police
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
La police française entend surmonter les difficultés techniques qu'elle peut rencontrer pour découvrir les auteurs de courriers électroniques dans ses enquêtes criminelles. Selon elle, à l'instar de ce qui a pu se passer dans l'enquête sur l'enlèvement, la séquestration et le meurtre du jeune Ilian Halimi, l'anonymat, même relatif, assuré par les cybercafés, et les délais nécessaires pour identifier et localiser les criminels présumés sont autant d'embûches. Il sera donc envisagé que les services de police dressent un « inventaire de ces difficultés » rencontrées, avant de dresser une « liste de moyens » pour y répondre. Toutefois, on peut légitimement s'interroger sur les solutions qui pourront être apportées. En effet, pour exemple, les éléments d'identification relatifs à un courrier électronique posté sur une des messageries internationales classiques, le plus souvent hébergées aux États-Unis, la question trouve assez aisément sa réponse. Toutefois, si la messagerie est hébergée dans des pays plus « exotiques » ou moins coopératifs, les choses se compliquent et trouver les données ayant servi à la création de la boîte aux lettres (identifiant, mot de passe, adresse IP, personnes y ayant accès) prend un temps qui peut s'éterniser. Parfois, le pays concerné peut même répondre qu'il ne conserve pas les données de connexion, et là, il faut se l'avouer, il n'y aura aucun espoir de pouvoir aboutir. Mais les difficultés ne s'arrêtent pas à internet, puisqu'elles sont aussi rencontrées dans notre pays au niveau des communications téléphoniques. En effet, il est quasi systématiquement très difficile de pouvoir retrouver la source des divers appels « anonymes » passés sous numéro masqué depuis un téléphone portable ou un téléphone dégroupé, l'opérateur du numéro recevant cet appel ne disposant que de la liste des appels passés par ses abonnés et non ceux reçus par ces derniers, et ceci quand bien même il y a eu un dépôt de plainte. Autant de difficultés techniques qui rendent donc impossible toute action rapide et efficace des services de police. En conséquence, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande donc à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, de lui indiquer les mesures qu'il compte prendre afin de résoudre cette situation.
Réponse publiée le 18 juillet 2006
Les nouvelles technologies de l'information et de la communication sont une aide à l'enquête pour les services de police. Elles connaissent désormais un essor considérable. Toutefois, elles peuvent également constituer un obstacle à la rapidité et l'efficacité des investigations entreprises par les services de la police et de la gendarmerie nationales. En effet, dès lors que les malfaiteurs utilisent des moyens de communication électroniques et téléphoniques, des contraintes techniques importantes sont à surmonter. La mobilisation résolue du ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a permis de progresser en la matière. L'arsenal juridique a été renforcé dans le cadre de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles transfrontaliers. Ainsi, le décret d'application n° 2006-358 du 24 mars 2006 relatif à la conservation des données des communications électroniques prévoit que, pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales, les opérateurs de communications électroniques sont désormais tenus de conserver et de garder à disposition des autorités judiciaires certaines catégories de données techniques pendant un an. De même, cette loi a complété l'article L. 34-1 du code des postes et communications électroniques par un alinéa qui précise le statut des « cybercafés » et les soumet aux mêmes obligations que les opérateurs de communications électroniques. De plus, des travaux sont en cours afin de donner un cadre réglementaire au principe, posé par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, de la transmission par voie télématique ou informatique, à tout officier de police judiciaire de certaines informations contenues dans le(s) système(s) informatique(s) ou traitement(s) de données à caractère personnel administrés par des personnes morales de droit public ou de droit privé. Ce texte, qui fait l'objet d'un examen par la commission nationale de l'informatique et des libertés, permettra de réduire considérablement les délais entre les requêtes formulées par les enquêteurs et les réponses adressées par les prestataires qui détiennent des informations. Par ailleurs, face à la complexité croissante des réseaux, à la multiplication des moyens de communication, à l'anonymisation des connexions et à l'internationalisation des échanges, des initiatives en cours contribuent également au renforcement du dispositif public répressif. À l'issue de plusieurs mois de travaux qui associaient, sous la conduite du forum des droits sur l'Internet, administrations, professionnels et associations familiales, un certificat des fournisseurs de services de l'Internet sera prochainement finalisé. Il sera délivré aux organismes qui adhèrent à une charte composée de soixante-dix engagements dont plusieurs visent à une meilleure coopération avec les autorités en vue de prévenir ou de réprimer les infractions commises sur Internet et à signaler les contenus illicites. Parallèlement sera mis en place en fin d'année au sein de l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication un centre de signalement Internet destiné à recueillir et traiter les signalements des internautes et des fournisseurs d'accès sur les contenus illicites diffusés sur le Net. Ce centre fonctionnera comme un poste de police de l'Internet. En plus de ces actions, qui favoriseront une meilleure surveillance de la Toile ainsi que des échanges plus fructueux et rapides avec les opérateurs, le ministère de l'intérieur est étroitement associé aux travaux de la délégation interministérielle aux interceptions judiciaires créée au ministère de la justice. Cette délégation a en effet pour objectif d'uniformiser et fluidifier les relations entre les opérateurs de communications électroniques et les services d'enquête et de contribuer au dépassement des obstacles techniques qui peuvent, parfois, empêcher ou gêner certains modes d'interception. En outre, un effort particulier est porté sur les enjeux de la coopération internationale. Il s'agit, par les voies bilatérales ou multilatérales, de faciliter l'échange d'information entre services répressifs et d'accélérer, voire d'autoriser parfois dans certains États, les voies de l'entraide judiciaire. Si le canal traditionnel d'Interpol est fortement sollicité pour cette coopération policière internationale, il convient de signaler également l'action du sous-groupe High-Tech du groupe de Lyon au sein du G8 qui a initié un réseau de points de contacts opérationnels nationaux « H24 ». Ce réseau, dorénavant étendu à quarante-trois États membres, constitue un levier particulièrement intéressant pour fluidifier les relations entre les services enquêteurs et anticiper sur des effacements de traces techniques par un prestataire de services situé dans un État tiers. La convention sur la cybercriminalité adoptée à Budapest le 23 novembre 2001 et entrée en vigueur au 1er mai 2006 vient d'être publiée par décret n° 2006-580 du 23 mai 2006.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : intérieur et aménagement du territoire
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Dates :
Question publiée le 14 mars 2006
Réponse publiée le 18 juillet 2006