Question écrite n° 81590 :
organisation

12e Législature

Question de : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste

Les médias s'en sont dernièrement fait largement l'écho : plusieurs milliers de défenseurs de la laïcité ont défilé en ce début de mois de décembre 2005 à Paris à l'occasion du centenaire de la loi de 1905. L'attachement à la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l'État et sa défense étaient les mots d'ordre d'une manifestation qui a ras-semblé 12 000 personnes. Parmi les manifestants, on retrouvait une grosse majorité de militants laïcs de la Libre Pensée ou l'Union des familles laïques aux slogans et banderoles parfois clairement anticléricaux : « Ni Dieu ni maître », « À bas la calotte », « Non au retour du délit de blasphème ». Moins bruyants mais placés symboliquement en tête de cortège, environ 500 francs-maçons représentaient les neuf obédiences françaises. Le Grand Orient de France, en particulier, estime que « la laïcité aujourd'hui est remise en cause par certains esprits ». En effet, la commission d'études sur la loi de 1905 créée par le Gouvernement est en ligne de mire des francs-maçons qui la jugent « dangereuse », allant jusqu'à indiquer que « cette commission d'études, sous prétexte d'adapter la loi sur la laïcité, risque de la réviser », insistant par la même occasion sur « les deux socles de la loi de 1905 : la liberté des cultes et le fait que la République ne subventionne aucun culte ». Le GOF demande notamment « que la loi de 1905 soit étendue à toute la France » c'est-à-dire aux départements d'Alsace et de Moselle encore soumis au concordat, dont il réclame l'annulation, estimant que « le contribuable ne doit pas payer les cultes ». Avant le départ de la manifestation, les neuf grands-maîtres de la Maçonnerie française ont aussi remis au président de l'Assemblée nationale, les Chantiers de la laïcité qui rassemblent douze propositions de loi. Ces dernières proposent, entre autres, de familiariser les plus jeunes à un « code de la laïcité », de « redonner un lustre au mariage civil » ou de « dispenser des cours d'éducation civique lors de la naturalisation des étrangers ». Compte tenu de ces éléments, et des légitimes inquiétudes suscitées chez une écrasante majorité des Français par une éventuelle remise en cause de la laïcité en France, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande désormais à M. le Premier ministre de lui indiquer la position et les intentions du Gouvernement à leur sujet.

Réponse publiée le 31 janvier 2006

Le Gouvernement est fermement attaché à la laïcité de la République dont la loi du 9 décembre 1905 est un des fondements essentiels. Cette loi a permis, depuis un siècle, de respecter la liberté de conscience, qui est à la fois une prérogative personnelle de chaque citoyen et une liberté qui peut s'exercer collectivement dans le cadre d'une religion. La loi de 1905 respecte la liberté de chaque religion de s'organiser selon les principes qui lui sont propres, sous la seule réserve du respect de l'ordre public. Elle interdit toute immixtion des autorités publiques dans des questions d'ordre religieux et oblige ces autorités à protéger l'expression des convictions de chacun, dès lors qu'elle ne prend pas la forme d'un appel à la haine ou à la violence. De tels excès sont d'ailleurs aussi condamnables lorsqu'ils sont exprimés au nom d'une religion qu'en vertu d'une conviction d'une autre nature. La loi a été modifiée à plusieurs reprises depuis 1905, mais ces modifications n'ont eu d'autre objet que d'assurer la permanence de l'application des principes fondamentaux énoncés par les quatre premiers articles de la loi, dont la rédaction est demeurée intangible depuis 1905, en adaptant leurs modalités pratiques de mise en oeuvre à l'évolution des circonstances. Le Gouvernement n'envisage donc pas de toucher aux fondements de la loi de 1905 et notamment de remettre en cause l'interdiction de financement direct de l'exercice du culte énoncée par les articles 1er et 2 de la loi, ni le droit des associations cultuelles de se constituer librement dans le respect des règles d'organisation générale du culte dont elles assurent l'exercice, énoncé par l'article 4. Il veille au contraire, en entretenant un dialogue permanent et respectueux avec les représentants des différentes religions, à ce que ces principes continuent à trouver leur pleine application dans notre société contemporaine. Dès 1905, le législateur avait également réservé la possibilité de maintenir des régimes spécifiques d'organisation du culte sur certaines parties du territoire national. Cette possibilité a été exercée jusqu'à présent à la satisfaction générale des habitants et des représentants des régions concernées et il n'est donc pas davantage envisagé de la remettre en cause, d'autant que l'application concrète de ces régimes locaux est assurée par les autorités publiques dans le respect du principe général de neutralité et de laïcité, qui s'impose sur tout le territoire de la République en vertu du préambule de la Constitution.

Données clés

Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo

Type de question : Question écrite

Rubrique : État

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Dates :
Question publiée le 20 décembre 2005
Réponse publiée le 31 janvier 2006

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