passation
Question de :
M. Jean-Louis Bianco
Alpes-de-Haute-Provence (1re circonscription) - Socialiste
M. Jean-Louis Bianco attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur l'ordonnance n° 2005-645 du 6 juin 2005. Celle-ci a introduit un nouvel article L. 3221-11-1 au code général des collectivités territoriales leur permettant avant l'engagement d'une procédure de passation d'un marché public d'autoriser l'exécutif sur autorisation de l'assemblée délibérante à signer le marché à intervenir dès lors que l'étendue du besoin à satisfaire et le montant prévisionnel du marché figurent sur la délibération. La circulaire du 6 juin 2006 précisant la portée de ce nouveau dispositif indiquait, s'agissant de l'indication du montant prévisionnel du marché que cette évaluation devait être établie avec la plus grande sincérité et rigueur. Elle faisait valoir que l'indication d'un montant prévisionnel sans commune mesure avec le montant final du marché pouvait être de nature à vicier la procédure et la validité du marché en cas de contentieux. En outre, elle mentionnait qu'une évaluation précise était d'autant plus importante qu'elle ne manquerait pas d'être prise en considération par les candidats et qu'à défaut le risque de gonflement artificiel des prix n'était pas à négliger. Or, s'il peut être souhaitable de s'assurer que le financement d'un marché soit bien réuni avant le lancement de la consultation, en faisant figurer dans l'autorisation de l'assemblée délibérante le montant des crédits ouverts ou de l'autorisation de programme permettant son engagement, il est à craindre que l'indication du montant prévisionnel du marché fausse les résultats de la consultation. Le Conseil d'État dans son arrêt du 1er juin 2005 n° 27053, département de la Loire, concernant l'indication du montant prévisionnel du marché dans les avis d'appel à la concurrence des marchés publics, a clairement indiqué qu'aucune disposition du code des marchés publics, ni aucune règle ne mettait à la charge de la personne responsable du marché une obligation de publicité quant au montant prévisionnel du marché. Les commentaires qui ont suivi cet arrêt indiquaient qu'il était normal de ne pas faire figurer un tel montant dans l'avis d'appel public à la concurrence, sous peine de ne pas faire jouer au maximum la concurrence sur les prix entre les différentes offres. Ils ajoutaient qu'il était déconseillé de faire délibérer une assemblée sur un tel montant prévisionnel. Au surplus, l'indication du montant prévisionnel non seulement peut instaurer des effets anticoncurrentiels, car les entreprises peuvent établir leur offre sur ce montant, mais aller également à l'encontre des objectifs de protection des deniers publics. Ainsi, il peut paraître paradoxal, que six jours après la publication de cet arrêt, l'indication du montant prévisionnel d'un marché dans la délibération amont soit rendue obligatoire par ordonnance et inscrit comme tel dans le CGCT Il a dans ses réponses précédentes, fait valoir qu'il restait possible aux collectivités de délibérer dès lors que l'attributaire du marché et le montant étaient connus, ce qui évitait d'avoir à mentionner le montant prévisionnel du marché. Or le dispositif de délibération préalable à la consultation a été validé par le législateur pour répondre aux effets de la jurisprudence commune de Montélimar qui en obligeant les collectivités à prendre leur délibération après que la Commission d'appel d'offres ait attribué le marché, avec l'indication du montant du marché et le nom de l'attributaire, avait conduit à un alourdissement des procédures et considérablement ralenti le lancement des opérations. Il semble ainsi peu opportun de remettre en cause cet apport de l'ordonnance du 6 juin 2005. Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître quelles mesures il compte prendre pour que l'indication du montant prévisionnel du marché ne soit plus obligatoire dans la délibération avant l'engagement de la procédure de passation.
Réponse publiée le 24 octobre 2006
Les dispositions introduites dans le code général des collectivités territoriales par l'ordonnance n° 2005-645 du 6 juin 2005 avaient notamment pour vocation de mettre un terme aux divergences d'interprétation de la portée de la jurisprudence dite « commune de Montélimar ». Selon certaines interprétations, le juge administratif ne faisait que confirmer que la seule délibération utile pour permettre la souscription d'un marché était celle qui intervenait une fois les éléments essentiels du marché connus, à l'issue de la procédure, étant entendu que la délibération préalable à l'engagement de la procédure n'était nullement imposée par les textes. Pour d'autres, le juge administratif établissait l'obligation d'une double délibération, alourdissant ainsi considérablement les conditions d'engagement et de conclusion des marchés des collectivités territoriales. Le nouveau dispositif établit qu'une seule délibération est nécessaire, celle-ci pouvant intervenir soit en amont de la procédure, soit à l'issue de la procédure. Il n'a pas pour objectif de revenir sur le principe dégagé par la jurisprudence « commune de Montélimar » selon lequel l'assemblée délibérante ne saurait se prononcer sans disposer des éléments essentiels permettant d'éclairer sa décision. Ainsi, lorsque la délibération intervient à l'issue d'une procédure de passation de marché public, les éléments essentiels sont le nom du titulaire et le montant exact du marché. Lorsqu'elle est prise avant l'engagement de la procédure, les principaux éléments disponibles sont le besoin à satisfaire et l'estimation du montant du marché. La publication de ce dernier élément donne effectivement une indication sur les sommes provisionnées par la collectivité pour satisfaire le besoin qu'elle a identifié. Toutefois, dans la mesure où l'évaluation du montant prévisionnel se fait avec la plus grande sincérité et d'une manière réaliste prenant objectivement en compte des prix pratiqués dans le secteur concerné, l'effet induit tant à la hausse qu'à la baisse sur les propositions présentées devrait être marginal. Il peut être enfin signalé que la question du contenu minimal de la délibération préalable a été abordée dans le cadre de la concertation engagée avec les associations d'élus locaux à l'occasion de l'élaboration de l'ordonnance à l'origine des dispositions contestées par l'honorable parlementaire. L'indication du montant prévisionnel participe du souci de ne pas mettre l'exécutif local dans la situation d'engager sa collectivité dans des relations contractuelles à incidence financière sans en avoir préalablement informé l'assemblée délibérante, organe souverain en matière budgétaire.
Auteur : M. Jean-Louis Bianco
Type de question : Question écrite
Rubrique : Marchés publics
Ministère interrogé : intérieur et aménagement du territoire
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Dates :
Question publiée le 27 juin 2006
Réponse publiée le 24 octobre 2006