pauvreté
Question de :
M. Francis Saint-Léger
Lozère (1re circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
M. Francis Saint-Léger appelle l'attention de Mme la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité au sujet de l'évolution de la pauvreté dans notre pays. Il désire en connaître l'évolution au cours des dix dernières années.
Réponse publiée le 7 novembre 2006
La mesure de la pauvreté est largement tributaire des indicateurs retenus. Or il n'existe pas de définition unique et consensuelle de ce phénomène, compte tenu de ses multiples dimensions. La seule définition « officielle » est celle retenue par l'Union européenne qui considère comme pauvre « les personnes dont les ressources matérielles, culturelles et sociales sont si faibles qu'elles sont exclues des modes de vie minimaux acceptables dans l'État membre où elles vivent » (conseil des ministres européen du 19 décembre 1984). Ainsi, l'Union européenne retient un indicateur de pauvreté monétaire appelé « seuil de pauvreté ». Celui-ci s'attache aux personnes dont le niveau de vie est inférieur à un montant donné, mesuré au seuil de 60 % du revenu médian de l'ensemble de la population. Cette définition fait apparaître trois éléments importants pour la mesure de la pauvreté : la définition de la pauvreté est conventionnelle ; il s'agit d'un phénomène relatif (puisque défini en fonction des « modes de vie minimaux acceptables » par essence variable dans l'espace et dans le temps) ; la pauvreté est également un phénomène multidimensionnel, ce qui implique de s'intéresser à d'autres dimensions du bien-être que les seules ressources monétaires (logement, santé, éducation...). Parmi ces différents types d'indicateurs de la pauvreté, celui concernant la pauvreté monétaire ainsi que celui mesurant la pauvreté par le recensement du nombre des allocataires des principaux minima sociaux (et principalement du RMI) sont particulièrement utilisés. Le rapport a fait apparaître une baisse continue depuis une trentaine d'années du taux de pauvreté monétaire calculé au seuil de 60 % du revenu médian (celui-ci est passé de 17,09 % à 12,0 % entre 1970 et 2003). Il était de 13,5 % au milieu des années 1990. Au total en 2003, environ 7 millions de personnes étaient considérées pauvres selon la définition retenue par l'Union européenne. Un phénomène quelque peu différent peut être observé au seuil de 50 % du revenu médian. En 1970, le taux de pauvreté monétaire, ainsi mesuré, était en effet de 12 %, alors qu'il n'était plus que de 6,9 % en 1997, soit une diminution de quasiment la moitié. Il est ensuite resté relativement proche de ce seuil pour atteindre 5,9 % en 2002. Depuis la fin des années 90, le nombre de pauvres mesurés au seuil de 50 % serait ainsi resté relativement stable, passant d'environ 3 600 000 en 1999 à environ 3 400 000 en 2002. Les évolutions constatées entre 2002 et 2003 (dernière année disponible) marquent une tendance également différenciée selon que l'on retiendra l'un ou l'autre de ces indicateurs. Entre ces deux dates, le taux de pauvreté monétaire calculé au seuil de 60 % est resté stable à 12 %. Par contre, celui calculé au seuil de 50 % est passé de 5,9 % à 6,3 %, soit une légère augmentation de 0,4 point. Les résultats au titre de 2004 (issus de l'enquête sur les revenus fiscaux réalisée par l'INSEE, tributaire des remontées de la DGI) ramènent ce taux à 6,2 % en 2004. Selon les études les plus récentes, le taux de pauvreté monétaire est passé de 11,7 % en 2004 à 60 %, ainsi la légère hausse du taux de pauvreté au seuil de 50 % enregistrée entre 2002 et 2003 semble donc avoir été transitoire. C'est pourquoi l'Observatoire de la pauvreté et de l'exclusion sociale, dans son dernier rapport, a actualisé ces deux types d'indicateurs. Une autre indication concernant la tendance plus récente peut être observée à partir du nombre d'allocataires du RMI. Les dernières données disponibles montrent en effet une baisse du nombre de personnes effectivement payées à ce titre. Celui-ci a diminué de 0,8 % au premier trimestre 2006 (données corrigées des variations saisonnières), quand bien même sur douze mois l'évolution est encore celle d'une augmentation de 3,9 % par rapport au premier trimestre 2005. Après trois ans et demi de hausse ininterrompue, l'amélioration constatée au premier trimestre 2006 reflète l'impact de la baisse du chômage intervenue depuis mai 2005, ainsi que la montée en charge des dispositifs d'emplois aidés ciblés sur les allocataires des minima sociaux et pourrait constituer un indicateur avancé d'un retour de l'évolution des indicateurs de pauvreté à leur tendance de moyen terme. Pour tenir compte des multiples dimensions des phénomènes de pauvreté, l'Observatoire a également souhaité, dans son dernier rapport, relativiser l'importance du taux de pauvreté monétaire et mieux appréhender dans leur globalité toutes les situations de pauvreté. Il a donc proposé de fonder ses observations de l'évolution de la pauvreté sur onze indicateurs centraux. Ont ainsi été retenus les indicateurs suivants : en conformité avec les recommandations de l'Union européenne, le taux de pauvreté monétaire correspondant à 60 % du revenu médian. Il a néanmoins été décidé de compléter cet indicateur par une mesure du taux de pauvreté à 50 % du revenu médian (tel que précédemment suivi par l'Observatoire). La mesure de l'intensité de la pauvreté (écart entre le revenu moyen des ménages pauvres et le seuil de pauvreté à 60 %) permettra d'apporter une information supplémentaire sur la répartition des revenus des personnes pauvres ; un indicateur de pauvreté en emploi, qui représente la part des individus en emploi vivant dans un ménage dont le revenu est inférieur à 60 % du revenu médian ; un indicateur de pauvreté en conditions de vie qui est la résultante de vingt-sept paramètres ayant trait, par exemple, aux contraintes budgétaires, aux retards de paiement, aux restrictions de consommation et aux difficultés de logement ; compte tenu des liens entre la pauvreté et les inégalités, un indicateur d'inégalité de revenu a également été retenu. Deux autres indicateurs ont par ailleurs trait aux minima sociaux : l'évolution annuelle du nombre d'allocataires de minima sociaux d'âge actif est un indicateur de nature conjoncturelle ; le taux de persistance dans le RMI mesure la part des allocataires qui en bénéficient depuis plus de trois ans. Quatre autres indicateurs sont enfin destinés à mesurer les phénomènes d'exclusion : le taux de renoncement aux soins pour raisons financières ; le taux de sortants du système scolaire à faible niveau d'études ; le taux de demandeurs d'emploi non indemnisés par le régime d'assurance ; la part de demandes de logement social non satisfaites après un an. Le tableau suivant présente la série de ces différents indicateurs sur les dix dernières années : onze indicateurs « centraux » de la pauvreté et de l'exclusion. Tous les indicateurs sont exprimés en pourcentage. Ils ne concernent que la France métropolitaine.
1995 | 1996 | 1997 | 1998 | 1999 | 2000 | 2001 | 2002 | 2003 | 2004 | |
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Pauvreté | ||||||||||
Taux de pauvreté : part des individus vivant dans un ménage dont le revenu est inférieur à 60 % de la médiane | 13,5 | 13,4 | 12,8 | 12,3 | 12,7 | 12,4 | 12,2 12,0* | 12,0 | 11,7 | |
Dont part des individus vivant dans un ménage dont le revenu est inférieur à 50 % de la médiane | 7,2 | 6,9 | 6,7 | 6,4 | 6,5 | 6,1 | 6,0 5,9* | 6,3 | 6,2 | |
Intensité de la pauvreté (écart entre le revenu moyen des ménages pauvres et le seuil de pauvreté à 60 % de la médiane) | 23,0 | 22,2 | 20,9 | 20,7 | 20,5 | 20,3 | 19,5 19,6* | 20,1 | ||
Taux de pauvreté de la population en emploi : part des individus en emploi vivant dans un ménage dont le revenu est inférieur à 60 % de la médiane | 7 | 7 | 7 | 7 | 7 | 8 | 5,4** | |||
Taux de difficultés de conditions de vie | 13,1 | 12,0 | 11,9 | 12,1 | 11,6 | 11,8 | 11,5 | 10,6 | ||
Minima sociaux | ||||||||||
Évolution du nombre d'allocataires de minima sociaux d'âge actif (RMI, AAH, API, ASS) | 5,2 | 1,9 | 2,6 | 1,8 | -3,4 | -1,6 | 0,6 | 2 | 4,6 | |
Persistance dans le RMI (présence supérieure à 3 ans) | 35,4 | 37,5 | 39,4 | 40,7 | 43,2 | 47,2 | 48,9 | 48,7 | 47,0 | 44,9 |
Non-accès aux droits fondamentaux | ||||||||||
Taux de renoncement aux soins pour raisons financières | 17,0 | 14,0 | 14,0 | 15,7 | 11,2 | |||||
Taux de sortants du système scolaire à faible niveau d'études | 15,4 | 15,2 | 14,1 | 14,9 | 14,7 | 13,3 | 13,5 | 13,4 | 13,7 | 14,2 |
Taux de demandeurs d'emploi non indemnisés (RAC et ASS) | 43,4 | 44,7 | 46,4 | 46,24 | 46,2 | 44,3 | 39,9 | 36,5 | 36,1 | 38,5 |
Part des demandes de logement social non satisfaites après un an | 35,3 | 33,6 | ||||||||
Inégalités de revenu | ||||||||||
Rapport interdéciles | 3,35 | 3,34 | 3,26 | 3,23 | 3,27 | 3,23 | 3,2 3,21* | 3,17 | ||
(*) Changement de série, les données 2002 ont été recalculées en s'appuyant sur le résultat annuel du recensement de la population. (**) L'indicateur et les sources utilisées à compter de 2003 pour mesurer le phénomène des travailleurs pauvres ont été modifiés. |
Auteur : M. Francis Saint-Léger
Type de question : Question écrite
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : cohésion sociale et parité
Ministère répondant : cohésion sociale et parité
Dates :
Question publiée le 11 juillet 2006
Réponse publiée le 7 novembre 2006