sidérurgie
Question de :
M. Laurent Fabius
Seine-Maritime (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 2 février 2006
OPA DE MITTAL STEEL SUR ARCELOR
M. le président. Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Laurent Fabius. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, qui scandent : " Le plan B ! Le plan B ! ")M. le président. Taisez-vous !
M. Jean Auclair. Fabius a oublié son chapeau ?...
M. le président. Monsieur Auclair !
M. Laurent Fabius. Monsieur le Premier ministre, je crois que vous avez reçu longuement ce matin M. Juncker, le premier ministre luxembourgeois, pour évoquer différents sujets (" Le plan B ? ", sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), notamment l'OPA hostile de Mittal Steel sur le grand groupe européen Arcelor. Si vous le voulez bien, je voudrais revenir quelques instants sur cette question importante en elle-même, et plus importante encore parce que beaucoup d'entre nous sont convaincus que, si cette OPA hostile réussit, il n'y aura quasiment plus aucun groupe européen qui sera assuré de son développement.
Nous sommes hostiles (" Au plan B ? ") à cette OPA pour des raisons qui tiennent à l'emploi. Les activités de Mittal Steel, différentes de celles d'Arcelor, qui s'est spécialisé dans des productions de haute qualité, ne nous inspirent aucune confiance, malgré les engagements de son président, sur les résultats d'une telle OPA en matière d'emploi.
Mme Marie-Hélène des Esgaulx. Vous n'avez aucune leçon nous à donner ! Vous n'avez rien fait !
M. Jean Leonetti. C'est scandaleux ! Vous auriez dû poser cette question à Strauss-Kahn !
M. Laurent Fabius. En ce qui concerne les actionnaires, on n'a pas assez remarqué que, dans le cadre de ce raid hostile, ils seraient - le mot n'est pas indifférent - payés en " papier ", et que leur droit de vote serait un droit de seconde catégorie, laissant en réalité tout pouvoir à la famille qui dirige Mittal Steel.
M. Jean Leonetti. Il découvre !
M. Laurent Fabius. Enfin, pour ce qui est de la question capitale de l'intérêt de la France et de l'Europe, constituer Arcelor a nécessité des sacrifices considérables en termes d'emploi et en termes financiers, que la réussite de ce raid hostile remettrait en cause.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables à cette OPA, et je vous poserai du même coup trois courtes questions.
Premièrement, puisque votre majorité s'est exprimée sur ce point de diverses manières, pouvez-vous confirmer de manière nette que, comme la Belgique, le Luxembourg ou l'Espagne, vous êtes hostile à ce raid ?
Deuxièmement, il est important que des initiatives soient prises en direction des investisseurs institutionnels. Mais cela nécessite - je ne sais pas si vous y avez été attentif, monsieur le Premier ministre (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) - que vous reveniez sur le texte concernant les OPA que vous avez fait voter à votre majorité contre l'avis de la gauche et qui rend toute intervention impossible dans un cas comme celui de Mittal Steel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Enfin, je souhaite que vous rappeliez à la Commission européenne, qui affirme ne pas vouloir de champions nationaux ou européens, que nous préférons des champions nationaux et européens à une espèce de Monopoly dont les salariés et les entreprises européennes seraient les pions.
Telles sont mes questions, monsieur le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Augustin Bonrepaux. Le Premier ministre devrait répondre en personne ! C'est une honte !
M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Oui, monsieur le Premier ministre Laurent Fabius, nous avons une politique industrielle. Non, nous ne sommes pas favorables à l'OPA de Mittal Steel sur Arcelor. Et je vais vous dire pourquoi.
Sur la forme, Mittal a enfreint toutes les règles de conduite qui constituent la grammaire de la finance internationale dans ce domaine. On n'aborde pas un groupe comme Arcelor, fleuron de l'économie européenne et de la sidérurgie française, sans l'annoncer, sans même en parler et sans avoir de vision et de projet industriels communs.
Sur le fond, Arcelor est un groupe qui a subi des restructurations, mais qui sait maintenant produire de l'acier à très haute valeur ajoutée, qu'il exporte jusqu'en Chine.
M. Augustin Bonrepaux. Répondez à la question !
M. le ministre délégué à l'industrie. Nous avons actuellement une industrie très performante, dont nous pouvons à juste titre être fiers.
M. Augustin Bonrepaux. Concrètement, qu'allez-vous faire ?
M. le ministre délégué à l'industrie. Par conséquent, à votre question, nous répondons simplement que nous sommes opposés au succès de l'OPA de Mittal contre Arcelor. Nous ne dirons pas comme M. Jospin que, lorsqu'il s'agit de politique industrielle, " l'État ne peut rien ". (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) On ne peut plus le dire après Vilvorde. Nous, nous prenons nos responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Calmez-vous ! Crier ne sert à rien et c'est mauvais pour le coeur !
Auteur : M. Laurent Fabius
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Industrie
Ministère interrogé : industrie
Ministère répondant : industrie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 février 2006