jeunes
Question de :
M. Alain Vidalies
Landes (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 18 janvier 2006
NOUVEAUX CONTRATS DE TRAVAIL
M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste.M. Alain Vidalies. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, devant cette assemblée, le 28 juin 2005, à propos du contrat nouvelles embauches, vous avez déclaré : " Ce nouveau contrat permettra de dynamiser le marché de l'emploi. Il devra être évalué au fur et à mesure de sa mise en oeuvre, en liaison avec les partenaires sociaux. " Or, non seulement vous n'avez tenu aucun compte de cet engagement, non seulement il n'y a eu aucune négociation, mais, aujourd'hui, vous imposez cette extension à toutes les entreprises.
Vous comprendrez aisément, monsieur le Premier ministre, que, les yeux dans les yeux, nous vous disions que nous n'accordons aucun crédit à vos engagements d'aujourd'hui, quand nous songeons à ceux d'hier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
L'extension du contrat nouvelles embauches à toutes les entreprises marque un tournant pour notre droit social. À compter de ce lundi noir du droit du travail, tous les jeunes Français ne connaîtront de l'entrée dans la vie active qu'une période de précarité de deux ans, pendant laquelle ils pourront être licenciés à tout moment et sans motif.
Le pire, c'est que vous avez déjà annoncé votre intention de proposer prochainement un contrat de travail unique inspiré de ce dispositif, qui généraliserait ainsi cette précarité de deux ans à tous les salariés. (" Scandaleux ! " sur les bancs du groupe socialiste.) Vous avez même annoncé votre intention de rendre les heures supplémentaires moins chères pour les entreprises.
M. Lucien Degauchy. Très bien !
M. Alain Vidalies. Les Français, et au premier chef les demandeurs d'emploi, apprécieront : vous privilégiez le recours aux heures supplémentaires plutôt que la création d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Plus extraordinaire, votre proposition - passée sous silence mais qui figurait dans le dossier de presse diffusé hier - d'élargir le champ de l'intérim à ceux qui ont déjà un emploi mais souhaitent un complément de pouvoir d'achat. Ainsi, une entreprise pourra recourir à des salariés intérimaires qui ont déjà un emploi, y compris à plein temps. C'est la porte ouverte à tous les abus et à tous les détournements.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes engagé dans une compétition préélectorale avec votre ministre de l'intérieur, président de l'UMP.
M. Georges Tron. Ça vous va bien, de dire ça !
M. Alain Vidalies. Ce n'est pas parce que M. Sarkozy ajoute chaque semaine une page au code pénal que vous devez, chaque semaine, déchirer une page du code du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. Monsieur Vidalies, posez votre question !
M. Alain Vidalies. Dans les deux cas, les victimes sont toujours les mêmes : les Français qui aspirent à une société fondée sur la responsabilité et la justice sociale. Ne pensez-vous pas qu'il serait temps de mettre fin à cette course folle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains. - Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.
M. Bernard Roman. Pas facile de répondre à ça, hein, monsieur Borloo !
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Monsieur le député, il y aurait donc, dans cette assemblée, d'un côté, les généreux, et, de l'autre, les tenants...
M. Henri Emmanuelli. De l'argent !
M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. ...d'une simple dynamique économique positive. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Permettez-moi donc de dire deux mots aux généreux. Qui a rétabli l'aide personnalisée aux logements pour les familles en difficulté ? C'est nous !
Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est faux !
M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Qui multiplie le nombre de logements sociaux ? C'est nous ! (" C'est nous ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Qui s'occupe des licenciés économiques, refusant de les abandonner chez eux et leur proposant des conventions de reclassement personnalisé ? C'est nous ! (Mêmes mouvements.)
M. Augustin Bonrepaux. C'est faux !
M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Qui fait en sorte que les demandeurs d'emploi soient suivis, au plan administratif, par la même personne, qu'ils voient tous les mois ce référent qui s'occupe de leur bilan de compétences, de l'aide à la formation et de l'intéressement ? (" C'est nous ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Oui, c'est nous. Je tenais à le dire pour la morale sociale.
Mais je voudrais aussi en profiter pour répondre au président Ayrault. (" Répondez à la question de M. Vidalies ! " sur les bancs du groupe socialiste.) Monsieur le président Ayrault, vous n'avez jamais abordé le problème spécifique des seniors, qui est pourtant grave : or nous tentons précisément de le résoudre avec les partenaires sociaux.
Enfin, monsieur Vidalies, un tiers des 280 000 personnes bénéficiant de contrats nouvelles embauches n'auraient jamais été recrutées sans cela et elles nous remercient.
D'autre part, vous savez que le problème de la première embauche est très particulier. J'en ai marre (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains) qu'on dise aux jeunes Français : " Accepte un stage, fais de l'intérim, prends un CDD, tu n'as pas d'expérience, tu n'as pas le droit de travailler. " Nous voulons les doter d'une expérience professionnelle. Le CDI reste notre objectif, c'est vers lui que nous nous dirigeons et c'est pour étudier dans quelles conditions nous pouvons le faire, vers le mois de juin, que nous lançons une concertation avec les partenaires sociaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. Jean-Claude Lefort. Il faudrait lui faire une prise de sang !
M. le président. Au moins, il y a de l'ambiance ! (Sourires.)
Auteur : M. Alain Vidalies
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Emploi
Ministère interrogé : emploi, cohésion sociale et logement
Ministère répondant : emploi, cohésion sociale et logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 janvier 2006