Question écrite n° 86574 :
qualité

12e Législature

Question de : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste

L'eau minérale en bouteille, dont la consommation mondiale a presque doublé à 154 milliards de litres en 2004 par rapport à 1999, est une ressource naturelle qui au final coûte très cher à l'environnement, selon une étude publiée dernièrement par un institut américain. « Alors que l'eau minérale en bouteille n'est souvent pas plus saine que l'eau du robinet dans les pays industrialisés, elle peut coûter jusqu'à 10 000 fois plus cher » si l'on tient compte de l'énergie utilisée pour la mise en bouteille, les livraisons et l'éventuel recyclage des contenants, a averti l'étude sur l'eau publiée par l'Earth Policy Institute. « L'eau en bouteille coûte finalement plus cher que l'essence », ajoute cet institut. En 2004, les Français ont consommé 145 litres par personne. Ces progressions colossales de la consommation d'eau en bouteille ont entraîné des coûts non moins colossaux pour la fabrication des bouteilles, le plus souvent en plastique, puis leur acheminement, par bateau, train ou camion. À l'inverse, l'eau du robinet est fournie par un système de distribution bien plus écologique et à moindres frais. Et s'il suffit de fermer le robinet après consommation, la bouteille d'eau vide, elle, finit la plupart du temps dans une décharge. Les bouteilles en polyéthylène téréphtalate (PET) sont produites à partir d'un dérivé du pétrole brut. Pour les États-Unis, cela représente plus de 1,5 million de barils de pétrole par an, de quoi faire rouler 100 000 voitures pendant un an. Au niveau mondial, la fabrication de bouteilles en PET requiert chaque année 2,7 millions de tonnes de ce plastique. Se pose ensuite la question des déchets. Citant les chiffres du Container Recycling Institute, l'étude indique que 86 % des bouteilles d'eau en plastique utilisées aux États-Unis finissent à la poubelle. Or l'incinération produit des émanations toxiques et des cendres contenant des métaux lourds et la mise en décharge des bouteilles leur « offre » une survie jusqu'à 1 000 ans avant la biodégradation totale. Pire, 40 % des bouteilles en PET collectées pour le recyclage aux États-Unis en 2004 ont en fait été acheminées parfois fort loin comme en Chine, augmentant encore la facture pour l'environnement. La production à grande échelle d'eau en bouteille a aussi conduit paradoxalement à des pénuries d'eau potable. C'est le cas de l'Inde où 50 villages ont vu leur nappe phréatique se réduire considérablement alors que Coca-Cola y puisait allègrement pour produire son eau Dasani ensuite exportée. Car l'eau en bouteille est, dans environ 40 % des cas, de l'eau du robinet à laquelle ont été rajoutés des minéraux, pas toujours au bénéfice de la santé des consommateurs. L'étude rappelle à ce sujet les recommandations du Sénat français de changer souvent d'eau minérale pour éviter d'absorber de trop grandes quantités de mêmes minéraux. Compte tenu de cette situation particulièrement inquiétante, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande désormais à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable de lui indiquer la position et les intentions du Gouvernement au sujet de ce dossier.

Réponse publiée le 1er août 2006

La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative à la position et aux intentions du Gouvernement au sujet de la place de l'eau en bouteille par rapport à l'eau potable dans les habitudes de consommation. Selon une enquête IFEN-Credoc réalisée en 2000, la part de la population déclarant boire habituellement de l'eau du robinet était de 41 % à cette date. L'eau en bouteille était la boisson exclusive de 39 % des Français et 22 % déclaraient boire à la fois de l'eau du robinet et de l'eau en bouteille. La première raison invoquée pour la consommation d'eau en bouteille était le mauvais goût de l'eau du réseau, sa teneur en calcaire, puis les craintes sanitaires. L'eau du robinet coûte 100 à 300 fois moins cher que l'eau en bouteille. Avec une moyenne de 120 mètres cubes par an, la consommation d'eau pour un foyer de trois à quatre personnes coûte près d'un euro par jour. Ce qui signifie que le budget quotidien en eau du robinet pour toute une famille (salle de bains, cuisine, lessive...) coûte moins cher que deux bouteilles d'eau minérale. Du point de vue des déchets, la consommation d'eau du robinet permet d'économiser environ 10 kg de déchets par an et par personne, par rapport à l'eau embouteillée. On peut avancer une fourchette de surcoût (collecte + traitement) allant de 6,8 à 10 millions d'euros par an pour les déchets des bouteilles plastiques d'eau. La ministre considère qu'il faut inciter les consommateurs à préférer la consommation d'eau potable, qui doit être délivrée dans le respect de la réglementation sanitaire en vigueur, à celle d'eau en bouteille. Les actions engagées par le ministère de l'écologie et du développement durable pour favoriser la consommation d'eau du robinet sont de deux ordres : du point de vue de la politique des déchets, le mécanisme de responsabilisation des producteurs quant aux déchets que les emballages de leurs produits génèrent permet de leur imputer une partie des coûts de gestion de ces déchets. Ce mécanisme, qui s'applique notamment aux bouteilles plastiques, constitue ainsi une incitation permanente à la prévention par les producteurs. Pour ce qui est du comportement des consommateurs, le plan de prévention de la production des déchets présenté en février 2004 comprend des actions de sensibilisation. Le guide de la consommation responsable, qui a été réalisé, en fait partie. Il traite notamment des gestes éco-responsables liés à la consommation d'eau. De même, une campagne de communication, que la ministre a lancé avec l'Ademe en octobre 2005, a relayé la nécessité de prévenir les émissions de déchets, notamment en préférant la consommation d'eau du robinet ; du point de vue de la politique de l'eau, le bilan du ministère de la santé et solidarité dressé sur 2002-2004 fait apparaître que 99,8 % des captages contrôlés respectent les valeurs limites requises par la réglementation concernant les nitrates et 97,3 % des contrôles respectent les normes au niveau de la distribution sur ce paramètre. Concernant les pesticides, des dépassements des limites de qualité sont observés pour 4,3 % des installations de production. Il ressort de cette étude que les eaux du réseau public sont globalement de bonne qualité, même si des améliorations doivent constamment être recherchées. La poursuite de l'application des directives européennes ayant un lien avec la qualité de l'eau est une action constante qui améliore la qualité des milieux et facilite donc la production d'eau potable. Sur la question spécifique des pollutions diffuses agricoles, outre les outils déjà en place, le projet de loi sur l'eau soumet au Parlement plusieurs mesures pour améliorer la gestion de ces pollutions : création d'une redevance pour pollutions diffuses, mise en place de plans d'action sous forme de mesures contre les pollutions diffuses et bénéficiant d'aide. Ces mesures pourront devenir obligatoires dans les secteurs sensibles.

Données clés

Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo

Type de question : Question écrite

Rubrique : Eau

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Dates :
Question publiée le 21 février 2006
Réponse publiée le 1er août 2006

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