Question écrite n° 90188 :
Asie du Sud-Est

12e Législature

Question de : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste

L'organisation caritative Oxfam a dernièrement suspendu certaines de ses activités humanitaires dans la province indonésienne d'Aceh, dévastée par le tsunami en décembre 2004, en attendant les résultats d'une enquête sur de possibles irrégularités financières. En effet, Oxfam a déclaré que les enquêteurs se penchaient sur des irrégularités présumées impliquant « des dizaines de milliers de dollars » liées aux activités d'un bureau de la capitale provinciale, Banda Aceh. L'organisation n'a pas donné plus de précisions sur ces illégalités présumées. Les organisations humanitaires oeuvrant en Indonésie se sont engagées à surveiller leurs fonds de près, de peur qu'ils ne disparaissent en partie dans les poches de responsables ou d'entrepreneurs locaux, dans un pays ravagé par la corruption. Jusqu'ici, les autorités indonésiennes ont été louées pour leurs efforts contre la corruption à Aceh, en grande partie grâce à une agence gouvernementale chargée de surveiller le processus de reconstruction après le tsunami de décembre 2004. L'aide humanitaire dans le sillage de la catastrophe s'est élevée à environ 11 milliards d'euros, et l'on peut craindre, si ces exactions présumées sont avérées, que cette somme colossale ne parvienne pas à ce pour quoi elle était destinée. En conséquence, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande donc à Mme la ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie de lui faire un point sur ce dossier, et de lui indiquer les intentions du Gouvernement au sujet de ce dernier.

Réponse publiée le 11 juillet 2006

Le risque majeur d'irrégularités financières dans l'utilisation des fonds mis à disposition par la communauté internationale et l'État indonésien lui-même tient essentiellement aux pratiques liées à diverses formes de corruption. Les autorités indonésiennes ont été conscientes dès le début de cette préoccupation exprimée par les donateurs, notamment internationaux, et se sont fixés comme priorité de donner une image positive de l'utilisation des fonds issus de l'élan de solidarité provoqué par le tsunami. De véritables efforts en matière de lutte anti-corruption sont à mettre à l'actif du gouvernement indonésien actuel. Pour ce qui concerne l'aide post-tsunami, cette politique est mise en oeuvre par le Bureau de la reconstruction et de la réhabilitation d'Aceh et de Nias, le BRR. Depuis septembre 2005, le BRR a créé en son sein une unité anti-corruption importante (environ une cinquantaine de personnes), dirigées par un expert australien qui doit être remplacé prochainement par un fonctionnaire indonésien. Cette unité intervient dans trois domaines : la prévention (en contrôlant les mécanismes de mise en oeuvre pour identifier des points de faiblesse pouvant induire des pratiques de corruption), le contrôle (pour s'assurer que les activités contrôlées sont en accord avec les procédures imposées par le BRR, et pour prévenir le plus possible la perte de ressources pour fait de corruption), l'éducation (par des mesures de communication et d'information sur les moyens de se conformer aux standards éthiques pour l'équipe du BRR et un public plus large). Depuis sa création, cette unité a reçu 528 plaintes : 25 % sont liés à des soupçons concernant des appels d'offre (le BRR a commencé à dresser une liste noire des entreprises et des consultants qui ont fait montre de pratiques malhonnêtes) ; 15 % sont liés à des suspicions de pratiques corrompues ; 14 % sont liés à la mise en ouvre des projets ; 46 % relatifs à des problèmes de respect des règles ou de comportements des personnels chargés de gérer la reconstruction ; 10,2 % de ces plaintes émanent d'ONG et d'acteurs de la société civile (Sources : document du BRR publié à l'occasion du second Forum de coordination pour Aceh et Nias [9 mai 2006]). Outre l'examen de 15 plaintes spécifiques qui a conduit à rectifier ou accumuler des appels d'offres, pour un montant évalué à 1 million d'EUR, les résultats de l'unité anti-corruption affichés par le BRR sont les suivants : - l'établissement d'une liste d'entreprises à éviter et la fixation de règles auxquelles tout maître d'ouvrage doit se conformer pour participer à un appel d'offres ; - une collaboration avec la Banque Mondiale sur l'identification du prélèvement des taxes illégales qui avaient cours sur la principale route de transport de marchandises Medan-Banda Aceh. - l'organisation de campagnes de sensibilisation en direction des fonctionnaires, des acteurs économiques, de la société civile et des médias. Un travail de proximité avec les donateurs (l'ambassade de France en Indonésie a d'ailleurs eu recours à cette unité une fois, pour rapporter des pressions exercées sur une ONG financée sur fonds publics dans le choix d'entreprises de reconstruction), les institutions financières internationales et les ONG. Au travers des engagements anti-corruption signés par chaque ONG au moment où leur projet reçoit l'approbation du BRR pour sa mise en ouvre, l'unité peut leur fournir un appui direct dans la gestion de problèmes éthiques qui peuvent survenir (par exemple en cas de différend avec une entreprise, l'unité intervient comme médiateur en rappelant les règles fixées par le BRR, auxquelles l'Ong est tenue de se conformer) ; enfin l'édition de règlements en matière de procédures, en collaboration avec les autres services du BRR et les autorités locales. L'accent a été mis dans un premier temps sur la reconstruction de logements, secteur qui présentait le plus de risques de corruption.

Données clés

Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo

Type de question : Question écrite

Rubrique : Relations internationales

Ministère interrogé : coopération, développement et francophonie

Ministère répondant : coopération, développement et francophonie

Dates :
Question publiée le 28 mars 2006
Réponse publiée le 11 juillet 2006

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