droits d'auteur
Question de :
Mme Martine Billard
Paris (1re circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe
Mme Martine Billard attire l'attention de M. le ministre de la culture et de la communication sur la question de la cession globale des droits d'auteur des journalistes. Dans la perspective de la transposition de la directive européenne sur le droit d'auteur en droit français, mission a été confiée au conseiller d'Etat Raphaël Hadas-Lebel de rédiger une note de synthèse sur la cession des droits des auteurs salariés aux entreprises qui les emploient. Elle s'étonne qu'il ait défini un délai très bref (un mois) pour ce faire, alors qu'une telle démarche revient sur le fond à dénoncer la Convention internationale de Berne relative aux droits d'auteur (dont la France est non seulement signataire mais surtout initiatrice) au profit du droit anglo-saxon du copyright. Les éditeurs français semblent considérer la chose déjà acquise, d'où résultent des contestations et recours légaux dont la multiplication sert de prétexte à une tentative de modification du cadre légal actuel. La démarche entreprise revient, de fait, à modifier la loi pour satisfaire ceux qui la transgressent. Elle rappelle que la reconnaissance actuelle en France du droit d'auteur, en instaurant un équilibre entre éditeurs et journalistes, a donné naissance à un système assurant la juste rémunération des créations intellectuelles. Ce statut a contribué à la réputation du photojournalisme français, l'élévation de la France au premier rang des éditeurs mondiaux de magazines et l'extrême richesse artistique qui contribuent au rayonnement de la France. La légalisation de la cession globale des droits d'auteur conduirait immanquablement à la négation du droit moral individuel inaliénable de chaque journaliste sur ses écrits, sur ses photos, sur ses dessins de presse et sur ses reportages audiovisuels (radio et télévision), principale garantie permettant aux auteurs de conserver un droit de regard sur leurs oeuvres, empêchant une utilisation abusive par détournement de l'objectif initial, en particulier publicitaire, par dénaturation du propos ou encore par publication contraire à la déontologie professionnelle ou individuelle. La clause de conscience, liée à la liberté de publier sur le support de son choix, ne pourrait plus s'appliquer. Aussi elle lui demande s'il compte dissiper les soupçons quant à ses intentions en matière de politique des droits d'auteur et d'intervenir pour sauvegarder le statut de protection de la liberté intellectuelle et de la sécurité financière et sociale des journalistes français, adopté en 1935 et réaffirmé par la loi Cressard du 4 juillet 1974.
Réponse publiée le 5 mai 2003
La directive européenne du 22 mai 2001 relative à l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information ne contient aucune disposition sur le statut de l'auteur salarié de droit privé. Dans le prolongement des travaux menés il y a plusieurs mois au sein du Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique, une mission de concertation et de proposition a été confiée en octobre 2002 à M. Hadas-Lebel, conseiller d'Etat, en vue de rechercher les solutions qui pourraient être apportées aux difficultés liées à la mise en oeuvre des droits de propriété littéraire et artistique des créateurs placés en lien de subordination avec un employeur. Les conclusions de ce rapport, qui viennent d'être rendues publiques, relèvent les divergences de position des organisations représentatives des employeurs et des salariés qui ne permettent pas d'envisager une éventuelle modification législative. La mission confiée à M. Hadas-Lebel a permis de réaliser de réelles avancées et de faire apparaître des points d'entente. Les services du ministère de la culture et de la communication poursuivront la concertation en approfondissant l'expertise des différents secteurs professionnels concernés, de leur environnement économique et des pratiques contractuelles individuelles et collectives. Une solution consensuelle sera recherchée sur la base de cette expertise complémentaire dans le courant de cette année. D'une manière générale, les réflexions entreprises à l'initiative du ministère de la culture et de la communication ne concernent que les droits patrimoniaux des auteurs salariés de droit privé et ne visent en aucune façon la titularité et l'exercice des droits moraux. Par ailleurs, la spécificité du statut des journalistes, qui s'inscrit dans le cadre plus général de la liberté de la presse, n'est pas davantage affectée par les réflexions engagées. Aucune mesure ne saurait être envisagée visant à priver les auteurs salariés du droit de s'opposer à une exploitation de leurs oeuvres pour une destination qu'ils jugeraient contraire à leurs convictions.
Auteur : Mme Martine Billard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Propriété intellectuelle
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Dates :
Question publiée le 2 décembre 2002
Réponse publiée le 5 mai 2003