Question au Gouvernement n° 1204 :
lutte contre l'exclusion

12e Législature

Question de : M. Jean Le Garrec
Nord (12e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 3 mars 2004

LUTTE CONTRE LA PRÉCARITÉ

M. le président. La parole est à M. Jean Le Garrec, pour le groupe socialiste.
M. Jean Le Garrec. Monsieur le Premier ministre, de toute la France s'élève un cri d'angoisse (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) face à la montée de la précarité et de la pauvreté. Interrogée à ce sujet, la secrétaire d'Etat à la lutte contre la précarité et l'exclusion, Mme Versini, répond toujours la même chose : premièrement, que la loi de 1998 de Mme Aubry est une « bonne loi » - d'ailleurs cette grande dame qu'est Mme Geneviève Anthonioz-de Gaulle allait jusqu'à la qualifier de « grande loi » -, ...
M. Patrick Ollier. Ce n'est pas vrai !
M. Jean Le Garrec. ... deuxièmement, que cette loi n'est pas appliquée. Je réfute totalement ces propos.
Mme Chantal Robin-Rodrigo. Elle n'y connaît rien ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean Le Garrec. Nous avons toujours su qu'une loi ne réglerait pas tous les problèmes, surtout lorsque son application met en jeu des dizaines de milliers d'acteurs au sein des collectivités, CCAS, associations, administrations.
Nous avons suivi au plus près l'application de cette loi : rapports de l'IGAS de 2001, de 2002 et du 8 mars 2003, mission de Mme Mignon sur les emplois-jeunes, adoption à l'initiative de Mme Guigou d'un collectif budgétaire en 2001 comportant 2,5 milliards pour la lutte contre l'exclusion, dont 500 000 euros au profit du parcours TRACE. Toutefois, la réalité, monsieur le Premier ministre, c'est que, depuis deux ans, méthodiquement, vous détruisez tous les outils que nous avions mis en place. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La politique de santé, la péréquation sont abandonnées. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Monsieur Le Garrec, veuillez poser votre question !
M. Jean Le Garrec. Je vais la poser, monsieur le président.
Le rapport TRACE est en sommeil. On ne compte que quelques centaines de CIVIS. Les 30 000 demandeurs d'emplois qui ne sont plus comptabilisés dans les statistiques nationales se retrouvent dans celles des CCAS. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Monsieur Le Garrec, auriez-vous l'obligeance de poser votre question ?
M. Jean Le Garrec. J'y viens, monsieur le président.
Monsieur le Premier ministre, pour que vous soyez bien informé, je vais vous faire passer un dossier très précis sur la politique d'abandon social de votre gouvernement. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
Face à la situation actuelle, votre seule réponse a été une réunion interministérielle... en octobre. (« La question ! La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Monsieur Le Garrec, votre question !
M. Jean Le Garrec. Monsieur le Premier ministre, quelles sont les mesures d'urgence que vous comptez prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Augustin Bonrepaux. La question était posée à M. le Premier ministre !
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur Le Garrec, j'ai, vous le savez, beaucoup de respect pour vous. C'est pourquoi la manière dont vous avez posé votre question me fait de la peine. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Augustin Bonrepaux. On ne dirait pas !
M. le ministre des affaires sociale, du travail et de la solidarité. Sur un sujet comme celui de la pauvreté, tous les groupes politiques de cette assemblée devraient réfléchir à leurs responsabilités. La vérité, c'est que la pauvreté augmente régulièrement dans notre pays depuis plusieurs années.
M. Christian Bataille. Grâce à vous !
M. Jean-Claude Thomas. Surtout avec la gauche !
M. Augustin Bonrepaux. Non : à cause de la droite !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Un rapport récent a d'ailleurs montré que la pauvreté chez les enfants avait progressé de manière spectaculaire en 1999 et 2000.
M. Alain Néri. C'est insupportable !
M. Augustin Bonrepaux. Répondez à la question !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Si je cite ce rapport, ce n'est pas pour fuir mes responsabilités en tant que membre du Gouvernement, mais pour vous appeler à avoir un peu plus d'humilité et à faire vous-mêmes votre autocritique sur la politique que vous avez conduite. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
En effet, si la pauvreté augmente, cela découle non pas des réformes engagées par le Gouvernement, mais du fait, pendant trop longtemps, de l'absence de réforme. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean Marsaudon. C'est vrai !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Le statu quo, la défense des avantages acquis, la panne de l'ascenseur social ont provoqué dans notre pays une augmentation de l'exclusion. (Mêmes mouvements.) Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin s'est attaqué courageusement aux réformes nécessaires pour lever ces blocages et pour donner à la société française une plus grande fluidité de manière à remettre en marche l'ascenseur social. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. Jean-Pierre Kucheida. Vous faites la politique du MEDEF !
M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Je ne donne de leçons à personne. Ces réformes sont difficiles et ne donneront des résultats que progressivement.
Monsieur le député, nous avons pris, sans attendre, les mesures nécessaires pour que le filet de solidarité ne cède pas. C'est la raison pour laquelle nous avons augmenté, l'an passé, de 210 millions d'euros l'aide à l'hébergement d'urgence et à la lutte contre la précarité. C'est également la raison pour laquelle nous avons fait voter par le Parlement une réforme du surendettement qui aura des effets très importants en matière de réduction de la pauvreté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
C'est enfin la raison pour laquelle nous avons voulu augmenter les bas salaires : le SMIC aura été revalorisé de 11,4 % en trois ans hors inflation. Vous ne pouvez pas ne pas vous interroger sur l'impact de votre politique salariale sur l'augmentation de la pauvreté.
La loi sur l'exclusion pose, bien sûr, des problèmes d'application, monsieur Le Garrec. J'ai réuni, il y a quelques jours, l'ensemble des associations qui luttent contre l'exclusion. Elles reconnaissent toutes qu'il y a des problèmes de mise en oeuvre de ce texte qui était souvent plus déclamatoire qu'efficace. C'est pourquoi le Premier ministre a l'intention de réunir au printemps un conseil national de lutte contre l'exclusion pour voir comment améliorer la loi de 1998. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Jean Le Garrec

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique sociale

Ministère interrogé : affaires sociales, travail et solidarité

Ministère répondant : affaires sociales, travail et solidarité

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 3 mars 2004

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