maladies professionnelles
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Quelque 366 000 salariés sont exposés à des produits pouvant entraîner des mutations ou avoir des effets toxiques sur leur descendance, tels le benzène ou les éthers de glycol, selon une étude du ministère de l'emploi (Dares) publiée début août 2005. Environ 186 000 personnes, soit 1 % du champ étudié par la Dares, sont exposées à des produits mutagènes, c'est-à-dire pouvant entraîner des mutations, selon cette enquête réalisée en 2003. Les produits les plus fréquents sont le chrome et ses dérivés, qui représentent 58 % des cas, et le benzène (25 % des cas). La moitié des expositions est ponctuelle et les trois quarts des salariés exposés subissent des intensités faibles ou très faibles. Selon la Dares, l'utilisation des produits « semble bien maîtrisée pour la moitié des salariés exposés » et les protections collectives et individuelles mises à disposition sont « plus fréquentes » que pour les produits cancérogènes. Les salariés ayant des fonctions de production ou de maintenance sont les plus exposés (2,7 % sont concernés), suivis des salariés exerçant des fonctions de recherche, étude, méthode et informatique. Les secteurs les plus utilisateurs de produits mutagènes sont la métallurgie et la transformation des métaux (5 % des salariés exposés), la chimie-caoutchouc-plastique (4 %) et l'industrie des équipements mécaniques (3 %). En outre, environ 1 % des salariés, soit près de 180 000 personnes, sont exposés à des produits reprotoxiques (c'est-à-dire toxiques pour la reproduction) et notamment au plomb et à ses dérivés (66 % des cas). Environ 60 % des expositions sont ponctuelles (moins de deux heures par semaine), mais 13 % d'entre elles dépassent 20 heures par semaine. Le risque « semble bien maîtrisé » dans 57 % des cas, mais « dans un cas sur trois » les salariés ne disposent d'aucune protection, souligne la Dares. Ce sont les fonctions de production et de maintenance qui sont les plus exposantes (2,5 %), suivies des activités de recherche (1,8 %). Près de la moitié (48 %) des salariés concernés travaillent dans l'industrie, 18 % dans les services aux entreprises et 15 % dans la construction. La grande majorité des salariés concernés sont des ouvriers (63 %) et des professions intermédiaires (30 %). Compte tenu de la teneur des conclusions de l'étude de la Dares plutôt inquiétante pour la santé des salariés, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement de lui indiquer les mesures urgentes qu'il entend prendre au sujet de ce dossier. - Question transmise à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Réponse publiée le 17 octobre 2006
L'attention du Gouvernement a été appelée sur le nombre de salariés exposés à des produits pouvant entraîner des mutations ou avoir des effets toxiques sur leur descendance ainsi que sur les mesures de prévention mises en place à cet égard. Le risque chimique et, en particulier, le risque présenté par des agents chimiques ayant des effets toxiques pour la reproduction et mutagènes, est un sujet majeur de préoccupation en matière de sécurité sanitaire. Le cadre juridique se fonde principalement sur deux décrets : le décret du 1er février 2001 fixant les règles applicables aux agents chimiques cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (art. R. 231-56 à R. 231-56-12 du code du travail) et le décret du 23 décembre 2003 fixant les règles relatives aux agents chimiques dangereux (art. R. 231-54 à R. 231-54-17 du code du travail). Ces deux réglementations visent à systématiser - sous la responsabilité de l'employeur - l'évaluation du risque chimique et la mise en place de mesures de prévention adaptées. La réglementation fixe un ordre de priorité selon lequel ces mesures de prévention doivent s'appliquer : en premier lieu, la substitution par des produits moins dangereux ou non dangereux, ensuite, la mise en place de système clos, et enfin, la mise en place de moyens de protection collective et d'équipements de protection individuelle. Par ailleurs, la réglementation renforcée relative aux agents cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction (CMR) et aux agents chimiques dangereux fondée, en premier lieu, sur l'obligation de substitution, prévoit d'assurer la traçabilité des expositions pour chaque salarié exposé, avec une fiche d'exposition, une attestation d'exposition et une surveillance médicale renforcée. Ces mesures sont essentielles pour garantir un suivi médical préventif efficace des travailleurs et faciliter, le cas échéant, la reconnaissance de leur droit à réparation. Grâce à cet ensemble de dispositions, l'arsenal juridique est complet et efficace sous réserve de rester vigilant quant à l'effectivité de son application. À cet égard, la responsabilité première revient aux entreprises, mais les services de l'inspection de travail ont également un rôle majeur à jouer dans le cadre de leurs missions de contrôle et d'information. Sur le terrain, l'enjeu principal est donc dans l'application correcte des dispositions existantes. Ainsi le plan national santé environnement (PNSE) et le plan santé au travail (PST 2005-2009) prévoient dans ce domaine des actions concrètes d'ores et déjà réalisées telles que le développement et la diffusion d'outils juridiques et méthodologiques d'aide au contrôle. Ainsi, en juin 2005, a été diffusé un guide méthodologique sous la forme de CD-ROM édité par l'institut national du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (INTEFP) à l'ensemble des services déconcentrés du ministère chargé du travail. En outre, une circulaire DRT (direction des relations du travail) du 24 mai 2006 relative aux règles de prévention du risque chimique et aux règles particulières à prendre contre les risques d'exposition aux agents CMR a été diffusée auprès de ces services déconcentrés. L'objectif de cette circulaire est de soutenir les services dans leurs missions d'information et de contrôle en leur donnant des outils pour expliquer la réglementation applicable aux employeurs et aboutir à une meilleure application de celle-ci ; 2. le développement des guides de bonnes pratiques (action 23 du PNSE) élaborés et diffusés par l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), comme par exemple la mise en ligne en 2005 sur son site Internet des dossiers sur le benzène et le plomb ; 3. le lancement en juin 2006 d'une campagne nationale de contrôle ciblée sur l'utilisation en entreprise d'agents CMR par la direction des relations du travail, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS direction des risques professionnels) et l'INRS. Cette campagne est centrée sur certaines substances : le trichloréthylène, les fibres céramiques réfractaires (FCR), les phtalates, les chromates, deux amines aromatiques et les dérivés du plomb. En conséquence, les secteurs d'activité identifiés comme étant utilisateurs de ces substances, c'est-à-dire la mécanique industrielle, la plasturgie et la fabrication de peintures et de vernis font partie des secteurs cibles de la campagne, ainsi que les secteurs dans lesquels des travailleurs sont susceptibles d'être exposés à des FCR. Compte tenu du nombre important d'agents chimiques entrant dans le champ d'application du décret CMR, de nouvelles opérations du même type pourront être conduites dans les années à venir. Cette campagne vise à contrôler le respect de la réglementation renforcée relative aux agents CMR ; 4. la promotion du principe de substitution des substances chimiques les plus dangereuses (action 4.9 du PST). Les actions engagées en 2006 sont, d'une part, l'élaboration d'une brochure de sensibilisation à destination des entreprises sur la substitution des agents chimiques par l'INRS et, d'autre part, la réalisation d'une étude par l'AFSSET (saisie le 13 juin 2006) sur la substitution des agents CMR (recensement des bonnes pratiques et élaboration d'outils pédagogiques d'aide à la substitution) qui devra s'échelonner jusqu'à la fin de l'année 2009, date d'échéance du PST ; 5. la fixation, par le décret n° 2006-103 du 9 février 2006, de valeurs limites d'exposition professionnelle contraignantes pour dix nouvelles substances, dont la N-diméthylacétamide qui est classée comme présentant un risque pendant la grossesse d'effets néfastes pour le développement de l'enfant. En outre, prochainement, vont être fixées des valeurs limites d'exposition professionnelle contraignantes pour une trentaine d'autres substances chimiques, dont les fibres céramiques réfractaires. De plus, le plan santé au travail prévoit d'autres mesures, qui auront un impact direct sur l'amélioration de la prévention des risques chimiques en milieu professionnel : l'intégration de la santé au travail au sein du dispositif public des agences de sécurité sanitaire, avec la création, par une ordonnance du 1er septembre 2005 complétée par un décret du 8 juin 2006, de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (AFSSET), qui constitue un outil essentiel d'expertise et d'évaluation des risques professionnels, notamment à l'égard des substances chimiques dangereuses ; l'inspection du travail, de compétence généraliste, sera soutenue pour l'accomplissement des ses missions, de plus en plus techniques, par des cellules régionales d'appui et de soutien scientifique et technique. Les inspecteurs et contrôleurs bénéficieront d'une formation renforcée. Les deux tiers des régions sont maintenant dotées de ces cellules de soutien et la formation renforcée en santé au travail est mise en place à la rentrée 2006.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Risques professionnels
Ministère interrogé : emploi, cohésion sociale et logement
Ministère répondant : emploi, travail et insertion professionnelle des jeunes
Dates :
Question publiée le 6 septembre 2005
Réponse publiée le 17 octobre 2006