Question écrite n° 79372 :
Éthiopie

12e Législature

Question de : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste

Les États-Unis d'Amérique et l'Union européenne ont dernièrement invité le Gouvernement et l'opposition en Éthiopie à mettre un terme aux violences politiques meurtrières à Addis-Abeba. Ils « demandent instamment à tous les partis politiques de cesser toute violence et de se conformer à l'État de droit » dans un communiqué conjoint publié après cinq journées de violences en Éthiopie, au cours desquelles au moins quarante-six personnes ont été tuées. L'Union européenne et les États-Unis d'Amérique préconisent vivement l'ouverture d'un dialogue politique pour favoriser la paix. Mais cet appel a été rejeté par les autorités éthiopiennes par communiqué interposé, précisant que cette déclaration commune était inacceptable « puisque eux-mêmes n'autorisent pas les partis prônant la violence comme un moyen d'accéder au pouvoir à exister dans leurs propres pays », et précisant par la même occasion « qu'il est grand temps qu'ils cessent de s'ingérer dans les affaires intérieures éthiopiennes et qu'ils s'occupent de leurs affaires ». Compte tenu de la vive réaction des autorités d'Addis-Abeba, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande désormais à M. le ministre des affaires étrangères de lui indiquer les intentions du Gouvernement au sujet de ce dossier.

Réponse publiée le 14 mars 2006

La situation politique toujours très tendue en Éthiopie est un motif de réelle préoccupation pour notre pays. Les élections du 15 mai dernier, marquées par une forte progression de l'opposition, avaient dans un premier temps fait naître l'espoir d'un renforcement de la démocratie dans ce pays, sorti d'une terrible dictature il y a moins de quinze ans. Le gouvernement éthiopien avait en effet permis à l'opposition de faire campagne librement. Il avait invité des observateurs internationaux, en particulier de l'Union européenne, à se déployer pour suivre le processus électoral. Lors du scrutin du 15 mai, la population éthiopienne a voté massivement, dans le calme et la dignité. Il faut lui en rendre hommage. Cependant, les graves irrégularités commises lors du décompte des voix et rapportées par les observateurs de l'Union européenne ont entraîné une contestation de l'opposition, qui a mené à des troubles sanglants entre forces de l'ordre et manifestants le 9 juin 2005 à Addis-Abeba. Un dialogue entre le Gouvernement et l'opposition, facilité notamment par l'Union européenne et auquel la France a été étroitement associée, a alors permis la conclusion d'un accord mettant en place un processus d'examen des plaintes sur le processus électoral. Lors d'un entretien avec le ministre des affaires étrangères éthiopien, M. Seyoum Mesfin, le 14 juin 2005, M. Douste-Blazy a soutenu ces efforts de dialogue et appelé fermement le gouvernement éthiopien à la plus grande retenue. L'impartialité du processus d'examen des plaintes a toutefois été remise en cause par l'opposition qui a refusé de reconnaître les résultats définitifs donnant la victoire à la coalition au pouvoir du Front démocratique et révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF). Avec ses partenaires internationaux, la France a oeuvré pour favoriser la reprise du dialogue entre le Gouvernement et l'opposition. Alors que le Front éthiopien des forces démocratiques unies (UEDF), la plus petite coalition d'opposition, décidait de siéger au Parlement, la Coalition pour l'unité et la démocratie (CUD), la plus importante formation d'opposition, campait sur sa position de refus. Les manifestations de rue à Addis-Abeba, organisées début novembre par la CUD pour contester le résultat des élections, ont été durement réprimées par la police éthiopienne, faisant au moins 82 morts et 15 000 arrestations. Face à ces troubles, qui ont profondément terni la réputation de l'Éthiopie sur la scène internationale, la France, en liaison avec ses partenaires de l'Union européenne, n'est pas restée inactive. Dès le 6 novembre, les chefs de mission de l'Union européenne et des États-Unis en Éthiopie ont adopté une déclaration commune condamnant les violences survenues dans le pays et exigeant du gouvernement éthiopien différents engagements : appel au calme, libération des détenus politiques, respect des droits des prisonniers, enquête indépendante sur les violences, révision des règles de fonctionnement du Parlement. En signe de réprobation, plusieurs donateurs ont décidé de geler leur aide budgétaire à destination de l'Éthiopie et d'allouer les fonds disponibles à d'autres projets bénéficiant directement à la population éthiopienne. Ne fournissant aucune aide de nature budgétaire à destination de l'Éthiopie, la France n'a pas eu à prendre une telle décision. Aujourd'hui, la France, qui préside depuis début janvier 2006 le groupe des pays donateurs à Addis-Abeba, s'efforce de favoriser le dialogue entre le Gouvernement et l'opposition. Ce dialogue a d'ores et déjà conduit la majorité des députés de la CUD à occuper leurs sièges au Parlement. La plupart des prisonniers ont été libérés mais plus d'une centaine de personnes - des opposants, des journalistes et des membres de la société civile - sont toujours emprisonnées et en cours de jugement à Addis-Abeba. La France demande au gouvernement éthiopien que leur procès, auquel assistent des représentants de l'ambassade de France, se déroule dans les meilleurs délais et de façon impartiale. L'Union européenne doit, en outre, prochainement nommer un observateur chargé de veiller au bon respect de la procédure. Les autorités françaises appellent, par ailleurs, la commission chargée d'enquêter sur les violences postélectorales à accomplir son travail de façon objective et impartiale. La France continuera, en partenariat avec les autres pays donateurs, à veiller avec attention à l'évolution de la situation politique en Éthiopie.

Données clés

Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 29 novembre 2005
Réponse publiée le 14 mars 2006

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