Question au Gouvernement n° 1488 :
établissements

12e Législature

Question de : M. Jean-Pierre Dufau
Landes (2e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 24 juin 2004

CONDITIONS DE VIE DANS LES PRISONS

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Dufau.
M. Jean-Pierre Dufau. Après la réponse de M. le ministre de l'économie et des finances à mon collègue Gérard Bapt, je tiens - avec courtoisie - à rappeler au Gouvernement que ce qui autorise l'opposition à l'interroger s'appelle tout simplement la démocratie parlementaire. Il faut s'y faire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur les bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. Cela n'avait échappé à personne, monsieur Dufau ! (" Si ! " sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean-Pierre Dufau. Monsieur le président, nous savons que vous en êtes le garant ! Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Monsieur le garde des sceaux, la situation actuelle dans nos prisons est proprement indigne de la France, patrie des droits de l'homme. Tous les parlementaires qui visitent actuellement les établissements pénitentiaires vous le diront.
Inutile d'invoquer l'héritage socialiste ! Votre gouvernement et lui seul est responsable de l'aggravation dramatique de la situation. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Il détient ce triste record de plus de 64 000 détenus. Certaines maisons d'arrêt pour petites et moyennes peines sont occupées à 300 %. Votre politique du tout répressif a conduit en 2004 à une augmentation sans précédent du nombre des entrées : 97 000, soit une hausse de 30 %.
À l'évidence, une réponse immobilière à cette crise n'est pas la bonne. Il ne suffit pas de construire des murs, car il faut avoir à l'esprit que 99 % des personnes qui entrent en prison en ressortiront un jour ; mais dans quel état ?
Les élus socialistes demandent donc des comptes au Gouvernement. En 2000, le rapport de la commission d'enquête de notre assemblée avait sonné l'alerte. Faudra-t-il créer une nouvelle commission parlementaire pour faire le bilan de votre incurie ? Nous y sommes prêts.
Il faut réagir, monsieur le garde des sceaux, car la situation est explosive. Certes, vous réfléchissez à un plan carcéral, mais pourquoi ne pas vous inspirer de la loi pénitentiaire élaborée précisément à la suite des travaux de notre commission d'enquête ? Vous avez là une réforme disponible clés en main. Et pourquoi ne pas appliquer plus largement les dispositions de la loi Kouchner du 27 mars 2002 avant que des centaines de détenus ne se suicident ou n'agonisent dans des conditions inhumaines ? Je n'exagère pas !
Considérez aussi que de nombreux malades mentaux ou toxicomanes n'ont pas forcément leur place en prison.
Monsieur le garde des sceaux, un pays se juge aussi à la façon dont il traite ceux que la justice condamne. Quelles mesures de fond allez-vous prendre d'urgence et, plus largement, quelle politique respectueuse de la dignité humaine comptez-vous mettre en oeuvre dans le cadre de l'application des décisions de justice ?
M. Charles Cova et M. Lucien Degauchy. On va construire des prisons quatre étoiles !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes.
Mme Nicole Guedj, secrétaire d'État aux droits des victimes. Monsieur Dufau, la surpopulation carcérale est une vraie préoccupation. C'est en tout cas celle du Gouvernement, comme l'a rappelé ce matin Dominique Perben en conseil des ministres.
La récente initiative d'un certain nombre de parlementaires de visiter des prisons est une bonne chose. Elle leur permet en effet de juger des conditions de vie, particulièrement difficiles, des détenus et de mesurer aussi la difficulté de la mission des personnels de l'administration pénitentiaire, dont je tiens à saluer le mérite.
Je ne comprendrai jamais qu'un sujet aussi difficile, qui met en cause la dignité de la France, suscite la polémique. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Il faut savoir faire le point, et j'aimerais à cet égard revenir sur la situation que nous avons trouvée en arrivant. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Je vous la rappelle : une France pénitentiaire malade et très en retard, avec des établissements pénitentiaires construits à 80 % avant 1912. Depuis les plans Méhaignerie et Chalandon, aucun projet de construction n'avait été élaboré par vos soins ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Nous avons trouvé également des conditions de vie très difficiles ainsi qu'un manque de sécurité (Protestations sur les mêmes bancs),...
Mme Élisabeth Guigou. Vous mentez !
Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes. ...une insuffisante prise en charge des personnels fragiles et un très grand nombre de suicides en prison. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Vous avez parlé de la démocratie parlementaire tout à l'heure ! Laissez parler Mme la secrétaire d'Etat !
Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes. Qu'avons-nous entrepris ?
Nous avons lancé un très ambitieux plan de constructions nouvelles. Il faut en effet le rappeler : ce qui est en cause, ce n'est certainement pas le nombre de détenus, mais le nombre insuffisant de places en prison en France. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Vanneste. Très bien !
Mme la secrétaire d'État aux droits des victimes. Nous avons aussi prévu un programme ambitieux de recrutements, avec la création de 3 740 emplois et le recrutement de 2 000 personnels de surveillance par an pour combler les postes vacants. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Pierre Dufau

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Système pénitentiaire

Ministère interrogé : droits des victimes

Ministère répondant : droits des victimes

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 24 juin 2004

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