Question au Gouvernement n° 203 :
décentralisation

12e Législature

Question de : Mme Ségolène Royal
Deux-Sèvres (2e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 28 novembre 2002

DÉBAT SUR LA DÉCENTRALISATION

M. le président. La parole est à Mme Ségolène Royal.
Mme Ségolène Royal. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, ma question s'inscrit dans la recherche d'un débat serein retrouvé dans cet hémicycle sur la décentralisation. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.).
Nous nous sommes, vous le savez, engagés positivement dans cette nouvelle étape. (Mêmes mouvements.) Non seulement des élus socialistes ont participé aux assises territoriales sur l'ensemble du territoire mais nous avons même voté plusieurs des dispositions du texte que vous avez proposé, notamment l'inscription de la région dans la Constitution et l'article 5 sur la démocratie participative.
Malheureusement, force est de constater aussi que ce débat est aujourd'hui un peu dans l'impasse. Vous-même, monsieur le Premier ministre, aviez déclaré, et à juste titre, lorsque vous étiez président de l'Association des régions de France, qu'un débat sur la décentralisation qui ne traiterait pas des règles du jeu financières restait un débat virtuel.
M. Philippe Vuilque. Très bien !
Mme Ségolène Royal. Aussi souhaitons-nous, et notre préoccupation est, vous le savez, partagée par de nombreux élus de toutes tendances politiques, que des règles du jeu claires soient établies dans les lois qui régiront les transferts de compétences, l'expérimentation ainsi que les transferts financiers.
Or nous observons que tous nos amendements sont refusés, de même que bon nombre de ceux de votre propre majorité. Notre question est simple : monsieur le Premier ministre, accepteriez-vous de suspendre ce débat. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle),...
M. Gérard Grignon. Certainement pas !
M. Patrick Ollier. C'est incroyable de demander cela !
Mme Ségolène Royal. ... le temps de nous communiquer les textes sur les transferts financiers et les grandes lignes des lois de transfert de compétences, afin que nous puissions discuter en toute connaissance de cause ?
Par ailleurs, monsieur le Premier ministre, acceptez-vous de soumettre ce texte à référendum...
M. Lucien Degauchy et M. Jean Marsaudon. Non !
Mme Ségolène Royal. ... afin que le peuple français - car c'est pour lui que nous travaillons, pour la France, pour améliorer le service public et l'égalité devant le service public - ait son mot à dire sur cette importante démarche ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Lucien Degauchy. Baratin !
M. le président. Monsieur Degauchy, cela ferait plaisir à tout le monde que vous fassiez un peu moins de bruit.
La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Madame la députée, j'apprécie le ton que vous employez désormais. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.) Je suis très heureux de voir que ces sujets peuvent être abordés calmement, sereinement, dans un esprit constructif et positif au sein de la représentation nationale.
M. Michel Delebarre. Vous auriez dû venir hier !
M. le Premier ministre. C'est d'ailleurs ainsi que se déroulent aujourd'hui les débats sur le terrain. Récemment encore, avec Mme Martine Aubry et M. Pierre Mauroy, nous avons eu des discussions empreintes d'un esprit républicain et marquées par le respect des convictions de chacun. C'est ce que nous souhaitons et je m'en félicite.
Je voudrais maintenant vous répondre sur le fond. Sur ce sujet, vous le savez, notre conviction est profonde. La République fonctionne mal, les Français nous l'ont dit et le répètent.
M. Bruno Le Roux. Répondez à la question !
M. le Premier ministre. L'impuissance publique est trop répartie dans ce pays pour que nous ne soyons pas déterminés à engager les réformes. Nous avons donc souhaité engager les réformes nécessaires, en proposant une démarche en trois temps.
D'abord, un débat ouvert sur les principes constitutionnels afin d'inscrire dans la Constitution les points clés qui nous manquent aujourd'hui pour les mener à bien : ...
M. Bruno Le Roux. Ce n'est pas la question !
M. Bernard Deflesselles. Attendez la suite !
M. le Premier ministre. ... le droit à la proximité avec le principe de subsidiarité, en d'autres termes les principes financiers que tous les maires et tous les élus de France attendent (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française), la péréquation et l'autonomie financière, c'est-à-dire l'appel aux citoyens. Or si nous voulons débattre utilement de ces sujets essentiels,...
M. Christian Bataille. Pour l'instant, c'est zéro !
M. le Premier ministre. ... encore faut-il d'abord en ouvrir la possibilité. En effet, si la Constitution ne permet pas la péréquation, par exemple, ...
M. Maxime Gremetz. Mais si, elle la permet !
M. le Premier ministre. ... à quoi sert de parler de la péréquation ? Si la Constitution ne permet pas l'expérimentation, à quoi sert-il de parler de l'expérimentation ? Commençons donc par ouvrir, dans la Constitution, ces libertés nouvelles avec lesquelles nous pourrons construire ensemble, et dans le débat, l'acte II de la décentralisation.
Vous le savez comme moi, le sujet est particulièrement difficile. Au demeurant, s'il avait été si facile, il aurait déjà été abordé dans le passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle et du groupe Union pour la démocratie française.) Et c'est précisément parce qu'il est difficile qu'il faut du temps et qu'il faut en débattre. Vous qui connaissez bien les élections locales, madame la députée, qui avez été conseillère générale, qui avez été candidate aux municipales, candidate aux élections régionales, vous qui connaissez la pratique territoriale, vous devez savoir que c'est en discutant avec les uns et les autres que nous pourrons définir le mieux possible cet acte II de la décentralisatoin.
M. Christian Bataille. C'est du blabla !
M. le Premier ministre. Voilà pourquoi, loin de reporter ces travaux, je souhaite tout au contraire que l'Assemblée nationale et le Sénat votent rapidement le texte constitutionnel et que se développe dans le pays un large débat, afin que la représentation nationale puisse décider, dès le printemps prochain, des transferts de compétences à opérer, des grandes simplifications que le pays attend, et des expérimentations nécessaires. Il n'y a pas de temps à perdre.
M. Michel Delebarre. Nous en perdons beaucoup !
M. Christian Bataille. Raffarin, baratin !
M. le Premier ministre. Quant à décider d'un référendum, madame la députée, je veille à toujours rester à ma place et,...
M. Maxime Gremetz. Regardez le Président de la République !
M. le Premier ministre. ... le moment venu, le Président de la République prendra les décisions qui s'imposent. (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour la majorité présidentielle.)
M. le président. Monsieur Delebarre, je vous invite, comme je l'ai fait pour M. Degauchy, à vous montrer un peu plus calme.

Données clés

Auteur : Mme Ségolène Royal

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : État

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 novembre 2002

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