contrats nouvelle embauche
Question de :
M. Patrick Roy
Nord (19e circonscription) - Socialiste
M. Patrick Roy souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement sur les ordonnances relatives à l'emploi prises en conseil des ministres le 2 août dernier. Si la situation de l'emploi appelle effectivement une réaction de la part des pouvoirs publics, on ne peut que déplorer le choix fait par le Gouvernement du recours à une procédure aussi brutale, faisant fi du dialogue social et du débat parlementaire. Sur le fond, la mise en place du contrat de travail « nouvelles embauches » est particulièrement regrettable. Ce dispositif institue en effet le libre arbitre total de l'employeur, sans aucune contrepartie en terme de protection du salarié. Il constitue donc une véritable régression par rapport aux acquis de notre droit du travail. Il s'oppose d'ailleurs à la convention de l'Organisation internationale du travail du 22 juin 1982, relative à la cessation de la relation de travail à l'initiative de l'employeur, dont l'article 7 consacre le droit pour l'employé de se défendre contre les allégations formulées contre lui par l'employeur et justifiant aux yeux de ce dernier la rupture unilatérale du contrat de travail. Par ailleurs, il convient également de déplorer l'aménagement des règles de décompte des effectifs des entreprises tendant à en exclure les plus jeunes salariés. Cette mesure risque de porter atteinte au crédit de la valeur travail chez les jeunes. Loin de favoriser l'embauche de ces catégories de personnel, cette mesure aura donc un effet contre-productif. Compte tenu de ces éléments, on peut donc légitimement mettre en doute la cohérence et la pertinence du dispositif mis en place par les différentes ordonnances gouvernementales. C'est pourquoi, devant le profond mécontentement des organisations syndicales, il lui demande de lui indiquer s'il entend renoncer à leur application. - Question transmise à M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes.
Réponse publiée le 1er août 2006
L'attention du Gouvernement a été attirée sur l'effet sur l'emploi des CNE et les contentieux. L'objectif poursuivi par le législateur en habilitant le Gouvernement à instituer par voie d'ordonnance le CNE était d'inciter les petites entreprises à recruter. Les petites entreprises sont particulièrement exposées aux fluctuations d'activité. De ce fait, elles hésitent à accroître leurs effectifs. Ceci est particulièrement regrettable car les entreprises de moins de 20 salariés représentent 2,5 millions d'employeurs, c'est-à-dire un vivier d'emploi important. Vivier d'autant plus important que 1,5 million de ces entreprises n'ont pas de salarié. Or, ce sont ces chefs d'entreprise qui hésitent à embaucher. Ils craignent en effet les incertitudes liées à l'évolution du marché et les difficultés juridiques et financières qu'entraînerait une rupture du contrat de travail. Le contrat nouvelle embauche (CNE) répond aux besoins des petites entreprises, celles-ci ayant effectivement embauché massivement en CNE. Les 440 000 intentions d'embauches recensées par les URSSAF entre août 2005 et mars 2006 en CNE se sont concrétisées. D'après une enquête réalisée par la DARES en collaboration avec l'ACOSS et publiée le 14 juin 2006, les responsables d'entreprise considèrent que le CNE a eu un impact substantiel sur leurs embauches d'octobre. 30 % d'entre elles n'auraient pas eu lieu sans ce nouveau contrat de travail. Dans 20 % des cas, les chefs d'entreprise auraient peut-être embauché plus tard sous un autre contrat de travail si les perspectives d'activité s'étaient confirmées ou s'ils avaient rencontré un profil plus adapté au poste offert. L'embauche n'aurait, en tout état de cause, jamais eu lieu dans 10 % des cas. Ce sont ainsi entre 44 000 et 132 000 emplois supplémentaires qui ont vu le jour depuis le mois d'août 2005, sans aucun coût pour les finances publiques. En outre, le CNE assure une vraie stabilité dans l'emploi puisque les ruptures à l'initiative de l'employeur sont peu nombreuses (11,4 %). Si le CNE est un contrat de travail dont les modalités de rupture sont adaptées pendant une période de consolidation, ce contrat n'est pas zone de non-droit permettant les licenciements abusifs pour des motifs arbitraires. Les premiers jugements des conseils des prud'hommes en sont la preuve. Des montages divers de renouvellement des contrats aux seules fins d'échapper aux exigences du code du travail ont été sanctionnés au titre de l'abus de droit (jugement du Conseil des prud'hommes de Longjumeau du 20 février 2006). De même, les dispositions dérogeant à l'exigence de motivation du licenciement et d'une cause réelle et sérieuse ne sont pas une invitation à l'arbitraire, puisque les garanties essentielles de notre ordre public social s'imposent.
Auteur : M. Patrick Roy
Type de question : Question écrite
Rubrique : Emploi
Ministère interrogé : emploi, cohésion sociale et logement
Ministère répondant : emploi, travail et insertion professionnelle des jeunes
Dates :
Question publiée le 4 octobre 2005
Réponse publiée le 1er août 2006