contrats nouvelle embauche
Question de :
M. Pierre Cardo
Yvelines (7e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Pierre Cardo appelle l'attention de M. le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes sur la décision de certains responsables de collectivités territoriales, annoncées à grands renforts de publicité, d'exclure des aides, voire des marchés publics, de petites entreprises qui, en toute légalité, embauchent ou ont embauché des personnes en contrat nouvelle embauche (CNE). De telles annonces ou décisions suscitent l'inquiétude des petites entreprises mais également des exclus du marché du travail et des élus locaux sont inquiets, alors que le CNE porte ses fruits. Des milliers de petites entreprises l'utilisent pour embaucher des salariés supplémentaires, pour nombre d'entre elles, pour embaucher leur premier salarié, permettant ainsi la création, en quelques mois, de plusieurs centaines de milliers d'emplois. Outre le fait qu'une telle décision met un terme aux efforts et engagements en matière de retour à l'emploi de ceux qui en sont exclus durablement, cette position est en contradiction avec les dispositions de l'article 53 du code des marchés publics qui, à offre équivalente, introduit les performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté. Il lui demande de lui indiquer les mesures qu'il entend prendre pour rassurer à la fois les employeurs qui proposent des emplois sous contrat CNE et les dizaines de milliers de salariés qui, grâce à ce contrat, ont trouvé une réponse à leur situation d'exclusion et qui, du jour au lendemain, risquent de se retrouver dans la précarité. - Question transmise à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Réponse publiée le 25 juillet 2006
Le code des marchés publics, issu du décret n° 2004-15 du 7 janvier 2004 modifié, permet aux acteurs de la commande publique d'intégrer dans leur processus d'achat des préoccupations sociales à chaque stade d'une procédure de passation d'un marché public et lors de son exécution. Lors de la sélection des offres, les acheteurs peuvent prendre en compte divers critères variables en fonction du marché en cause pour choisir l'offre économiquement la plus avantageuse, au titre desquels figurent les critères sociaux tels que le critère de « performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté ». Toutefois, l'introduction de préoccupations sociales ne doit pas dénaturer ou contrarier les principes fondamentaux, qui régissent la commande publique que sont la liberté d'accès des opérateurs économiques, l'égalité de traitement des candidats et la transparence des procédures. Le code a avant tout pour objet d'instaurer des conditions de mise en concurrence propres à garantir l'accès de tous les prestataires potentiels aux marchés publics. En conséquence, la possibilité offerte aux acheteurs de se fonder sur des critères à caractère social pour sélectionner l'offre économiquement la plus avantageuse est impérativement soumise au respect de quatre conditions : ces critères doivent être liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution ; ils ne doivent pas conférer à l'acheteur une liberté inconditionnée de choix ; ils doivent respecter les principes fondamentaux du droit de la commande publique, notamment celui de non-discrimination, enfin l'avis de publicité ou le règlement de la consultation doivent les mentionner. Les critères sociaux choisis doivent ainsi permettre d'évaluer la qualité des prestations et non pas permettre l'exclusion arbitraire de certaines offres. L'acheteur doit donc être capable de justifier la pertinence de ses critères pour le choix des offres. L'utilisation du critère des « performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté » pour exclure les entreprises ayant recours au CNE (contrat nouvelle embauche) des marchés publics est ainsi de nature à fonder une action précontentieuse ou contentieuse pouvant aboutir à l'arrêt de la procédure de passation d'un marché ou à l'annulation d'un marché déjà signé. À cet égard, il convient de noter que, suite au référé du préfet de la Gironde, le tribunal administratif de Bordeaux a suspendu l'exécution de la délibération du conseil municipal de la commune de Bègles, prise le 6 avril dernier, par la mairie de Bègles dans le but d'exclure de ses marchés publics les entreprises qui avaient recours au contrat nouvelle embauche (CNE). En effet, le tribunal administratif a considéré que la non-conformité de la délibération litigieuse au code des marchés publics, notamment en son article 53, et l'atteinte portée par cette délibération aux principes de libre concurrence et d'égal accès des candidats à la commande publique étaient, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de l'acte litigieux. De même, il a jugé que la commune était incompétente pour décider de mesures qui ont pour objet ou pour effet de faire échec, sur son territoire, à l'application de mesures de nature législative. (cf. Tribunal administratif de Bordeaux, ordonnance du 15 juin 2006, n° 0602049, préfet de la Gironde contre commune de Bègles). Il convient enfin de préciser que de telles exclusions pourraient être invoquées à l'appui de plaintes déposées sur le fondement de l'article 432-14 du code pénal pour octroi d'avantage injustifié.
Auteur : M. Pierre Cardo
Type de question : Question écrite
Rubrique : Emploi
Ministère interrogé : emploi, travail et insertion professionnelle des jeunes
Ministère répondant : économie
Dates :
Question publiée le 11 avril 2006
Réponse publiée le 25 juillet 2006