politique agricole
Question de :
M. Serge Janquin
Pas-de-Calais (10e circonscription) - Socialiste
M. Serge Janquin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales sur les vives craintes ressenties par les exploitants de la région Nord - Pas-de-Calais relatives à la mise en place du classement en zone vulnérable, à la suspension des contrats territoriaux d'exploitation et aux différences de revenus agricoles. A l'origine d'un constat d'eutrophisation de la mer du Nord et de la Manche, due à une forte présence d'azote et de phosphore, et envisagé par l'Europe, le classement en zone vulnérable sur la quasi-totalité de la région Nord - Pas-de-Calais risque d'aller cependant contre l'effet environnemental souhaité, en entraînant chez certains petits producteurs l'arrêt de la production animale par le retournement des prairies. Aussi, ce classement obligerait nécessairement l'ensemble des exploitants à procéder à un bilan agronomique et à une remise aux normes dont le financement et la participation à l'investissement varieraient en fonction de la taille des structures. Cette mesure impliquerait, en ce sens, une inégalité de traitement entre les différents exploitants. Les contrats territoriaux d'exploitation (CTE), jugés à leur mise en place administrativement complexes par la profession agricole, qui en réclamait un assouplissement, ont subitement été suspendus, laissant la moitié des dossiers en cours d'instruction sans réponse. Les agriculteurs de la région Nord - Pas-de-Calais ayant instruit ces dossiers et consacré du temps à la réflexion de leur projet, reprochent aujourd'hui cette disposition brutale, le manque d'adaptation des mesures entre les différentes régions et départements et regrettent que le CTE ne puisse être appliqué sur l'intégralité de leur territoire en raison des craintes d'expropriation en agriculture péri-urbaine. Aussi, le décalage entre le pouvoir d'achat des petits agriculteurs et celui du reste de la société laisse entrevoir qu'à défaut de bénéficier d'une augmentation des prix agricoles et d'une politique contractuelle de soutien, cette frange d'agriculteurs, dont les revenus n'excèdent pas 7 600 EUR, pourrait disparaître. Il lui demande dans ces conditions quelles mesures il compte mettre en oeuvre afin d'éviter l'exclusion de certains agriculteurs de la société de consommation, quelle disposition en matière d'harmonisation des CTE il prévoit de rétablir, afin de prémunir la région Nord - Pas-de-Calais des risques d'expropriation et quelle directive, dans la mise en place du projet de classement en zone vulnérable, il entend donner pour parer les problèmes environnementaux.
Réponse publiée le 10 mars 2003
Les critères de délimitation des zones vulnérables ont été fixés par la directive 91-676/CE du 12 décembre 1991 dite directive « nitrates ». La teneur de nitrates dans les eaux, son évolution ainsi que les risques d'eutrophisation liés aux nitrates font partie de ces critères. Dans un arrêt du 27 juin 2002, la Cour de justice a condamné la France pour mauvaise délimitation des zones vulnérables, en considérant que l'azote d'origine agricole participe à l'eutrophisation de la mer du Nord et que les départements d'où proviennent ces rejets ne doivent pas échapper au champ d'application de la directive « nitrates ». En conséquence, la ministre de l'écologie et du développement durable et le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ont demandé aux préfets des départements concernés des régions de Basse et Haute-Normandie, Picardie et Nord - Pas-de-Calais de procéder à une extension significative des zones vulnérables. Ce classement implique, pour l'ensemble des agriculteurs des zones considérées, le respect de certaines prescriptions relatives aux épandage des fertilisants azotés. En contrepartie, tous les éleveurs de ces zones deviennent éligibles au programme de maîtrise des pollutions liées aux effluents d'élevage (PMPOA) qui vient d'être réformé. Ce programme prévoit d'accorder des subventions aux éleveurs pour les aider à respecter les prescriptions de la directive « nitrates », notamment en finançant au taux de 100 % l'étude préalable et le projet agronomique. Cela permet de faciliter la mise en place du plan de fumure et du cahier d'épandage dont la tenue est rendue obligatoire par la directive « nitrates ». De plus, des études sont en cours pour valider des systèmes simplifiés de traitement des effluents peu chargés issus des élevages laitiers. Ces procédés devraient être validés prochainement et constitueront, notamment pour les plus petits élevages laitiers, une alternative peu coûteuse au tout-stockage et cela tout en répondant à la nécessité de restaurer la qualité des eaux. Cette mesure, comme la définition d'une norme unique pour les rejets azotés des vaches laitières de simplification, constitue une simplification des procédures telle que le Premier ministre l'a annoncée. D'autres relatives à ce même programme sont envisagées. En ce qui concerne les contrats territoriaux d'exploitation (CTE), leur procédure a dû être suspendue, au cours de l'été dernier, en raison de la grande complexité du dispositif et de la faible efficacité environnementale de ses mesures ainsi que de son caractère inéquitable qui s'est traduit par des montants d'aides très différents d'une région, d'un département, voire d'une zone à l'autre. Pour autant, ce moratoire ne signifie évidemment pas suppression du dispositif, car il convient de favoriser aussi bien une démarche contractuelle, qu'une approche qui consiste à rémunérer les services rendus par les agriculteurs à la fois en matière économique, mais aussi pour l'entretien des espaces, la préservation de l'environnement et l'amélioration de la qualité des produits. En concertation avec les organisations professionnelles agricoles représentatives et les collectivités locales, a été ainsi défini un nouveau dispositif à la fois plus simple, plus équitable, plus efficace sur le plan environnemental et mieux encadré sur le plan budgétaire que le CTE. Ce nouveau dispositif, dénommé contrat d'agriculture durable (CAD), comportera deux volets : économique et social, d'une part, territorial et environnemental, d'autre part. Les agriculteurs auront le choix de prévoir des engagements soit dans les deux volets, soit en contractualisant uniquement des mesures agro-environnementales. Le CAD sera plus équitable que le CTE puisque tous les départements devront respecter un même montant moyen des contrats fixé à 27 000 euros. Le respect de cette moyenne, ainsi que la notification d'enveloppes régionales de droits à engager, permettra en outre de mettre en place un réel encadrement budgétaire nécessaire à la pérennité du dispostif. L'impact environnemental sera renforcé en ciblant mieux, pour chaque territoire, les enjeux environnementaux prioritaires et en retenant les mesures les plus appropriées pour y répondre. Le dispositif sera simplifié en termes de déclaration des engagements par les agriculteurs, d'instruction et de contrôle. Enfin, une plus large autonomie sera offerte à l'échelon local, qu'il soit régional ou départemental, dans la détermination des zonages environnementaux ou dans la répartition des enveloppes financières : les collectivités locales seront invitées, si elles le souhaitent, à participer au dispositif. La parution des textes réglementaires relatifs aux CAD est prévue dans le courant du premier semestre 2003. Compte tenu des difficultés qui peuvent résulter pour les producteurs de ce délai supplémentaire, il a été décidé de mettre en place un dispositif transitoire. Sont concernés les agriculteurs dont l'instruction de la demande était terminée par les directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) le 6 août dernier, les jeunes en cours d'installation dont le CTE conditionne une aide à la transmission ou à l'installation, les dossiers dont le report ferait perdre la participation financière prévue par une collectivité locale ou territoriale dans le cadre des CTE, et enfin les demandeurs qui ont déjà réalisé leur investissement. Leur dossier sera examiné par la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA) sans modification de leur architecture d'ensemble. Toutefois, il devra respecter un montant moyen pour le département de 27 000 euros.
Auteur : M. Serge Janquin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : agriculture, alimentation et pêche
Ministère répondant : agriculture, alimentation et pêche
Dates :
Question publiée le 18 novembre 2002
Réponse publiée le 10 mars 2003