Question au Gouvernement n° 1604 :
fruits et légumes

12e Législature

Question de : M. Jean Dionis du Séjour
Lot-et-Garonne (1re circonscription) - Union pour la Démocratie Française

Question posée en séance, et publiée le 28 octobre 2004

FRUITS ET LÉGUMES

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Union pour la démocratie française.
M. Jean Dionis du Séjour. Monsieur le ministre d'État, les producteurs de fruits et légumes viennent de subir, sur l'ensemble du territoire national, une crise sans précédent. Ces producteurs sont, en effet, parfois payés à peine la moitié du prix de revient de leurs productions, alors qu'il s'agit d'une filière moderne, dynamique, vitale pour notre agriculture, qui emploie plus de 200 000 personnes. Quant aux consommateurs de France, ils se voient proposer un kilo de pommes, payé 40 centimes d'euros au producteur, au prix de 2,40 euros sur les étals de nos supermarchés.
Un premier constat s'impose, monsieur le ministre d'État : l'accord du 17 juin ne les a pas protégés.
Les causes de la crise sont malheureusement connues. Tout d'abord, les charges sociales sont trop élevées, notamment au vu de la compétition intracommunautaire. Au cours de l'examen à l'Assemblée nationale du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, Hervé Gaymard s'est engagé à nous faire des propositions lors de la deuxième lecture au Sénat. Nous en avons pris acte. Monsieur le ministre de l'agriculture : de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace !
Ensuite, et surtout, le rapport de force est complètement déséquilibré entre la grande distribution et le monde de la production : 5 centrales d'achat contre 360 organisations de production. Il est d'ailleurs regrettable que nos collègues UMP aient refusé une commission d'enquête sur ce sujet (" C'est vrai ! " sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), car bien des pratiques restent à éclaircir et à assainir.
Notre question porte sur ce point. Lors de l'examen du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, M. Gaymard nous a renvoyés au rapport Canivet, que nous avons lu avec le plus grand soin. Certes, le problème de la filière des fruits et légumes y est reconnu - comment pourrait-il en être autrement ? -, mais les propositions sont vraiment désespérantes et écartent de façon sommaire et très contestable l'une des voies les plus prometteuses : celle du coefficient multiplicateur. Je précise à l'attention de ceux qui ne sont pas spécialistes de ces questions que ce dispositif consiste à obliger la grande distribution à mieux rémunérer les producteurs en corrélant le prix de vente et le prix d'achat aux producteurs. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Dionis Du Séjour.
M. Jean Dionis du Séjour. Je tenais à dire, monsieur le président, que M. Ferrand a déposé une proposition de loi en ce sens, soutenue par 121 députés, et je souhaitais lui rendre hommage.
M. Jean-Michel Ferrand. Il faut la voter !
M. le président. Vous ne posez pas votre question à M. Ferrand, mais au Gouvernement.
M. Jean Dionis du Séjour. Dans ce contexte, et au-delà de l'avis de M. Canivet, quelle est, monsieur le ministre d'État, votre position sur le coefficient multiplicateur...
M. le président. Merci, monsieur Dionis Du Séjour !
M. Jean Dionis du Séjour. ...et, plus généralement, que comptez-vous faire pour rééquilibrer le rapport de force entre producteurs et distributeurs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député,...
M. le président. Pardonnez-moi, monsieur Sarkozy. Monsieur Gremetz, veuillez ôter votre casque : tous les moyens ne sont pas bons pour attirer l'attention des médias ! (Huées puis applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez la parole, monsieur le ministre d'État.
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, si je vous ai bien compris, après avoir adressé un reproche aux députés du groupe UMP, vous souhaitez que le Gouvernement retienne l'une de leurs propositions de loi. Ce point méritait d'être souligné.
Si la situation et la législation actuelles étaient satisfaisantes, M. Gaymard et moi n'aurions pas eu à gérer la crise très difficile de l'été dernier. Le prix de revient d'un kilo de tomates se situe aux alentours de 0,70 euro chez nous, alors qu'il est de 0,15 euro en Pologne. Ce n'est donc pas facile.
Le rapport Canivet est important parce que son auteur est le premier magistrat de France. Nous pouvons donc lui faire confiance quand il estime que, malheureusement, la proposition remarquable de Jean-Michel Ferrand, qui consiste à instaurer un coefficient multiplicateur, n'est pas conforme au droit communautaire.
M. Jean-Michel Ferrand. Ce n'est pas vrai !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est celui qui aura à en juger qui le dit. Le rôle du Gouvernement n'est pas d'adopter une législation dont nous savons qu'elle sera condamnée par les tribunaux. (Protestations sur divers bancs.)
J'ai pris contact, à la demande du Premier ministre, avec le président Barroso (Mouvements divers), pour étudier ce que, avec M. Gaymard, nous pourrions faire pour retenir cette proposition. En disant : " Ce n'est pas vrai ! ", vous vous faites plaisir, monsieur Ferrand. Le but n'est pas de condamner des agriculteurs à la désespérance en leur faisant de fausses promesses et en leur proposant de fausses solutions. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Monsieur Glavany, à votre place, je ne prendrais pas la parole sur ce sujet ! (Huées puis applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Si M. Gaymard et moi avons à gérer une situation épouvantable pour les agriculteurs, c'est de votre faute et de la vôtre seule. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Évitons les interpellations personnelles.
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les contrats-types obligatoires, les prix garantis, le plafonnement des marges arrière : nous savons, monsieur le député, que les prix agricoles - et c'est ce que dit le rapport Canivet - ne peuvent pas se fixer dans le cadre normal.
M. François Sauvadet. C'est vrai !
M. le ministre d'État, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. D'ici à trois semaines, nous vous ferons, avec M. Gaymard, des propositions précises, utiles et applicables par les juridictions. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : M. Jean Dionis du Séjour

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 28 octobre 2004

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