déficits publics
Question de :
M. Gérard Bapt
Haute-Garonne (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 24 juin 2004
DÉFICITS PUBLICS
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt. (" Ah ! " sur les bancs du groupe socialiste.)M. Jean-Marie Le Guen. On va enfin entendre des vérités, ici !
M. le président. Monsieur Le Guen !
M. Gérard Bapt. Monsieur le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, vous vous êtes engagé, au nom du Gouvernement, à ramener les comptes publics sous la barre des 3 % de déficit en 2005. le rapport d'orientation budgétaire montre que vos prévisions supposent notamment le retour à l'équilibre des comptes de l'assurance maladie. Il est vrai que le projet relatif à l'assurance maladie comporte un volet financier, qui vise au retour à l'équilibre en 2007 en partant d'un déficit de quatorze milliards d'euros cette année.
Mais ce volet est constitué pour les deux tiers d'économies totalement aléatoires : je pense en particulier à celles qui découleraient de la mise en place d'un dossier médical partagé, qui coûtera dans un premier temps plusieurs centaines de millions d'euros. De plus, tous les spécialistes s'accordent à dire qu'il ne saurait être généralisé dès 2007.
M. Jean-Marie Le Guen. Bien sûr !
M. Gérard Bapt. Comment pouvez-vous dans de telles conditions assumer, en tant que ministre de l'économie et des finances, les engagements européens du gouvernement auquel vous appartenez ?
Vous avez également déclaré que vous vouliez gérer les finances " en bon père de famille ". À l'occasion du futur débat d'orientation budgétaire, vous rappelez en effet la nécessité d'une meilleure maîtrise de la dette. Comment donc, monsieur le ministre de l'économie et des finances, pouvez-vous accepter, " en bon père de famille ", de voir reporter, au travers du mécanisme de la CADES, sur nos enfants et nos petits-enfants le poids de la dette actuelle de l'assurance maladie, encore aggravée de celle à venir, pour un montant d'au moins cinquante milliards d'euros. ? (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Augustin Bonrepaux. Sacré père de famille !
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et vous, qu'avez-vous fait ?
M. Gérard Bapt. Mes interrogations sont précises, monsieur le ministre. Alors, je vous en prie, ne nous faites pas pour la énième fois le coup de l'héritage ! (" Si ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La dette qui doit être reportée sur nos enfants représente en effet cinq fois le coût, selon vous, de la mise en place des 35 heures - sauf que vous oubliez les effets bénéfiques de cette réforme. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Lesquels ?
M. Pierre Lellouche. Il n'y en a pas !
M. Gérard Bapt. En clair, monsieur le ministre, je vous demande de me répondre sérieusement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. On se calme, monsieur Fromion !
La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je ne sais pas si ma réponse vous conviendra, mais je vous garantis qu'elle va être sérieuse.
M. François Hollande. Si vous êtes capable de vous contenir !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Parlons de l'objectif de 3 % de déficit.
M. François Hollande. Vous ne l'atteindrez pas !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ce n'est pas l'Europe qui nous l'impose, c'est le bon sens : la France ne peut pas continuer à dépenser plus qu'elle ne gagne !
M. François Hollande. C'est pourtant ce qu'elle fait !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Deuxièmement, monsieur Bapt, il y a deux bonnes nouvelles, qui sont liées : comme vient de l'indiquer Dominique Bussereau, la croissance est meilleure, et, comme chacun sait, quand la croissance s'améliore, les rentrées fiscales s'améliorent aussi. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Didier Migaud. Et le déficit aussi, apparemment !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est un élément qui ne me paraît pas prêter à polémique, et vous devriez même vous en réjouir. Puisque vous stigmatisez le Gouvernement quand les rentrées fiscales ne sont pas bonnes, je suis sûr que, aujourd'hui qu'elles sont bonnes, vous saurez l'en féliciter, avec toute l'honnêteté intellectuelle que l'on vous connaît.
Il y a un troisième élément à prendre en compte, et je m'étonne que vous n'en ayez pas parlé. La réforme des retraites, que François Fillon et Jean-Pierre Raffarin ont eu le courage d'engager,...
M. Augustin Bonrepaux. Financée comment ?
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...pèse sur le déficit pour moins de 0,5 point de PIB.
M. Julien Dray. Normal ! Ce sont les salariés qui paient !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je n'aurai pas, monsieur Dray, la cruauté de vous faire remarquer que cette réforme qu'a su mener à bien Jean-Pierre Raffarin, vous, vous l'avez rêvée, nous, nous l'avons faite ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean-Louis Bianco. Tartarinade !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Quatrième remarque : j'avoue avoir du mal à vous suivre. Il y a quelques semaines, nous avons, avec Dominique Bussereau, présenté des régulations budgétaires : vous n'avez eu de cesse, mardi après mardi, mercredi après mercredi, de dénoncer cette politique de rigueur. Alors, mettez-vous d'accord avec vos contradictions.
M. François Hollande. Vous qui parlez de nos contradictions, parlez-nous plutôt des promesses de baisses d'impôts !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Si vous nous reprochez le déficit, c'est qu'on dépense trop ; mais si vous stigmatisez la rigueur budgétaire, c'est qu'on ne dépense pas assez ; en tous les cas, ce qui est avéré, c'est l'incohérence du parti socialiste ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. François Hollande. Et les baisses d'impôts ?
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Et je ne parle pas là du bilan : je parle du présent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je terminerai par la réforme de l'assurance maladie. libre à vous de ne pas y croire, libre à vous de faire fi de dix milliards d'économies...
M. Augustin Bonrepaux. Où donc ?
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... et de cinq milliards de recettes en plus.
M. Jean-Marie Le Guen. Lesquelles ?
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il y a du moins une chose que je sais : c'est qu'avec toutes ses insuffisances - car il y en a sans doute - cette réforme vaut infiniment mieux que ce que vous avez fait en matière d'assurance maladie. Patrick Devedjian l'a très bien dit tout à l'heure, avec d'autres mots : pas vous, pas ça ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Votre bilan ne vous autorise en rien à nous reprocher les réformes que nous mettons en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Gérard Bapt
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Finances publiques
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 juin 2004