peines
Question de :
M. Jacques Remiller
Isère (8e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jacques Remiller souhaite attirer l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, au sujet de l'exécution des peines de prison ferme. En effet, le ministère de la justice a publié récemment une étude portant sur les condamnations de 2001, étude dont il ressort que, dix-huit mois après le jugement, 45,5 % des peines de prison ferme ne sont pas exécutées. Et la situation se serait aggravée depuis, d'après les magistrats. Parmi les raisons invoquées, il y a l'absence du condamné (22 %), la grâce ou l'amnistie présidentielle (13 %). Mais, dans 12 % des cas, l'inexécution du jugement n'a aucun motif juridique. Même les mesures alternatives à l'emprisonnement, telles que le sursis avec mise à l'épreuve ou les travaux d'intérêt général, ne sont pas exécutées intégralement. Cela, en plus d'affecter la crédibilité de la justice, encourage les jeunes délinquants à poursuivre, voire augmenter leur activité délictuelle. Il souhaiterait donc savoir quelles mesures il compte proposer à court terme afin de résorber le nombre des peines de prison ferme non appliquées.
Réponse publiée le 6 février 2007
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que l'exécution des peines constitue l'une des priorités de son action et que l'amélioration des délais de mise à exécution des peines a été l'un des objectifs prioritaires de l'année 2006, dans le prolongement d'une action menée depuis plusieurs années, et en application de la loi du 9 mars 2004, qui affirme le principe de l'exécution immédiate des peines. C'est par souci de transparence que la chancellerie a rendu publique l'enquête réalisée en 2003 auprès d'un échantillon de trente tribunaux de grande instance portant sur l'exécution des peines prononcées entre le 1er et le 30 novembre 2001. Cette étude fait apparaître que 54,5% des peines d'emprisonnement ferme prononcées en matière correctionnelle ont été exécutées dans le délai de dix-huit mois après le prononcé du jugement. Il convient de souligner que l'étude démontre aussi que 20 % des peines n'ont pas été ramenées à exécution parce que non encore exécutoires dix-huit mois après leur prononcé et que 13,3 % des autres peines non ramenées à exécution ne l'ont pas été pour avoir bénéficié d'une grâce ou d'une amnistie. Ainsi peut-on rapporter à seulement 12,1 % le nombre de peines d'emprisonnement ferme prononcées en matière correctionnelle qui n'ont pas été ramenées à exécution dix-huit mois après leur prononcé, sans cause juridique apparente. En outre, la non-exécution de 12,1 % des peines ne signifie pas qu'aucun acte d'exécution n'ait été entrepris. Ainsi, pour 78 % d'entre elles, on constate au moins un et souvent plusieurs événements survenus depuis le prononcé : transmission de la fiche de condamnation au casier judiciaire national, inscription au fichier des personnes recherchées, saisine du juge de l'application des peines. C'est donc plus exactement 2,6 % des peines qui n'ont fait l'objet ni d'une exécution complète, ni d'un quelconque acte de mise à exécution, dix-huit mois après leur prononcé. Cette situation perfectible a été prise en compte et des actions ont été engagées pour réduire les délais et améliorer les taux d'exécution (les peines mais également pour doter les juridictions d'un véritable outil de pilotage concernant cette matière, en créant un dispositif statistique cohérent, permettant une lecture claire de l'action de la justice en ce domaine. Il est donc apparu nécessaire de procéder à une approche globale du processus de sanction depuis la décision de poursuite jusqu'à l'exécution, en rationalisant l'exécution des peines avec la création au sein de chaque tribunal de grande instance d'un bureau de l'exécution des peines (BEX). Cette nouvelle structure, véritable poste avancé de l'exécution des peines, qui a fait l'objet d'une expérimentation positive, est en cours de généralisation à l'ensemble des tribunaux. Le BEX doit prendre en compte plusieurs grands principes : assurer avec l'accord du condamné, l'exécution ou la mise à exécution de la ou des peines prononcées ; inciter le condamné à agir. Le BEX est de nature à créer une obligation de faire, ce qui se traduit par une rupture avec le passé, le condamné attendant auparavant d'être contacté (se rendre chez le juge de l'application des peines, payer l'amende, indemniser la victime...) au risque de perdre les avantages qui s'y attachent comme une personnalisation de l'exécution pour les peines privatives de liberté ou un paiement rapide de l'amende. Il convient donc d'informer les personnes jugées sur les peines prononcées, sur les voies de recours offertes, sur le paiement des dommages et intérêts ainsi que sur les frais de justice ; appliquer le principe de l'exécution immédiate de toutes les peines : peines d'emprisonnement avec ou sans sursis sous toutes les formes (mise à l'épreuve, sursis TIG, sursis simple pour laquelle une explication est fournie au condamné sur le sens de la décision), peines d'amendes, peines privatives ou restrictives du droit de conduire, d'immobilisation de véhicule, de confiscation, etc. ; accueillir et orienter les victimes. Il s'agit d'améliorer l'explication de la décision de justice et de décrire les perspectives et moyens qui leur sont offerts pour recouvrer les dommages et intérêts, user des voies de recours sur l'action civile, saisir éventuellement la commission d'indemnisation des victimes d'infractions, soit directement, soit en orientant les victimes vers les associations d'aide aux victimes. Pour permettre la mise en oeuvre de ces dispositions nouvelles, des moyens supplémentaires à hauteur de 29,5 millions d'euros, ont été prévus au budget 2006. Cette dotation a permis aux services judiciaires d'affecter à l'exécution des peines plus de trois cents fonctionnaires supplémentaires, notamment cent six greffiers et deux cent quinze fonctionnaires de catégorie C. En outre, quatre cents personnes ont été recrutées en qualité de vacataires pour permettre la résorption des retards constatés, notamment dans la frappe des jugements. La mise en oeuvre des dispositifs prévus par la loi Perben II portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a en effet généré un surcroît de prises en charge depuis janvier 2005 pour l'ensemble des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) du territoire national. Compte tenu des difficultés de fonctionnement des services pénitentiaires d'insertion et de probation, j'ai décidé de confier à l'inspection générale des services judiciaires une mission d'évaluation et de diagnostic de la situation actuelle des SPIP. Les conclusions de cette mission viennent d'être portées à ma connaissance. Elles permettront de dégager des axes d'amélioration pour le travail des SPIP. Conscient de l'augmentation des charges de travail dans les SPIP, le gouvernement a, depuis 2002, permis le recrutement de près de mille conseillers d'insertion de et probation, ce qui représente un accroissement d'un tiers des effectifs de travailleurs sociaux. En outre, en septembre 2006, plus de quatre-vingt-dix assistants de service social ont été, à la suite du concours organisé en début d'année, affectés dans les SPIP. Ils viennent s'ajouter aux cent quatre-vingt neuf conseillers d'insertion et de probation (CIP) sortis de l'École nationale d'administration pénitentiaire au même moment et aux soixante et onze chefs de service d'insertion et probation (CSIP) qui ont pris leurs fonctions en mai dernier. Quarante-deux assistants de service social vont prochainement être accueillis par voie de détachement à l'occasion de la commission administrative paritaire qui s'est tenue le 30 novembre dernier et les directions régionales des services pénitentiaires ont été autorisées à recruter des assistants de service social contractuels sur les sites dont la localisation est peu attractive et où les postes n'ont pas été couverts. De surcroît, cent adjoints administratifs supplémentaires auront rejoint les SPIP, d'ici la fin de l'année. Enfin, la modernisation du traitement informatique des procédures pénales des tribunaux de grande instance interviendra à partir de 2007 avec l'entrée en service d'une nouvelle application informatique, dite CASSIOPEE, qui sera généralisée, courant 2008, à l'ensemble des juridictions. Ce dispositif permettra notamment d'assurer un meilleur contrôle de l'exécution des peines.
Auteur : M. Jacques Remiller
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 9 août 2005
Réponse publiée le 6 février 2007