presse
Question de :
M. Didier Mathus
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 1er juillet 2004
PLURALISME DE LA PRESSE
M. le président. La parole est à M. Didier Mathus, pour le groupe socialiste.M. Didier Mathus. Monsieur le ministre de la culture et de la communication, la défense du pluralisme de la presse est une mission impérieuse du Gouvernement. Elle mérite mieux que la réponse que vous avez faite à Michel Françaix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - M. Bayrou applaudit également. -Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Manuel Valls. C'était honteux !
M. Didier Mathus. J'observe d'ailleurs que, en matière de concentration des médias, vous ne vous êtes pas, contrairement à ce que vous affirmez, contenté de ne rien faire. J'en veux pour preuve ce qui s'est passé dans le secteur de la télévision avec la loi dite " paquet Télécoms " laquelle, à votre initiative, a ajouté à une directive européenne toute une série de dispositions qui constituent autant de cadeaux déposés aux pieds des deux grands groupes de télévision privée : Bouygues, propriétaire de TF1, et Bertelsmann qui possède désormais M 6.
Le panier des offrandes est copieux. Je n'en énumérerai que les principales : le bouquet satellitaire commun TPS qui se voit doté d'une sorte de droit régalien de vie et de mort sur les réseaux du câble ; l'autorisation de pomper la manne publicitaire locale à l'occasion des décrochages régionaux ; la possibilité de cumuler chaînes nationales et chaînes locales ; le relèvement de tous les seuils anticoncentration...
M. Philippe Briand. Ce qui compte, c'est la satisfaction des téléspectateurs !
M. Didier Mathus. Quant au projet de télévision numérique terrestre, qui menaçait leur rente de situation, il a finalement été aménagé pour leur plus grand intérêt...
Au moment où le service public renoue, à Radio France ou à France 2, avec les vieilles pratiques du gaullisme audiovisuel (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), au moment où M. Ernest-Antoine Seillière prend le contrôle d'une bonne partie de l'édition française,...
M. Gérard Bapt. Scandaleux !
M. Didier Mathus. ...dont la totalité des livres scolaires, au moment où M. Dassault rachète la Socpresse afin de promouvoir, dit-il, " des idées saines et positives ", (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), au moment où vous démantelez toutes les protections démocratiques contre la concentration dans les médias, l'inventaire de votre action, ou de votre inaction, est rude ! La presse française, qu'elle soit écrite, télévisée ou radiophonique, est désormais aux mains des principales sociétés d'armement ou de BTP (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), qui vivent d'ailleurs pour l'essentiel de commandes publiques.
M. Pierre Lellouche. Mais c'est totalement faux !
M. le président. Monsieur Lellouche, je vous en prie !
M. Didier Mathus. Le seul groupe privé qui ne soit pas dans cette situation est désormais, grâce à vos soins, intégralement contrôlé par le groupe allemand Bertelsmann, devenu actionnaire majoritaire de M 6 et de RTL...
Ma question est toute simple, monsieur le ministre : trouvez-vous cette situation normale dans un pays démocratique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, il faut que les choses soient claires ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Le respect du pluralisme est une grande valeur pour nous ! (Même mouvement.)
C'est pour en témoigner que j'étais présent, contrairement à beaucoup d'entre vous, aux cent ans du journal L'Humanité (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste.) et ce n'était pas évident pour un membre de la majorité présidentielle !
M. Philippe Briand. Bravo !
M. le ministre de la culture et de la communication. Quand j'entends vos réactions, mesdames et messieurs de l'opposition, j'ai envie de vous demander ce que vous pensez des déclarations du président du conseil régional du Languedoc-Roussillon. Ne portent-elles pas atteinte au pluralisme culturel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Je n'accepte pas la caricature sur des sujets aussi sérieux.(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Nous avons veillé, lors de l'examen de récentes dispositions législatives, à ce qu'il y ait un bon équilibre entre le secteur audiovisuel public et privé. Quant aux précautions que nous avons prises concernant la télévision numérique terrestre, elles sont destinées à protéger les futurs téléspectateurs et à leur donner l'assurance que les progrès de la technologie leur seront immédiatement profitables.
M. Christian Bataille. Grotesque !
M. le ministre de la culture et de la communication. Nous veillons aussi à ce que notre action pour l'audiovisuel, s'agissant des recettes publicitaires, ne menace pas le pluralisme de la presse écrite auquel nous sommes, les uns et les autres, très attachés.
M. Christian Bataille. Vous le bafouez !
M. le ministre de la culture et de la communication. Dans les semaines qui viennent, nous aurons d'ailleurs à débattre de recettes supplémentaires pour l'audiovisuel public. C'est vous dire que je suis particulièrement attaché, tout comme le Premier ministre et mes collègues du gouvernement directement concernés, à une offre audiovisuelle qui, sur le plan de la liberté d'expression, de la diversité démocratique et de l'offre culturelle, soit la plus large possible.
Sur ces sujets-là, je crois que vos leçons sont particulièrement déplacées. Vous n'êtes pas en mesure de nous donner un seul exemple d'une tutelle directe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Je ne suis pas le ministre de l'information, mais celui de la communication ! Et bien que non issu de la famille gaulliste, mais respectueux des valeurs du général de Gaulle, je vous dirai que pour moi, les valeurs du gaullisme sont celles de la Résistance, de la liberté et du pluralisme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.- Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Henri Emmanuelli. Il a oublié l'ORTF ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Auteur : M. Didier Mathus
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Presse et livres
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er juillet 2004