Question écrite n° 76750 :
politiques communautaires

12e Législature

Question de : M. Thierry Mariani
Vaucluse (4e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Thierry Mariani appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la reconnaissance d'une compétence pénale de la Commission européenne formulée dans les attendus n°s 47 et 48 de l'arrêt du 13 septembre de la Cour de justice des Communautés européennes (C 176/03). Dans cet arrêt, la Cour admet qu'« en principe, la législation pénale tout comme les règles de procédures pénales ne relèvent pas de la compétence de la Communauté », mais elle autorise cependant « le législateur communautaire [...] à prendre des mesures en relation avec le droit pénal des États membres pour garantir la pleine effectivité des normes qu'il édicte ». Il souhaite tout d'abord savoir si de telles considérations ne créent pas un précédent notable, susceptible d'étendre la communautarisation jurisprudentielle du droit pénal à l'infini. Ensuite, s'il s'avère que cette analyse de la jurisprudence communautaire est exacte, il le prie de bien vouloir lui indiquer quelles dispositions il entend prendre pour garantir la souveraineté des Parlements nationaux en matière pénale.

Réponse publiée le 4 avril 2006

Le garde des sceaux, ministre de la justice, partage les préoccupations de l'honorable parlementaire quant à la portée de l'arrêt du 13 septembre 2005 de la Cour de justice, des Communautés européennes par lequel a été annulée la décision-cadre du 27 janvier 2003 relative à la protection de l'environnement par le droit pénal. Si la Cour reconnaît, sans contestation possible, une compétence du législateur communautaire pour « prendre des mesures en relation avec le droit pénal des États membres » lorsque celles-ci sont nécessaires pour garantir la pleine effectivité des normes communautaires, elle n'en rappelle pas moins que, « en principe, la législation pénale tout comme les règles de procédure pénale, ne relèvent pas de la compétence de la Communauté ». Elle souligne également l'importance du domaine particulier que constitue la protection de l'environnement, en tant qu'objectif « essentiel, transversal et fondamental » de la Communauté, pour justifier la compétence du législateur communautaire. Dès lors, il apparaît bien que la compétence reconnue à la Communauté pour édicter des normes relevant du droit pénal ne saurait être regardée comme globale. Il convient donc, à ce stade, d'être circonspect quant à la réelle portée de l'arrêt, et attentif à l'appréciation des conséquences qui pourraient en être tirées, tant au regard des instruments juridiques déjà adoptés qu'en ce qui concerne les travaux futurs du Conseil. Sur ce point, l'arrêt du 13 septembre n'autorise pas, en l'état, la définition d'un domaine bien circonscrit, et une fois pour toutes, de compétence pénale pour la Communauté, les situations devant être appréciées au cas par cas, dans le respect des compétences dévolues au troisième pilier et aux États. En outre, il est indispensable que le Conseil « justice et affaires intérieures », quelle que soit la base juridique retenue, conserve une compétence générale pour l'élaboration des instruments visant généralement au rapprochement des normes de droit pénal. À cet égard, le comité des représentants permanents du Conseil de l'Union européenne a adopté en février 2006 un document définissant une méthode de travail pour l'orientation des projets d'instruments du premier pilier qui comportent des dispositions affectant la matière pénale. Ce document prévoit notamment que, pour le choix de la formation du Conseil chargé de la négociation et de l'adoption des projets, la présidence saisira systématiquement le comité des représentants permanents du Conseil de l'Union européenne, pour avis, et que la filière « justice et affaires intérieures » sera informée des projets comportant de telles dispositions en se voyant offrir la possibilité d'émettre des avis. Cette position, soutenue par la France dès le Conseil « justice et affaires intérieures » de Vienne, le 13 janvier 2005, a été très largement partagée.

Données clés

Auteur : M. Thierry Mariani

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 1er novembre 2005
Réponse publiée le 4 avril 2006

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