politique de l'emploi
Question de :
M. Éric Besson
Drôme (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 28 avril 2004
CHÔMAGE
M. le président. La parole est à M. Éric Besson, pour le groupe socialiste.
M. Henri Emmanuelli. Enfin la lumière !
M. Eric Besson. Monsieur le Premier ministre, je souhaite vous faire part de l'inquiétude de nos concitoyens, celle en particulier des députés socialistes et de gauche, face à la dégradation de la situation de l'emploi. L'INSEE indique que fin 2003, le chômage touchait 2,7 millions de personnes, soit 9,9 % de la population active. Depuis votre arrivée au pouvoir, la France compte 250 000 chômeurs de plus.
M. Jean-Claude Abrioux. La faute à qui ?
M. Eric Besson. Ce lourd échec est d'abord celui d'une politique économique et financière à la fois inefficace et injuste. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Cessez donc, monsieur le Premier ministre, de vous abriter derrière l'absence de croissance mondiale, car celle-ci a repris, et même si elle est encore modeste, elle est plus forte en Europe qu'en France.
Cet échec est aussi la conséquence mécanique, prévisible, que nous avions annoncée et dénoncée ici même, du démantèlement par votre gouvernement des politiques actives de l'emploi. Ce démantèlement n'est sans doute pas achevé. Comme nous l'avions prévu, vous avez attendu que les élections régionales soient passées pour annoncer des gels très importants de dépenses publiques. Ainsi le ministre des finances a-t-il demandé au ministre du travail d'économiser 556 millions d'euros - je cite la lettre de M. Sarkozy à M. Borloo - « sur le financement de la formation professionnelle ou sur les dispositifs d'insertion des publics en difficulté » (« Scandaleux ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
Ma question est la suivante : en matière de lutte contre le chômage, quand votre gouvernement va-t-il sortir de sa léthargie, prendre acte de son échec, et sortir du flou de sa stratégie ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avez-vous une politique de l'emploi, monsieur le Premier ministre, et si oui, laquelle ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, vous nous avez posé une question. Permettez-moi de vous répondre par une autre question. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Claquements de pupitres sur plusieurs bancs de ce groupe.)
M. le président. Allons, mes chers collègues !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il y a quinze jours, le groupe socialiste prenait à témoin l'Assemblée nationale, accusant le Gouvernement de laisser filer les déficits, et exigeant un audit. Aujourd'hui, le même groupe socialiste nous reproche de vouloir résorber les déficits par la régulation. Où est la cohérence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En quinze jours, vous venez développer devant la représentation nationale deux idées parfaitement contradictoires. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mais il y a mieux. La régulation est un acte normal de la vie démocratique et parlementaire. Le Parlement a autorisé le Gouvernement à dépenser un certain nombre de milliards d'euros pour faire fonctionner les services publics. Le Premier ministre a pris un engagement, et il sera tenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous ne dépenserons pas un euro de plus que ce que la représentation nationale nous a autorisé à dépenser (« Ce n'est pas la question ! » sur les bancs du groupe socialiste), tranchant en cela avec le laxisme des années socialistes. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Enfin, et ce n'est pas la moindre de vos contradictions, vous vous offusquez de la régulation budgétaire, alors que vous l'avez vous-mêmes pratiquée en 1999, le 19 août pour être précis, dans l'opacité la plus totale.
M. Maxime Gremetz. Allons, allons !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous avez alors opéré 1,1 milliard de régulation budgétaire sur les crédits de l'emploi. Mais ce n'est pas tout : vous avez recommencé en 2000 et en 2001.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Répondez sur le chômage !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'y viens. La vérité, c'est que vous avez imposé à l'économie française des verrous à l'emploi qui n'existent nulle part ailleurs dans le monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Si la situation de l'emploi n'est pas bonne en France, c'est parce que vous n'avez que le mot « social » à la bouche. Vous êtes responsables du fait que la France est plus exposée au chômage que les autres pays. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) J'étais dernièrement à Washington, où je me suis entretenu avec le ministre anglais des finances, un socialiste, et je peux vous assurer qu'il n'a pas eu de mots assez durs pour condamner les 35 heures et votre bilan (Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire se lèvent et applaudissent longuement. - Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. S'il vous plaît ! Ecoutez la réponse du ministre !
M. le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Finalement, il vaut mieux être socialiste en Angleterre qu'en France ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. M. Henri Emmanuelli se lève et apostrophe M. le ministre d'Etat.)
M. le président. Monsieur Emmanuelli, je vous demande de vous asseoir !
Auteur : M. Éric Besson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Emploi
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 28 avril 2004