Question au Gouvernement n° 2086 :
chefs d'entreprise

12e Législature

Question de : M. Arnaud Montebourg
Saône-et-Loire (6e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 5 mai 2005

REMUNERATIONS DES DIRIGEANTS D'ENTREPRISE

M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste. (Huées prolongées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Arnaud Montebourg. Monsieur le Premier ministre, vous le savez, les entreprises du CAC 40 imposent une modération salariale drastique à leurs employés, tandis que leurs dirigeants s'octroient des rémunérations aussi faramineuses que délirantes : elles ont augmenté de 36 % en 2000, de 20 % en 2001, de 13 % en 2002, de 23 % en 2003, de 10 % en 2004.
M. Jean Auclair. Jaloux !
M. Alain Gest. Et les avocats ?
M. Arnaud Montebourg. L'année dernière, les députés de votre majorité ont lancé en grande pompe une enquête parlementaire sur les salaires des dirigeants, laquelle a finalement conclu qu'il ne fallait rien faire.
M. Pascal Clément. Ce n'est pas vrai !
M. Alain Gest. Montebourg est un menteur !
M. Arnaud Montebourg. Les 38 millions d'euros perçus par le PDG de Carrefour pour son départ à la retraite, soit 2 515 années de SMIC, ont indigné nombre de nos concitoyens et, paraît-il, ému quelques rares députés de votre majorité. (" C'est faux ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Si l'on en croit ses déclarations, M. Breton, votre ministre des finances, se serait décidé à réagir. Nous avons, monsieur le Premier ministre, d'excellentes raisons de douter de votre bonne volonté, car, il y a quelques mois, dans cet hémicycle, votre gouvernement a violemment refusé de faire voter la proposition de loi que nous déposions au nom des députés socialistes et qui visait à encadrer, à contrôler la rémunération des dirigeants, et à assurer sa transparence.
M. Lucien Degauchy. Comédien !
M. Arnaud Montebourg. Cette proposition permettait pourtant de limiter l'écart entre les salaires d'en haut et ceux d'en bas, à l'intérieur de l'entreprise.
M. Jean-Michel Fourgous. C'était une proposition de loi démago !
M. Arnaud Montebourg. Comment pouvons-nous croire, par ailleurs, que votre ministre des finances va désormais s'attacher à réduire cette véritable fracture salariale puisque lui-même en a tiré d'immenses bénéfices personnels ? (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Lucien Degauchy. Espèce de baveux !
M. Arnaud Montebourg. Entre 2001 et 2004, M. Breton a perçu 5 768 272 euros de rémunération (Exclamations continues sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française)...
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues ! Monsieur Montebourg, posez votre question !
M. Arnaud Montebourg. ...au titre de ses différentes fonctions dans des sociétés cotées, soit plus de 400 années de SMIC. (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. Monsieur Montebourg, posez votre question !
M. Arnaud Montebourg. Ma question est la suivante (Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
M. le président. Écoutez M. Montebourg : le ministre lui répondra !
M. Arnaud Montebourg. Monsieur le Premier ministre, êtes-vous capable de remédier à ce qui est devenu le scandale de la fracture salariale française ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Huées sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, pour répondre à la première partie de votre question, je vous confirme bien volontiers les propos que, au nom du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, j'ai tenus sans attendre au sujet de l'affaire à laquelle vous venez de faire référence, tant sur la forme - et sur l'émotion qu'elle a suscitée dans l'opinion - que sur le fond.
En ce qui concerne le fond, j'ajoute cependant, comme je l'ai indiqué à maintes reprises, que le Gouvernement...
M. Jean-Paul Bacquet. Touche le fond ! (Rires.)
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ...déposera un amendement à la loi de modernisation de l'économie que j'aurai l'honneur de présenter devant le Parlement au mois de juin, amendement qui s'inspire largement des travaux conduits par le président de la commission des lois, M. Pascal Clément, et qui concerne les rémunérations particulières des mandataires sociaux. En faisant jouer un rôle accru à l'assemblée générale des actionnaires, nous favoriserons la transparence, l'information, la clarté, mais aussi la sécurité juridique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Pour répondre à la seconde partie de votre intervention, je tiens à dire que j'ai le plus grand respect pour toutes les idées politiques qui sont représentées sur les bancs de cet hémicycle.
M. Christian Bataille. C'est bien le moins !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je suis loin de les partager toutes, vous l'avez constaté et cela ne vous a pas étonné, mais je les respecte, autant que la diversité des parcours de celles et de ceux qui les incarnent. Cela s'appelle la démocratie, monsieur le député. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.) Mais lorsque l'on en vient, parce que l'on est en quête permanente de notoriété, à pratiquer l'amalgame, l'imprécision, l'insinuation, dans le dessein de jeter systématiquement le discrédit sur les institutions et sur les hommes qui sont au coeur de notre État de droit, alors je ne crois vraiment pas qu'on serve la démocratie. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Arnaud Montebourg

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mai 2005

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