élèves
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Avant de théoriser la discrimination positive, le constat de la discrimination « négative » s'impose. Il a été récemment posé par les sociologues Georges Felouzis, Françoise Liot et Joëlle Perroton dans leur ouvrage au titre provocateur, L'Apartheid scolaire, qui tente de décrypter les stratégies de choix des parents lors de l'inscription de leur(s) enfant(s) dans une école. Dans quel collège l'inscrire ? Celui du secteur, qu'on dit mal famé et de niveau médiocre ? Celui d'un quartier chic voisin, pour lequel il faudra obtenir une dérogation ? En travaillant sur les prénoms de 144 000 élèves de 333 établissements publics et privés de l'académie de Bordeaux, une méthode très critiquée mais qui est la seule permettant de contourner le refus républicain de comptabiliser les élèves selon leurs origines, les trois sociologues ont établi que 10 % des collèges concentrent 40 % des élèves issus de l'immigration. Cela prouverait donc sans conteste que, en France « tout le monde est pour la mixité sociale. Mais pour les autres... ». Compte tenu des résultats avancés par lesdits sociologues dans leur ouvrage, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande désormais à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de lui indiquer sa position les concernant, et ses intentions concernant le dossier de la mixité sociale à l'école.
Réponse publiée le 21 mars 2006
La question de la mixité sociale relève d'une politique globale et cohérente, notamment en matière d'emploi et de logement. Quant à « l'évitement scolaire », il est avant tout le fait de « stratégies » parentales. C'est donc, notamment, en modifiant les comportements parentaux que l'on peut agir en direction d'une plus grande mixité sociale, en rendant plus attractifs des établissements qui le sont moins. C'est le sens des décisions présentées le 8 février 2006, qui visent à donner une réalité au principe de l'égalité des chances. Ainsi, 249 établissements labellisés collèges « ambition réussite » formeront, avec les écoles primaires de leur secteur, des « réseaux de réussite ». Des moyens humains supplémentaires considérables seront affectés sur ces collèges (1 000 enseignants expérimentés affectés dès la rentrée 2006 et recrutés sur des « postes à profil », 3 000 assistants pédagogiques, 100 000 étudiants des grandes écoles et des universités engagés dans l'accompagnement de 100 000 élèves de collège ou de lycée de l'éducation prioritaire, au moins une infirmière scolaire par établissement...). Au-delà des moyens, il faut fixer de vrais objectifs à ces établissements, insuffler un nouvel esprit qui valorise l'effort, le travail et apporte aux élèves une véritable estime de soi. Pour cela, il s'agit de développer chez les élèves le sentiment d'appartenance et le sentiment de fierté, en donnant à chaque collège une dimension d'excellence. Chaque collège sera reconnu par une spécialité de haut niveau d'ordre culturel, scientifique, linguistique, sportif ou environnemental. À cette fin seront mobilisés des parrainages d'institutions culturelles, de centres sportifs, de laboratoires d'université ou d'organismes de recherche, ou de personnalités exceptionnelles... L'objectif est de tirer vers le haut ces collèges, de montrer aux collégiens l'intérêt du savoir, de leur donner plus d'ambition. Il faut ainsi leur donner, ainsi qu'à leur famille, le sentiment très net qu'ils étudient dans un établissement qui reçoit toute l'attention de la nation, un établissement où tout est fait pour la réussite, grâce à des moyens spécifiques ciblés. Il s'agit d'enclencher solidement le cercle vertueux de l'estime, de la confiance et de la motivation. Par ailleurs, les options étant trop souvent utilisées pour contourner la carte scolaire, les recteurs veilleront, lorsqu'ils créent de nouvelles options, à les installer en priorité dans les lycées accueillant les élèves issus de l'éducation prioritaire. Enfin, l'attractivité des lycées de l'éducation prioritaire pourra être accrue par la mise en place de modules de préparation aux concours administratifs, qui seront ouverts dans dix académies à la prochaine rentrée avec l'appui des services de formation des personnels administratifs des rectorats. Au-delà du lycée, de nombreux dispositifs visent à développer l'ambition scolaire et professionnelle des élèves de l'éducation prioritaire, à les accompagner dans leur parcours d'études, supérieures, à introduire une plus grande diversité sociale dans les grandes écoles et les universités. Dans ce but, des actions sont engagées pour que les lycées qui accueillent de nombreux élèves issus des collèges en éducation prioritaire signent des conventions avec des grandes écoles et des universités pour développer des « partenariats d'excellence ». À cette fin, une charte pour l'égalité des chances dans l'accès aux formations d'excellence a été signée entre le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et la conférence des grandes écoles, la conférence des présidents d'universités et la conférence des directeurs d'écoles et formations d'ingénieurs. Ces accords, déclinés localement, devraient permettre de développer l'accès aux formations d'excellence pour les élèves scolarisés dans les territoires de l'éducation prioritaire. Le traitement de la question de la mixité sociale est complexe et ses enjeux dépassent le cadre strict de l'école. Cependant, l'éducation nationale, notamment par ces mesures qui donnent corps au principe de l'égalité des chances, participe à la promotion de la mixité sociale au sein des établissements.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : éducation nationale
Ministère répondant : éducation nationale
Dates :
Question publiée le 29 novembre 2005
Réponse publiée le 21 mars 2006