sécurité des biens et des personnes
Question de :
M. Éric Raoult
Seine-Saint-Denis (12e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire
Question posée en séance, et publiée le 23 juin 2005
MEURTRE D'UN ENFANT A LA COURNEUVE
M. le président. La parole est à M. Éric Raoult, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.M. Éric Raoult. Ma question, à laquelle je souhaite associer mes collègues Robert Pandraud et Jean-Claude Abrioux, s'adresse au ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
" C'est pas juste ce qui est arrivé à Sidi Ahmed " : telle est l'inscription émouvante figurant sur une petite pancarte que portait hier un enfant de la barre Balzac de La Courneuve.
La Courneuve, c'est une cité populaire. Ce n'est ni Chicago, ni le Bronx. Mais hélas ! cette ville est endeuillée, une nouvelle fois, par la mort d'un enfant. En juillet 1981, déjà, Toufik Ouarès était mort par balle à l'âge de dix ans aux 4 000.
Dimanche dernier, victime d'un règlement de comptes armé entre bandes rivales de trafiquants, un enfant de onze ans, Sidi Ahmed Hammache, a été tué dans la même commune, dans le même quartier des 4 000. Ce drame ne peut être ni banalisé, ni minimisé. C'est un fait divers à l'américaine, mais aux portes de Paris, dans ce département qui voudrait faire parler de lui, mais pour d'autres faits d'actualité.
Monsieur le ministre d'Etat, vous êtes venu sur place avec courage (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) pour montrer qu'il n'y avait pas de zones de non-droit. Vous avez entendu la voix des gens, qui réclament, aux 4 000, une sécurité de plein droit. Avec force et détermination, en parlant avec eux comme ils parlent entre eux, vous avez réaffirmé votre volonté de régler le problème de l'insécurité dans les cités. Vous avez utilisé un terme du parler-vrai, ce qui ne m'a pas choqué du tout. Car tuer un enfant, n'est-ce pas salir une cité ? Vendre de la drogue à des mômes, n'est-ce pas dégrader une jeunesse ?
Certains, ici, devraient ouvrir les yeux et se nettoyer les oreilles (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains - Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) pour écouter la voix des quartiers qu'ils ont construits, mais qu'ils ne savent plus gérer.
Monsieur le ministre d'État, comment les élus de bonne volonté peuvent-ils vous aider, vous et le Premier ministre, pour qu'il n'y ait jamais plus d'autre Sidi Ahmed, mort à onze ans de deux balles dans le corps. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
M. Nicolas Sarkozy, ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Monsieur le député, cette mort est inacceptable et ce n'est pas un sujet de polémique.
Cette mort nous interpelle tous. Comment se fait-il que, dans notre République, à cinq minutes du centre de Paris, des individus sans scrupule puissent se tirer dessus à balles réelles et ôter la vie à un petit garçon de onze ans, qui nettoyait la voiture de ses parents ? C'est profondément choquant !
Je me suis rendu sur place pour rencontrer la famille et les habitants du quartier. Ils m'ont dit une chose simple : " Ce n'est pas parce que nous sommes plus pauvres que les autres que nous avons moins besoin de sécurité que les autres. " (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.) " Ce n'est pas parce que nous habitons dans des quartiers abandonnés de beaucoup que la République ne doit pas s'occuper de nous ! " Ces femmes et ces hommes de la cité des 4 000 m'ont dit : " Monsieur Sarkozy, il faut nettoyer le quartier des trafics et des trafiquants. " (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bataille. Au karcher !
M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire. Voilà ce qu'ils m'ont dit ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
En voyant vos réactions à gauche de l'hémicycle, je comprends pourquoi le peuple vous a quittés (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), pourquoi le peuple s'est détourné de vous. Parce que vous avez oublié le peuple ! Vous ne parlez pas comme lui. Vous ne le comprenez pas. Vous ne tirez aucune des conséquences de ce qu'il vit au quotidien. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Nous allons donc mener tous les jours, avec l'accord du Premier ministre, les opérations de police nécessaires. Je reviendrai à La Courneuve, la semaine prochaine, pour rencontrer les jeunes, pour poser les bases d'une politique de prévention. Je n'ai pas voulu le faire lors de ma première visite, monsieur Raoult, parce qu'on ne négocie pas le retour à l'ordre public. On ramène l'ordre public et on discute après ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Chaque fois que ce sera nécessaire nous recommencerons. Parce que les bonnes consciences qui acceptent l'inacceptable et sont choquées par les mots ont fait, depuis vingt-cinq ans, le lit d'une extrême droite scandaleuse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Par des actes, nous allons faire reculer l'extrême droite, la pauvreté et la violence.
Voilà ce que j'ai voulu dire, au nom du gouvernement de Dominique de Villepin. Je ne retire rien, je ne regrette rien. Je ferai ce que j'ai dit et nous obtiendrons des résultats. Cela prendra le temps qu'il faudra. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Éric Raoult
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : intérieur et aménagement du territoire
Ministère répondant : intérieur et aménagement du territoire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 juin 2005