouver dans la viande et le lait. Lors d'infection expérimentale d'un petit ruminant par l'agent de l'ESB, on observe la même diffusion de l'agent de l'ESB. Chez les bovins en revanche, l'agent de l'ESB reste essentiellement confiné au système nerveux central. Par ailleurs, à la différence des autres EST, comme l'ESB chez les bovins, la transmission entre individus réceptifs de l'agent de la tremblante ne fait aucun doute, même si ses modalités précises restent peu connues. Il est néanmoins clairement démontré que le placenta des femelles infectées constitue une source importante d'infectiosité pour les autres animaux de l'élevage. Ainsi, la transmission dite « horizontale » (c'est-à-dire par contact entre animaux) de la maladie au sein d'un troupeau est scientifiquement bien établie et il est supposé que la voie orale constitue la voie majeure de contamination dans les conditions naturelles. De même, les introductions en provenance d'élevages infectés semblent constituer la source essentielle de propagation au sein d'une communauté d'élevages. Les voies de contamination et de dissémination de l'agent de l'ESB chez les ovins et les caprins, si l'ESB existait naturellement dans ces espèces, seraient très vraisemblablement similaires à celles de la tremblante. Le diagnostic de la tremblante en élevage est resté longtemps fondé sur la suspicion clinique, confirmée ou non par des lésions microscopiques caractéristiques dans l'encéphale. Désormais, il existe des outils permettant de détecter cette maladie avant son expression clinique, alors même que l'animal est en phase d'incubation : il s'agit des tests rapides dont l'utilisation a débuté en avril 2002 dans le cadre de la campagne nationale d'estimation de la prévalence de la tremblante en France. Un vaste plan de surveillance de la tremblante a donc été lancé à la demande de la Commission européenne depuis le 1er avril 2002. Il concerne environ 100 000 ovins et caprins qui sont prélevés à l'équarrissage et à l'abattoir et analysés par tests rapides. Au 5 décembre 2002, il a été enregistré plus de 100 cas de tremblante sur 78 000 analyses réalisées. Parallèlement des mesures d'éradication ont été mises en place dès mars 2002 prévoyant un abattage des ovins sensibles et de l'ensemble des caprins des cheptels atteints. L'objectif de ces mesures est double, d'abord éviter la dissémination de l'agent infectieux et accélérer son élimination au sein du cheptel ovin et caprin français ; ensuite assurer la protection du consommateur dans l'hypothèse où la tremblante masquerait l'ESB. Pour l'espèce ovine, ces mesures sont fondées sur les connaissances acquises sur la résistance génétique de certains animaux aux EST. Il est donc possible, au sein d'un cheptel atteint, de cibler l'élimination sur les seuls animaux dits « sensibles » à la maladie et donc susceptibles de véhiculer l'agent infectieux. Dans l'espèce caprine, les recherches n'ont pas permis à ce jour d'établir de liens clairs entre l'expression de la maladie et un possible déterminisme génétique. Le principe de précaution impose donc que l'ensemble des animaux appartenant à un cheptel où la présence de l'agent infectieux a été mis en évidence soient soumis aux mesures d'éradication. Le dispositif d'éradication a fait l'objet, avant sa mise en oeuvre par voie réglementaire dans l'arrêté du 15 mars 2002, d'une saisine de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) qui a rendu un avis favorable en date du 8 novembre 2001. Les projets de modification de l'arrêté du 15 mars 2002 ont été élaborés et soumis à l'avis de l'AFSSA. Ces projets visent notamment à séparer dans deux arrêtés distincts les mesures traitant des caprins de celles traitant des ovins. La définition des élevages devant être soumis à éradication a également été clairement précisée. Ces projets d'arrêtés devraient être publiés d'ici quelques semaines. Les principes fondamentaux de l'éradication, conformes aux avis de l'AFSSA, ont été conservés dans les projets : élimination des animaux sensibles dans l'espèce ovine et élimination de tous les animaux dans l'espèce caprine (avec un délai de six mois). Ces principes sont d'ailleurs repris dans un projet de réglementation communautaire qui entrera en vigueur à l'automne 2003 et concernera l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne.

Données clés

Auteur : Mme Ségolène Royal

Type de question : Question écrite

Rubrique : Élevage

Ministère interrogé : agriculture, alimentation et pêche

Ministère répondant : agriculture, alimentation et pêche

Dates :
Question publiée le 18 novembre 2002
Réponse publiée le 7 avril 2003

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