Question écrite n° 68169 :
armée

12e Législature

Question de : M. Jacques Bascou
Aude (2e circonscription) - Socialiste

M. Jacques Bascou appelle l'attention de Mme la ministre de la défense sur le suivi sanitaire des personnes qui, à titre militaire mais aussi civil, se sont trouvées exposées à l'environnement des essais nucléaires français au Sahara et en Polynésie française. Plusieurs dizaines de milliers de personnes auraient été en contact plus ou moins prolongé avec les retombées des plus de deux cents essais menés à partir des années soixante. Aujourd'hui, nombre des vétérans de ces essais cherchent à faire reconnaître un rapport de causalité entre leur exposition à cet environnement et des pathologies qui les affectent, personnellement ou leurs enfants. Pour évaluer la dimension collective de leurs problèmes de santé, ils font notamment référence à l'exemple d'autres pays, comme les États-Unis où existe un registre fédéral d'exposition aux radiations. Un suivi exhaustif et précis de la santé de l'ensemble des vétérans des essais nucléaires serait aujourd'hui techniquement réalisable en France si le dossier médical personnel qui doit être informatisé faisait état de ce facteur de risque. Il lui demande si, pour améliorer la veille sanitaire, le Gouvernement a l'intention de faire mentionner sur le dossier médical personnel l'exposition professionnelle à l'environnement spécifique du nucléaire militaire. - Question transmise à M. le ministre délégué aux anciens combattants.

Réponse publiée le 27 septembre 2005

Dans son rapport publié en février 2002, l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a dressé l'historique des essais nucléaires français et étrangers et a analysé les études dosimétriques effectuées. Dans leurs conclusions, les auteurs de ce rapport reconnaissent que les mesures déjà engagées répondent aux besoins et indiquent notamment qu'il n'y a pas lieu de transposer en France des mécanismes de prise en charge utilisés dans d'autres États, compte tenu de la couverture sociale en place dans notre pays. En effet, chaque citoyen français bénéficie d'une couverture sociale par l'assurance maladie de la sécurité sociale qui prend en charge les coûts afférents à la pathologie qu'il peut présenter et, dans le cas où cette pathologie est reconnue d'origine professionnelle, des mécanismes propres aux milieux civils et militaires permettent la prise en charge spécifique de la maladie. En matière d'indemnisation, le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre permet d'indemniser tout militaire qui, s'il ne peut bénéficier de la présomption d'imputabilité, peut, à tout moment, utiliser la démarche d'imputabilité par preuve. Celle-ci peut être admise à partir d'un faisceau de présomptions. Ainsi, en l'absence d'une preuve indiscutable, un ensemble de circonstances permet d'admettre l'imputabilité. Concernant les essais nucléaires, des pensions ont pu être concédées près de vingt ans après la date du fait générateur. La législation actuelle autorise donc, même longtemps après les faits, une indemnisation équitable des dommages physiques subis, sans qu'il soit nécessaire de mettre en oeuvre un régime de présomption de causalité pour le seul risque nucléaire. Sur le plan des conséquences sanitaires des expérimentations, le ministre entend par ailleurs préciser que, dès la fin des essais, deux études épidémiologiques ont été confiées à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), portant sur la mortalité et la morbidité des cancers en Polynésie française. Leurs résultats sont publics, et deux nouvelles études ont été diligentées sur ce sujet. Le registre des cancers en Polynésie française est, compte tenu de ces travaux, régulièrement mis à jour et doit continuer à l'être afin que soit poursuivie la veille sanitaire mise en place par le gouvernement de ce territoire. En tout état de cause, le suivi médical ainsi que celui des conditions de travail de l'ensemble du personnel ayant participé aux expérimentations nucléaires françaises à Mururoa ou à Fangataufa en même temps que la surveillance de l'environnement radiologique de la population de la Polynésie française n'ont pas permis de déceler des expositions aux rayonnements ionisants significativement supérieures à la radioactivité naturelle. L'ensemble de ces études et leurs résultats peuvent être communiqués aux personnes concernées par cette question. La loi relative aux droits des malades est appliquée, et chacun des dossiers est instruit et examiné avec toute l'attention légitime et nécessaire, dans la plus totale transparence. S'agissant des conséquences environnementales de ces expérimentations, une étude de la situation radiologique des deux atolls, de Mururoa et de Fangataufa, a été réalisée par une équipe scientifique internationale indépendante des autorités gouvernementales françaises, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), à l'issue de la dernière campagne d'essais. Cette étude confirme qu'il n'y aura pas d'effet sur la santé à court terme comme à long terme qui puisse être diagnostiqué médicalement et qui serait attribuable aux matières radioactives résiduelles présentes à Mururoa ou à Fangataufa. Il convient d'ajouter que le suivi sanitaire des essais nucléaires français fait l'objet d'une attention particulière de la part des pouvoirs publics. C'est ainsi qu'à l'initiative du Président de la République les ministres en charge de la santé et de la défense ont confié, le 15 janvier 2004, au directeur général de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) et au délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations intéressant la défense (DSND) le pilotage conjoint d'un comité de liaison pour la coordination du suivi sanitaire des conséquences des essais nucléaires au Sahara et en Polynésie française. Ce comité est composé de représentants des ministres en charge de la défense et de la santé, des Instituts et agences concernés (institut national de veille sanitaire, Centre international de recherche sur le cancer, Centre national de la recherche scientifique...), des responsables de la défense et du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) en charge des essais nucléaires, qui peuvent s'entourer en tant que de besoin des personnes qu'ils jugent utiles. Il est ouvert, en effet, à toutes les contributions, y compris d'ordre scientifique, sur les conséquences éventuelles des essais nucléaires sur la population. Ses travaux sont organisés autour de deux thèmes majeurs concernant, pour le premier, la définition et la caractérisation des pathologies susceptibles d'être radio-induites et, pour le second, l'étude des catégories de personnes concernées par les essais nucléaires. Un premier rapport d'étape a été rendu public en avril dernier, et le rapport final de ces travaux est attendu pour 2006 ou 2007.

Données clés

Auteur : M. Jacques Bascou

Type de question : Question écrite

Rubrique : Défense

Ministère interrogé : défense

Ministère répondant : anciens combattants

Dates :
Question publiée le 21 juin 2005
Réponse publiée le 27 septembre 2005

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