fonctionnement
Question de :
Mme Chantal Robin-Rodrigo
Hautes-Pyrénées (2e circonscription) - Socialiste
L'école est l'ascenseur social en panne. En effet, à l'issue du second conflit mondial, les élites issues des grands corps techniques (Polytechnique, les Mines, etc.) et de la nouvelle ENA, créée en 1946, se sont senties mobilisées comme instituteurs du redressement d'un pays démoralisé et ruiné, sur le modèle du New Deal américain et du plan soviétique. Le pouvoir politique, affaibli par le parlementarisme de la Constitution de 1946, laisse agir les technocrates, parce qu'eux restent en poste si les ministères valsent. S'organise une économie concertée, où un secteur nationalisé, mené par une caste issue des grandes écoles, agit comme « vitrine sociale » et « modèle de productivité » sur un privé délégitimé et sans moyens ni volonté. Or ce qui était vrai au sortir de la guerre ne l'est plus en 2006. Nous nous trouvons désormais avec une France républicaine aux fétides relents monarchistes, dirigée par une caste issue de grandes écoles dont l'accès n'est permis qu'à une infime frange de la population, laquelle n'a jamais mis « les mains dans le cambouis » et ainsi jaugé les difficultés et « être monté au front » sur le terrain avant de prendre son premier poste de haut fonctionnaire. Un bon ferment pour produire de la technocratie décalée des réalités, donc ! Il n'est donc pas étonnant, in fine, que le fossé avec « la France d'en bas » comme certains se sont plu à le dire soit aussi vive et profonde, donnant même à cette dernière la désagréable impression que la haute fonction publique est née « avec une cuillère d'argent dans la bouche » et ne sait même pas, par exemple, ce que c'est que de vivre sous le seuil de pauvreté ! L'exaspération est grande, et il est donc plus qu'urgent de rénover le processus de nomination dans la haute fonction publique et d'avancement au sein de cette dernière. À ce sujet, il semblerait enfin pragmatique de relancer l'ascenseur républicain au mérite en la matière, et ceci sur la base d'une carrière diversifiée et des services rendus au plus près des réalités de terrain, et non sur la seule base d'une entrée directe dans une grande école sans être passé par la case « expérience préalable du terrain » comme actuellement. En conséquence, Mme Chantal Robin-Rodrigo demande désormais à M. le ministre de la fonction publique de lui indiquer ses intentions en la matière.
Réponse publiée le 11 juillet 2006
La promotion de l'égalité des chances et la diversification des profils qui composent l'encadrement supérieur de l'État sont deux objectifs de premier rang pour l'action du Gouvernement, comme le Président de la République a eu l'occasion de le souligner dans ses voeux aux fonctionnaires et agents de l'État (discours de Metz du 6 janvier 2006). En la matière, des efforts importants ont déjà été consentis. Le ministère de la fonction publique et l'École nationale d'administration (ENA) développent, depuis plusieurs années, une politique ambitieuse de promotion de l'égalité des chances, que ce soit en aidant financièrement les centres de préparation aux concours administratifs ou en organisant, dans le cas du concours interne ou du troisième concours, des cycles de préparation ad hoc. En outre, l'ENA a été l'une des premières écoles pour laquelle a été créé un « troisième concours », ouvert aux personnes justifiant de l'exercice, durant huit années au total, d'une ou plusieurs activités professionnelles ou d'un ou plusieurs mandats de membre d'une assemblée élue d'une collectivité territoriale : depuis plusieurs années, cette voie représente près de 10 % des élèves recrutés en son sein. Le Président de la République a de plus souhaité, à l'occasion de ses voeux aux fonctionnaires et agents de l'État du 6 janvier 2006, que des réflexions spécifiques soient conduites en vue de la création de deux nouvelles voies d'accès au sein de l'encadrement supérieur de l'État, qui auraient vocation à l'ouvrir aux profils qui y sont insuffisamment représentés, issus par exemple du monde universitaire ou du secteur privé. Une mission a été confiée par le Premier ministre à M. le conseiller d'État Marcel Pochard avec le mandat de réfléchir à la faisabilité et aux modalités de mise en application de ces nouvelles voies d'accès. Ses conclusions sont attendues avant le 30 juin 2006 et seront examinées par le Gouvernement, afin de leur donner toutes les suites appropriées. Parallèlement, le Gouvernement a décidé de mettre en place un secrétariat général de l'administration qui aura notamment pour tâche de promouvoir l'égalité des chances dans l'accès aux plus hautes fonctions de l'État. En outre, au-delà des enjeux de diversification des profils recrutés, des mesures ont été prises afin de faciliter la promotion des fonctionnaires et agents de l'État les plus méritants au sein des corps de l'encadrement supérieur : conformément à la communication en conseil des ministres du 22 octobre 2003 relative à l'encadrement supérieur de l'État, la proportion des nominations par la voie des tours extérieurs a été élargie, notamment pour le corps des administrateurs civils ; la condition d'âge maximale requise pour candidater au concours interne de l'École nationale d'administration a, par ailleurs, été assouplie, passant de trente-cinq à quarante ans. Enfin, la scolarité au sein de l'École nationale d'administration a été profondément réformée en décembre 2005, afin que le cursus des élèves soit encore plus résolument orienté vers les expériences de terrain. La scolarité s'articule désormais autour de quatre stages d'application, en préfecture, dans les institutions européennes, en entreprise et en administration centrale, dont deux durent près de six mois. Ces expériences de terrain, nombreuses et diversifiées, permettront ainsi de former des hauts fonctionnaires responsables, proches des préoccupations des citoyens et des administrés et animés par un souci constant de simplification administrative, d'efficacité et de qualité de service.
Auteur : Mme Chantal Robin-Rodrigo
Type de question : Question écrite
Rubrique : État
Ministère interrogé : fonction publique
Ministère répondant : fonction publique
Dates :
Question publiée le 25 avril 2006
Réponse publiée le 11 juillet 2006