télévision
Question de :
M. Didier Mathus
Saône-et-Loire (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 28 octobre 2004
TÉLÉVISION NUMÉRIQUE TERRESTRE
M. le président. La parole est à M. Didier Mathus, pour le groupe socialiste.M. Didier Mathus. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication. En préambule, je voudrais faire observer à M. Fillon, qui affirme que les crédits de la recherche augmenteront de 10 % en 2005 sous la pression des chercheurs, que ces mêmes crédits avaient préalablement diminué de 20 % en 2003 et 2004 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le ministre, alors que la télévision numérique terrestre devait voir le jour au mois de mars prochain, le Gouvernement semble prêter main-forte au groupe Bouygues et à TF1, ainsi qu'à M6, qui s'opposent depuis deux ans à l'application de la loi. La télévision numérique de terre n'est pas un simple projet technique, mais un enjeu démocratique, puisqu'elle permettrait à tous les téléspectateurs de recevoir près de trente chaînes, dont quatorze gratuites, sans modifier leur antenne ni changer leur téléviseur.
Tout est prêt pour un démarrage dès le mois de mars, mais cette multiplication des chaînes mettrait fin au monopole privé de TF1 et de M6 qui captent aujourd'hui, à eux seuls, plus de 70 % des recettes de publicité. On comprend que c'est là que le bât blesse pour le Gouvernement, alors que tout est fait pour que l'ensemble des médias reste aux mains d'une oligarchie proche du pouvoir (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
En retenant l'idée dilatoire lancée par TF1 d'une nouvelle norme technique, celle de la haute définition, qui obligerait les téléspectateurs à acheter un téléviseur spécial coûtant environ 5 000 euros, auquel il faudrait ajouter un décodeur de 200 euros, le Gouvernement retiendrait un système qui n'a cours dans aucun autre pays au monde, et qui ne bénéficierait qu'à quelques foyers privilégiés.
La manoeuvre est claire : il s'agit de tuer dans l'oeuf toute tentative de déploiement d'une télévision numérique gratuite pour tous, afin de préserver les intérêts de TF1 et de M6.
M. Bernard Deflesselles. C'est scandaleux de dire cela !
M. Didier Mathus. Au moment où ce numérique terrestre connaît de grands succès populaires dans les pays où le même modèle gratuit prédomine, la France s'apprêterait donc, contre l'avis unanime du Conseil supérieur de l'audiovisuel, à faire un choix incompréhensible. Il est vrai que depuis la dernière élection présidentielle, l'UMP n'en finit pas de payer ses dettes à la société de Martin Bouygues, dont on connaît les liens personnels étroits avec M. Sarkozy (Protestations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le ministre, devant une telle soumission du Gouvernement à des intérêts particuliers...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ces propos sont honteux !
M. Didier Mathus. ...ne serait-il pas plus simple de laisser votre fauteuil à M. Le Lay, PDG de TF1, puisqu'en tout état de cause, c'est lui qui dicte aujourd'hui la politique du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Scandaleux !
M. le président. La parole est à M. le ministre de la culture et de la communication.
M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, je déplore vivement que vous preniez le ton de la polémique et de la caricature pour traiter d'un sujet si important pour nos concitoyens (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Jean Glavany. Vous offrez du temps de cerveau disponible à Coca-Cola !
M. le ministre de la culture et de la communication. Il me semble utile de rappeler que la TNT n'est pas un sigle barbare incompréhensible, mais la promesse d'une offre audiovisuelle élargie pour l'ensemble de nos concitoyens grâce à une technologie qui est désormais à portée de main. Cela étant, nous ferions preuve d'inconséquence si nous omettions de procéder, avant que la décision définitive ne soit prise, à un certain nombre de vérifications...
M. Didier Mathus. Trois ans de retard, c'est long !
M. le ministre de la culture et de la communication. ...dans l'intérêt même de nos concitoyens, futurs téléspectateurs. Les vérifications sont d'ordre juridique et technologique et elles ont pour objet de s'assurer que la norme technique retenue sera véritablement performante. Sur instruction du Premier ministre, je me suis rendu à Londres en compagnie du président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, pour assister sur place à une expérience réussie. Cette démarche n'a rien de dilatoire, mais vise au contraire à permettre au Premier ministre et au président du Conseil supérieur de l'audiovisuel d'annoncer très prochainement aux Français le choix de la norme qui rendra possible l'accès à quinze chaînes supplémentaires gratuites, ce qui n'est pas négligeable.
Il n'y a là aucune manoeuvre (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et je vous serais reconnaissant de ne pas utiliser le terme de " décodeur ", qui peut, à tort, laisser craindre l'arrivée d'une nouvelle technologie à la fois compliquée et payante. Le Premier ministre va confirmer, dans les jours ou les semaines qui viennent, le lancement de cette nouvelle offre télévisuelle, ce qui n'exclut pas que d'autres normes, pour d'autres types de télévision, puissent ensuite voir le jour (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) De grâce, ne confondez pas et ne caricaturez pas tout : la télévision gratuite pour tous grâce à la TNT, en 2005, constitue une première étape et d'autres suivront (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Vendu !
Auteur : M. Didier Mathus
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Audiovisuel et communication
Ministère interrogé : culture et communication
Ministère répondant : culture et communication
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 octobre 2004