tabacs manufacturés
Question de :
M. Jean Grenet
Pyrénées-Atlantiques (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Jean Grenet appelle l'attention de M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État sur les conséquences économiques et sociales et morales du développement du marché parallèle du tabac. Depuis les dernières et lourdes augmentations des taxes sur le tabac en France, le marché parallèle a connu une progression très importante. Les premiers, sinon les seuls, bénéficiaires de ce commerce illicite sont ses multiples acteurs et les pays frontaliers à la fiscalité plus faible sur le tabac. Ce phénomène d'économie souterraine est, par contre, très préjudiciable à l'intérêt de notre pays. Les buralistes, à commencer par ceux des Pyrénées-Atlantiques en raison du faible niveau de fiscalité du tabac en Espagne, ont été très affectés par cette augmentation. Le marché parallèle porte également atteinte aux ressources fiscales de l'État et à son crédit. Il réduit l'efficacité de la politique de santé publique justifiant la hausse des taxes sur le tabac par son effet dissuasif, en particulier chez les jeunes. La situation est donc contreproductive et les solutions paraissent très difficiles à mettre en oeuvre. La crainte d'une sanction par la Cour de justice européenne semble paralyser toute initiative interne, comme une modification de l'article 575 G du code général des impôts. Cet article dispose en effet que les tabacs manufacturés ne peuvent circuler après leur vente au détail sans document d'accompagnement au-delà du seuil limitatif de deux kilogrammes. Les seuils fixés par la directive européenne 92/12/CE du 25 février 1992 relative aux produits soumis à accises sont seulement indicatifs. La France, à défaut d'intervenir sur ses règlements nationaux, a plaidé l'an dernier auprès du Conseil européen pour l'instauration d'un plafond limitatif européen au-delà duquel la notion de consommation personnelle ne pourrait être invoquée. Le ministre des finances est intervenu en ce sens, le 26 août 2004, auprès du président de la Commission européenne, relayé, début 2005, par son successeur. Il lui demande, au vu des résultats de cette démarche, si le Gouvernement entend prendre des initiatives pour enrayer concrètement un phénomène préjudiciable à notre pays sous de très nombreux aspects.
Réponse publiée le 17 janvier 2006
Le développement des achats transfrontaliers est le résultat des disparités de prix au sein de l'Union européenne. Un paquet de Marlboro, par exemple, coûte deux fois moins cher en Espagne qu'en France (2,90 euros contre 5 euros). Il faut cependant observer que les écarts de prix au sein de l'Union européenne sont principalement dus aux politiques tarifaires des fabricants et non aux taux de fiscalité. À titre d'illustration, les droits d'accises en France représentent 64 % du prix de vente au détail des tabacs et 63 % au Royaume-Uni, mais le même paquet de Marlboro coûte 5 euros en France contre 6,97 euros au Royaume-Uni. Les ventes transfrontalières ne sont pas de la contrebande. Elles sont légales dès lors que les tabacs sont acquis par les particuliers pour leurs besoins propres et transportés par eux-mêmes. Si ces conditions sont réunies, les particuliers peuvent acheter du tabac manufacturé dans l'Union européenne et le transporter ensuite sans document d'accompagnement. Il appartient aux agents des douanes et droits indirects de prouver, lors de leur contrôle, la nature commerciale de la détention. Pour établir la détention à des fins marchandes de tabacs manufacturés, la réglementation communautaire a défini une liste de critères à caractère strictement indicatif parmi lesquels figure la quantité de produit détenu (800 cigarettes). Une mesure nationale visant à limiter les achats transfrontaliers de tabac vient cependant d'être adoptée par les parlementaires, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006. Ce texte vise à soumettre la circulation de tabac au-delà d'un kilogramme (cinq cartouches de cigarettes) à la production d'un document simplifié d'accompagnement et à interdire la détention de plus de deux kilogrammes de ce produit (dix cartouches de cigarettes) dans un véhicule de tourisme. Pour sa part, le Gouvernement s'emploie au niveau du Conseil et du Parlement européen à faire évoluer les mentalités sur ce sujet, en soulignant, notamment, la contradiction entre la signature de la convention-cadre de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur la lutte contre le tabagisme et la libre circulation des produits du tabac pour les particuliers, encouragée par les écarts de prix entre les États membres. En effet, cette convention préconise la pratique de prix élevés comme instrument de lutte contre le tabagisme, notamment chez les jeunes. Les considérations de santé publique commencent à se diffuser au sein de l'Union européenne, notamment par l'instauration d'un prix minimum sur les tabacs en Irlande, en Belgique, en Italie, en Autriche et peut-être bientôt en Espagne. Celui-ci permet d'atteindre les buts sanitaires poursuivis en interdisant la pratique de prix promotionnels. Cependant, la convention-cadre de l'OMS n'est pas encore ratifiée par tous les États membres. De ce fait, la Commission ne la considère pas encore comme un acquis communautaire.
Auteur : M. Jean Grenet
Type de question : Question écrite
Rubrique : Agroalimentaire
Ministère interrogé : budget et réforme de l'Etat
Ministère répondant : budget et réforme de l'Etat
Dates :
Question publiée le 6 décembre 2005
Réponse publiée le 17 janvier 2006