sécurité des biens et des personnes
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, le couvre-feu est d'application limitée et n'a que peu à voir avec l'instauration d'un état d'urgence sur le fondement d'une vieille loi de 1955. La lutte contre la délinquance et notamment celle des jeunes est une obsession du gouvernement de Tony Blair, qui a, sur les questions de sécurité, une approche très ferme. En 2003, la Grande-Bretagne s'est dotée d'un « Antisocial Behaviour Act », loi destinée à réprimer les « comportements antisociaux ». Le texte permet aux juges de délivrer des « ASBO » (Anti Social Behaviour Orders) aux parents qui n'arrivent pas à contrôler leurs adolescents, d'imposer à une famille de déménager, d'interdire à un jeune délinquant de fréquenter un quartier de la ville, voire de lui interdire de proférer des injures sous peine de prison. Cette loi a également donné de nouveaux pouvoirs à la police qui peut imposer une sorte de couvre-feu entre 21 heures et 6 heures du matin dans des quartiers et des conditions très précisément définis : c'est un pouvoir de « dispersion » de « groupes dans les places publiques » lorsque la population locale se plaint de « harcèlement ou d'intimidation » et à condition que le problème soit « persistant » dans la zone ou le quartier visé. Au-delà de ce jargon juridique, la mesure vise certains quartiers très difficiles où ont lieu des batailles de gangs : c'est le cas par exemple à Leicester, au nord de Londres où trois quartiers ont été placés l'an dernier sous cette mesure. Elle permet aux policiers de raccompagner à leur domicile tous les jeunes de moins de seize ans qui sont dans la rue après 21 heures et de disperser autoritairement tout « rassemblement » si nécessaire. Pour la police britannique, c'est bien évidemment une mesure extrême, de dernier recours. Compte tenu de la teneur de l'expérience britannique dans le domaine des violences urbaines, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, de lui faire part de son sentiment à son sujet au regard de la situation délicate que la France a eu à traverser en ce mois de novembre 2005.
Réponse publiée le 7 mars 2006
Aujourd'hui, plus de 8 000 lois et 400 000 textes réglementaires sont en vigueur en France. Pour éviter l'inflation législative et dans un souci de simplification et de lisibilité juridique, le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, fait application des textes en vigueur lorsqu'ils sont à même de répondre aux besoins. La loi n° 55-385 du 3 avril 1955 modifiée instituant un état d'urgence a tout à fait permis de réprimer les comportements antisociaux et anti-institutionnels qui relèvent des violences urbaines. En effet, le dispositif établi par ce texte prévoit que les autorités administratives déterminent les ressorts territoriaux à l'intérieur desquels des limitations à certaines libertés (aller et venir, commerce) pourront être apportées pendant une période strictement nécessaire au rétablissement de l'ordre public. Cette réglementation permet d'adapter les mesures préventives et répressives à chaque situation locale. Ainsi, dans le cadre du décret n° 2005-1386 du 8 novembre 2005 qui a déclaré l'état d'urgence, les préfets concernés ont pu prendre des arrêtés instaurant des couvre-feux dans des zones limitées retenues en raison de leur exposition à des troubles importants à l'ordre public. À l'intérieur de ces territoires, la circulation de certaines catégories de personnes (les mineurs le plus souvent) a été interdite à certaines heures, principalement du début de la soirée jusqu'au matin. Les préfets ont également disposé de la possibilité d'instituer, par arrêté, des zones de protection ou de sécurité où le séjour des personnes était réglementé afin de préserver les édifices publics, cibles privilégiées des auteurs de violences urbaines. Ils pouvaient de même recourir à l'interdiction de séjour dans tout ou partie de leur département pour toute personne qui aurait cherché à entraver, de quelque manière que ce soit, l'action des pouvoirs publics. L'efficacité de ces mesures est renforcée par la sanction pénale de leur inobservation. Le non-respect d'un couvre-feu est en effet puni d'une peine d'emprisonnement de deux mois et/ou d'une amende de 750 à 30 000 euros. La peine d'emprisonnement justifie en outre la mise en oeuvre de moyens coercitifs immédiats à l'encontre des délinquants, notamment leur interpellation et leur placement en garde à vue. Par ailleurs, la responsabilité pénale des parents du fait des actes de délinquance commis par leur enfant mineur peut être engagée, sur la base de l'infraction prévue à l'article 227-17, alinéa 1er, du code pénal, s'il est établi à leur encontre qu'ils ont failli à leurs obligations légales envers cet enfant, le confortant alors dans son comportement répréhensible. La réglementation française permet de concilier efficacement liberté d'aller et venir et maintien de l'ordre public en ne restreignant la liberté des uns et des autres que pour un temps déterminé et sur des lieux délimités en raison d'événements graves troublent la paix publique.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : intérieur et aménagement du territoire
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Dates :
Question publiée le 29 novembre 2005
Réponse publiée le 7 mars 2006