réforme
Question de :
M. Philippe Tourtelier
Ille-et-Vilaine (2e circonscription) - Socialiste
Alerté en particulier par les délégués de la chambre régionale de l'économie sociale (CRES) de Bretagne, M. Philippe Tourtelier appelle l'attention de M. le Premier ministre sur le devenir de la délégation interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie sociale (DIISES). Ces responsables sont inquiets depuis la décision du Gouvernement de changer la DIISES en « délégation interministérielle à l'innovation et à l'expérimentation sociale », création qui participe de l'élimination de l'économie sociale du champ de l'action publique. Est-ce le but recherché ? Au-delà du changement de sigle, cette décision, prise sans concertation avec le secteur concerné, représenté par le Conseil des entreprises, employeurs et groupements de l'économie sociale (CEGES) et le Conseil national des chambres régionales supprime une référence directe et lisible, au niveau de l'État. Elle nie le rôle primordial joué par les mutuelles, coopératives, associations et fondations, tant dans les domaines de l'innovation sociale, de l'expérimentation et de la lutte contre l'exclusion, que dans celui de la création d'emplois, de richesses, et donc facteur de développement économique et de solidarité. Cela remet également en question le travail réalisé sans discontinuité depuis 1981, entre les pouvoirs publics et l'économie sociale. L'ajout, en 1991, de la mission « innovation sociale » à la délégation a reconnu le rôle de l'économie sociale comme acteur essentiel de l'innovation sociale et a permis de le renforcer. En France, comme d'ailleurs en Europe, l'économie sociale et solidaire représente ainsi environ 8 % du nombre total d'entreprises et 10 % des emplois. Sa décision ignore donc 780 000 entreprises et groupements de l'économie sociale, présents dans la totalité des secteurs économiques et sur tous les territoires, employant près de 2 millions de personnes. Il lui rappelle que ces entités, de toutes tailles, sont présentes tant dans l'économie marchande que non marchande. Il ajoute que de nombreuses activités émergentes, innovantes et à forte valeur sociale ajoutée, n'ont pu voir le jour qu'en prenant appui sur les grandes entreprises du secteur (mutualité - coopération - banques coopératives) pour assurer leur développement, voire leur solvabilité. Depuis vingt-quatre ans, et sans aucune interruption quels que soient les gouvernements en place, la DIISES a constitué une interface appréciée des composantes de l'économie sociale et solidaire. C'est particulièrement vrai en Bretagne, où elle est un acteur incontournable dans le domaine sanitaire et social pour la cohésion sociale et l'innovation, le développement territorial et le développement durable. Dans cette région, l'économie sociale représente 14 % de l'emploi privé. Aussi, il s'interroge sur les motifs de cette transformation au moment où l'économie sociale et solidaire est totalement reconnue par les conseils régionaux et les conseils généraux. Tout en constatant ce paradoxe : baisse des moyens dévolus aux associations et structures qui tissent et enrichissent le lien social dans les domaines de la santé, de l'éducation populaire, des services de proximité, de la culture, du sport... et sollicitations répétées des pouvoirs publics à leur égard, il s'étonne de cette négation de l'économie sociale. Cette démarche est difficilement compréhensible au moment où les actions engagées par les acteurs de l'économie sociale sont espérées et appelées dans le cadre de la politique pour l'emploi (par exemple, développement des services à la personne), des politiques de développement territorial (exemple : reprise de PME ou de très petites entreprises sous le statut coopératif). Faut-il considérer cette démarche comme une mise à l'écart du concept « d'entreprendre autrement », réalité économique qui est pourtant la seule aujourd'hui à se développer en faisant le lien entre économique et social ? Pour sa part, il considère que l'économie sociale et solidaire est fondamentale d'une certaine manière de comprendre et de faire de l'économie en la plaçant au service de l'homme et qu'elle constitue un modèle socio-économique d'avenir, garant d'un développement durable de nos territoires et de notre planète. En conséquence, il lui demande de reconsidérer sa décision, de rencontrer et d'écouter les instances représentatives de ce secteur, de garantir à la DIISES l'ensemble de ses prérogatives et, si une délégation dédiée à la lutte contre l'exclusion sociale était créée, qu'elle soit un outil complémentaire aux dispositifs existants.
Réponse publiée le 29 novembre 2005
L'honorable parlementaire appelle l'attention du Premier ministre sur la réforme de la délégation interministérielle à l'innovation sociale et l'économie sociale (DIISES), annoncée le 16 septembre devant le Conseil national de lutte contre l'exclusion. Désireux de soutenir activement le secteur de l'économie sociale, le Gouvernement a donné des instructions afin que cette nouvelle délégation poursuive et développe les actions engagées. Le Conseil des entreprises, employeurs et groupements de l'économie sociale sera prochainement sollicité afin qu'il fasse part de ses propositions quant au fonctionnement, à l'intitulé et aux missions de cette délégation interministérielle, rattachée au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, conformément aux attentes des partenaires de l'économie sociale. Prenant en considération l'implication des entreprises, des mutuelles, des coopératives et des associations qui emploient près de 1,8 million de salariés, et leur action déterminante dans la « bataille pour l'emploi », le Gouvernement a souhaité la réunion prochaine du conseil consultatif de l'économie sociale.
Auteur : M. Philippe Tourtelier
Type de question : Question écrite
Rubrique : Économie sociale
Ministère interrogé : Premier ministre
Ministère répondant : Premier ministre
Dates :
Question publiée le 25 octobre 2005
Réponse publiée le 29 novembre 2005