commerce international
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
Pour 2006, le Fonds monétaire international (FMI) recommande vivement au gouvernement français de faire preuve de « la flexibilité nécessaire pour contribuer au succès du cycle de Doha » des négociations de l'OMC sur la libéralisation du commerce mondial. Constatant que ces discussions sont « à un stade critique », le FMI estime qu'il est particulièrement important de réaliser une plus grande libéralisation dans le secteur agricole, qui bénéficierait aux consommateurs autant qu'à l'ensemble de la communauté internationale ». Compte tenu de ces éléments, M. Chantal Robin-Rodrigo demande à Mme la ministre déléguée au commerce extérieur de lui indiquer la position et les intentions du Gouvernement au sujet de ce dossier.
Réponse publiée le 25 avril 2006
L'actuel cycle de négociations commerciales à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) repose sur les objectifs définis lors de la conférence de Doha en 2001 : pour ce qui est de l'agriculture, une amélioration substantielle de l'accès aux marchés par une baisse des droits de douane, un retrait progressif des subventions à l'exportation, en vue de leur élimination, et des réductions substantielles des soutiens internes (subventions aux producteurs) ayant des effets de distorsion des échanges. Ces principes ont été précisés en confirmés par l'accord-cadre de juillet 2004 et la conférence de Hong Kong de décembre 2005. Les négociations pour parvenir à des modalités complètes sont toujours en cours et devraient déboucher d'ici à la fin de cette année. Beaucoup a déjà été fait dans le cadre de l'actuel cycle de négociations, en faveur de la libéralisation des marchés agricoles. La politique agricole commune a été réformée dans le sens du découplage des aides en 2003. La date de 2013 a été fixée pour la fin de toutes les formes de subvention à l'exportation, et la France souhaite que les dispositifs, autres que les restitutions, qui aboutissent aux mêmes résultats (aide alimentaire abusive, monopoles d'État, crédits export dérogatoires aux règles du marché) soient éliminés dans le même délai. Les subventions internes les plus distorsives pour le commerce (boîte orange) seront réduites (on parle à ce stade de 70 % pour l'Union européenne et de 60 % pour les États-Unis), et que les subventions semi-distorsives (boîte bleue) seront plafonnées et disciplinées. En ce qui concerne les droits de douane, l'Union européenne a mis sur la table une proposition de réduction de ses tarifs qui va jusqu'à 60 % de baisse pour certains produits, et réduit les droits moyens de 46 %. C'est considérable et nous avons déjà fait preuve de la « flexibilité nécessaire » qu'évoque le Fonds monétaire international (FMI). Nous ne pouvons aller plus loin sans mettre en danger le cadre actuel de la politique agricole commune. La libéralisation des marchés agricoles, comme le souligne le FMI, aura des effets positifs sur le bien-être des consommateurs, notamment des pays développés, et permettra une meilleure allocation des ressources au niveau mondial, certains pays en voie de développement pouvant faire valoir leurs avantages comparatifs en matière agricole (le Brésil, l'Argentine, la Thaïlande). Cependant, ces effets positifs ne doivent pas être exagérés, notamment quant à leurs effets sur le développement. S'il est clair que la libéralisation agricole permettra d'élever le niveau de revenu des grands pays dits « émergents » (comme l'Inde, le Brésil), et donc de faire reculer la pauvreté dans ces pays, il n'est pas sûr que les pays les moins avancés ou l'Afrique en tirent automatiquement parti. Ils seront en effet victimes de l'« érosion des préférences » : le bénéfice qu'ils tirent de l'accès préférentiel notamment au marché européen (tout sauf les armes, accords de Cotonou avec les Afrique-Caraïbes-Pacifique, système de préférences généralisées...) se réduit au fur et à mesure de la baisse des droits de douane « erga omnes ». Enfin, les pays importateurs nets de produits agricoles pourraient subir la hausse des prix mondiaux de certains produits. C'est pourquoi les dernières études de la Banque mondiale et de l'OCDE expliquent que la libéralisation agricole pourrait avoir des effets négatifs sur certains pays, notamment en Afrique subsaharienne et dans le Maghreb. Au vu de ces éléments, la position française est inchangée : il serait contre-productif pour l'Union européenne d'aller plus loin à l'OMC en mettant sur la table une offre plus ambitieuse, notamment en matière d'accès au marché agricole, alors que nos partenaires des pays émergents ne semblent pas prêts à des mouvements significatifs en matière industrielle. La préférence communautaire reste nécessaire à la fois pour maintenir une production agricole équilibrée sur les territoires, mais aussi pour garantir notre sécurité alimentaire et pour nous prémunir aussi contre la volatilité des cours agricoles mondiaux.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : commerce extérieur
Ministère répondant : commerce extérieur
Dates :
Question publiée le 29 novembre 2005
Réponse publiée le 25 avril 2006