code pénal
Question de :
M. Jean-Pierre Abelin
Vienne (4e circonscription) - Union pour la Démocratie Française
M. Jean-Pierre Abelin appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'application de l'article L. 122-1 du code pénal selon lequel une personne atteinte, au moment des faits d'un trouble psychique ayant aboli le contrôle de ses actes, est considérée comme irresponsable pénalement. Dans de trop nombreuses affaires, le coupable bénéficie d'un non-lieu et est interné dans un établissement spécialisé, laissant les familles de victimes dans le plus total désarroi car elles sont généralement privées du procès et de ses vertus. Au-delà même de l'articulation des dispositions du code pénal, il faudrait peut-être engager une large réflexion en concertation avec l'ensemble des intéressés sur les rôles respectifs de la médecine et de la justice pour mieux articuler logique pénale et logique de soins. C'est pourquoi il lui demande les mesures qu'il compte prendre sur cette question afin de trouver les modalités adéquates de prise en charge de la dangerosité d'individus qui se situent à la frontière de la pathologie et de la criminalité, tout en donnant enfin aux victimes et à leur famille comme au juge les moyens de cerner les circonstances du drame vécu.
Réponse publiée le 28 avril 2003 (Erratum publié le 26 mai 2003)
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait avant tout connaître à l'honorable parlementaire qu'il est particulièrement sensible à la prise en compte des intérêts des victimes lorsqu'est envisagé, à l'issue d'une information judiciaire, un non-lieu justifié par le trouble mental de l'auteur des faits, jugé pénalement irresponsable en application des dispositions de l'article 122-1 du code pénal. Il est dans ce cadre particulièrement attaché à la bonne articulation entre les missions des services judiciaires et celles des services médicaux quant à la prise en charge de ces auteurs de crimes. Or, il lui apparaît que la construction juridique aujourd'hui mise en place pour appréhender ces situations est satisfaisante. En premier lieu, quant à l'information des victimes, l'article 167-1 du code de procédure pénale prévoit que la notification des conclusions d'une expertise tendant au prononcé d'un non-lieu pour trouble mental doit être effectuée « dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article 167 », ce qui signifie que le juge d'instruction doit convoquer les parties civiles et leur avocat pour les aviser oralement des conclusions de l'expertise et qu'il ne peut se contenter de leur adresser ces conclusions par lettre recommandée. Bien évidemment, cette notification orale, qui peut se faire en présence de l'expert, ne dispense pas le juge de remettre aux parties une copie intégrale du rapport, comme l'exige le premier alinéa de l'article 167. Elle permet, en revanche, au juge d'instruction d'expliquer de façon appropriée le sens de l'expertise aux victimes, et de recevoir leurs déclarations. Par ailleurs, l'article 167-1 prévoit que si les parties civiles demandent une contre-expertise, celle-ci est de droit, et ne peut donc être refusée par le juge. En second lieu, en cas d'appel de l'ordonnance de non-lieu, l'article 199-1 du code de procédure pénale prévoit que, lorsque la partie civile le demande, la personne mise en examen doit personnellement comparaître, si son état le permet, devant la chambre de l'instruction, et les débats doivent avoir lieu en séance publique. Ces dispositions permettent ainsi à la victime de faire valoir ses observations tant devant le juge d'instruction que devant la chambre de l'instruction. Enfin, la loi du 9 septembre 2002 a inséré dans la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique un article 9-2 instaurant la gratuité de l'accès à la justice pour les victimes de certains crimes. Ainsi, cette nouvelle disposition prévoit que la condition de ressources n'est pas exigée des victimes de crimes d'atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne prévus et réprimés par les articles 221-1 à 221-5, 222-1 à 222-6, 222-8, 222-10, 222-14 (1° et 2°), 222-23 à 222-26, 421-1 (1°) et 421-3 (l° à 4° ) du code pénal, ainsi que de leurs ayants droit pour bénéficier de l'aide juridictionnelle en vue d'exercer l'action civile en réparation des dommages résultant des atteintes à la personne. Il en résulte que les membres de la famille d'une victime de l'une de ces infractions voient d'une part les frais d'avocat pris en charge par l'Etat lorsqu'ils se constituent partie civile, et d'autre part n'ont pas à verser de consignation lorsqu'ils déposent plainte avec constitution de partie civile. Par ailleurs, quant à la prise en charge de l'auteur des faits, en cas de non-lieu, relaxe ou acquittement, les articles L. 3213-7 et L. 3213-8 du code de la santé publique font obligation aux autorités judiciaires, qui estiment que la personne déclarée irresponsable pourrait compromettre l'ordre public ou la sûreté des personnes, d'aviser d'une part le préfet, qui prend sans délai toute mesure utile, ainsi que d'autre part la commission départementale des hospitalisations psychiatriques. Le préfet, au vu d'un certificat médical circonstancié, prononce une hospitalisation d'office. Il ne peut ensuite être mis fin aux hospitalisations d'office prononcées dans ce cadre que sur décisions conformes de deux psychiatres, n'appartenant pas à l'établissement et choisis par le préfet sur une liste établie par le procureur de la République après avis de la direction départementale de l'action sanitaire et sociale. Ces deux décisions d'experts doivent résulter de deux examens séparés et concordants et doivent établir que l'intéressé n'est plus dangereux ni pour lui-même ni pour autrui.
Auteur : M. Jean-Pierre Abelin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 2 décembre 2002
Réponse publiée le 28 avril 2003
Erratum de la réponse publié le 26 mai 2003