Question écrite n° 76878 :
débits de tabac

12e Législature

Question de : M. Patrick Roy
Nord (19e circonscription) - Socialiste

M. Patrick Roy appelle l'attention de M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et des professions libérales sur la vive inquiétude exprimée par les débitants de tabac devant le développement de la contrebande et des ventes transfrontalières. La profession rappelle que sa revendication prioritaire tient à l'intervention effective des pouvoirs publics afin d'enrayer ces deux fléaux mettant en danger de nombreux buralistes. Dans un contexte de profonde mutation de la profession et à l'heure où sont envisagées de nouvelles mesures visant à protéger la santé publique, les débitants de tabac attendent du Gouvernement qu'il agisse en concertation avec ses partenaires européens, afin de concilier, d'une part, respect des engagements communautaires et de la liberté de circulation des marchandises et, d'autre part, pérennisation de l'activité des débitants de tabac dans les départements frontaliers. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer ses intentions en la matière et de lui préciser les suites données par la Commission européenne et le Conseil de l'Union européenne aux différentes initiatives prises par le gouvernement français sur ce plan, et énumérées dans la réponse à la question écrite n° 64732, posée le 10 mai 2005 à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie par M. Patrick Roy. - Question transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Réponse publiée le 27 décembre 2005

Le développement des achats transfrontaliers est le résultat des disparités de prix des cigarettes au sein de l'Union européenne. Par exemple, un paquet de Marlboro coûte beaucoup moins cher en Espagne qu'en France (2,90 euros contre 5 euros). Au Luxembourg, ce même paquet vaut 3,10 euros. Il faut souligner que les écarts de prix au sein de l'Union européenne s'expliquent d'abord par les politiques tarifaires des fabricants et, de façon plus accessoire, par les écarts entre les taux de fiscalité. A titre d'illustration, les droits d'accises en France représentent 64 % du prix de vente au détail des tabacs et 63 % au Royaume-Uni, mais le paquet de Marlboro coûte 5 euros en France contre 6,97 euros au Royaume-Uni. Les ventes transfrontalières ne peuvent pas être considérées comme de la contrebande. En vertu des règles communautaires, elles sont légales dès lors que les tabacs sont acquis par les particuliers pour leurs besoins propres et transportés par eux-mêmes. Si ces conditions sont réunies, un particulier peut acheter du tabac manufacturé dans l'Union européenne et le transporter ensuite sans document d'accompagnement. Il appartient aux agents des douanes de prouver, lors de leur contrôle, la nature commerciale de la détention. Pour établir la détention à des fins supposées marchandes de tabacs manufacturés, la réglementation communautaire a défini une liste de critères à caractère indicatif parmi lesquels figure la quantité de produit détenu (800 cigarettes, 400 cigarillos, 200 cigares ou 1 kg de tabac à fumer). Cependant, le seul fait pour un particulier, de détenir des quantités supérieures à celles précédemment citées ne suffit pas à déterminer une détention à des fins non personnelles. Dans ces conditions, il est difficile pour les services de contrôle de prouver la nature commerciale de la détention. Toute politique restrictive concernant la circulation des produits soumis à accises serait contraire au droit communautaire et la Commission européenne se montre vigilante sur le respect de la liberté de circulation. Pour ce motif, toutes les actions menées jusqu'à présent par la France n'ont pu aboutir. Les débitants de tabac souhaitent cependant voir adopter une disposition législative limitant la quantité de tabac pouvant être achetée par les particuliers à l'étranger. La France ne peut pas unilatéralement limiter les achats transfrontaliers et fixer arbitrairement des quantités strictes au-delà desquelles les achats de tabac seraient interdits. Le Gouvernement français s'emploie au niveau du Conseil et du Parlement européen à faire évoluer les mentalités sur ce sujet, en soulignant, notamment, la contradiction entre la signature de la convention cadre de l'Organisation mondiale de la santé sur la lutte contre le tabagisme et la libre circulation des produits du tabac entre États membres, pour les particuliers. Lorsque les 25 États membres de l'Union européenne auront ratifié cette convention cadre, la Commission européenne devra alors tenir compte des spécificités des produits du tabac pour' encadrer les règles de circulation relatives à ces produits. Les considérations de santé publique commencent à se diffuser au sein de l'Union européenne avec l'instauration d'un prix seuil en Irlande, en Belgique et en Italie. Par ailleurs, le Gouvernement a fixé à la douane des objectifs précis concernant la lutte contre la fraude relative au tabac. En ce qui concerne la contrebande de cigarettes, le nombre d'infractions relevées par la douane doit atteindre à la fin de l'année le seuil de 10 000. A la fin du mois d'août 2005, 6322 constatations ont été réalisées. Elles ont conduit à l'interception de 150,7 tonnes de cigarettes, soit une augmentation de plus de 15 % des quantités saisies par rapport à la même période de l'année 2004. Au-delà de la progression des saisies en quantités, la douane a multiplié les interventions sur les lieux publics, seule ou dans le cadre des groupes d'intervention et de recherche, pour lutter contre les ventes à la sauvette. Cette action sera poursuivie et amplifiée. Par ailleurs, dans le cadre du contrat d'avenir des balistes signé le 1er décembre 2003 entre les ministres chargés du budget et des petites et moyennes entreprises et la confédération des débitants de tabac, des mesures financières (remise additionnelle, remise compensatoire, aide à la cessation d'activité) en faveur des débitants de tabac ont été mises en place. Ces dispositions ont pour effet principalement d'aider les buralistes frontaliers ayant des pertes de revenus suite à l'augmentation des prix du tabac. En 2004, 29 % des débitants frontaliers ont perdu plus de 25 % de chiffre d'affaires. Sur les 45 M de remise compensatoire versés pour cette même année, 30 MEUR ont été attribués à 5 549 débitants frontaliers. Pour ce qui relève de la remise additionnelle, 27 M sur les 103 M versés ont été accordés aux débitants frontaliers. Avec les aides, le revenu « tabac » des débitants frontaliers a augmenté de 10,5% en 2004 par rapport à 2002 et celui des débitants non frontaliers de 21,7 %. En 2005, la direction générale des douanes et droits indirects a réduit d'un mois le délai de paiement des remises compensatoire et additionnelle. Ainsi, les débitants perçoivent les aides au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au lieu du deuxième mois, comme cela était prévu dans le contrat d'avenir. De plus, une démarche expérimentale a été lancée en faveur des débitants frontaliers et assimilés. Il s'agit d'une aide à la cessation d'activité prévue initialement pour 80 débitants. En 2004, cette aide a été versée à 120 débitants frontaliers pour un montant de 9 M. Le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement a relevé ce contingent pour le porter à 140 aides en 2005 et à 160 aides en 2006. A compter du 1er janvier 2006, le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, a décidé de mensualiser les remises compensatoire et additionnelle, ce qui devrait permettre d'améliorer la trésorerie des débitants frontaliers, et d'assimiler trois nouveaux départements aux départements frontaliers : le Gers, l'Hérault et la Gironde.

Données clés

Auteur : M. Patrick Roy

Type de question : Question écrite

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : PME, commerce, artisanat et professions libérales

Ministère répondant : économie

Dates :
Question publiée le 1er novembre 2005
Réponse publiée le 27 décembre 2005

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