gouvernement
Question de :
M. Arnaud Montebourg
Saône-et-Loire (6e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 4 mai 2006
AFFAIRE CLEARSTREAM
M. le président. La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour le groupe socialiste.Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Danton !
M. Lucien Degauchy. Robespierre !
M. Arnaud Montebourg. Monsieur le président, ma question est destinée à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, questionné, hier, par l'opposition sur la réalité de vos agissements dans l'affaire Clearstream, vous avez, pour votre défense, répondu que cette affaire constituait " un pétard mouillé " et que vous étiez victime - paraît-il - d'une campagne de calomnie.
Il y a deux heures, un grand quotidien national a publié l'intégralité du témoignage d'une personnalité à la réputation sans tache (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) : votre ami, le général Rondot, s'exprimant sous serment devant l'autorité judiciaire.
Ce document apporte la preuve...
M. Georges Tron. Pas du tout !
M. Arnaud Montebourg. ...que vous avez donné l'ordre d'enquêter sur de nombreux hommes politiques de droite et de gauche, en dehors de vos compétences, dans des conditions de nature à contourner la justice et à circonvenir vos rivaux et vos opposants.
Vous avez ainsi placé la France à la merci de vos pratiques de cabinets noirs. Vous avez fait de celle-ci l'otage de vos batailles rangées et occultes au sommet de l'État. Jugez plutôt : le numéro deux de votre gouvernement a porté plainte en justice contre le numéro un, que vous êtes, provoquant des perquisitions dans le bureau du numéro trois du gouvernement que vous dirigez. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. Bernard Deflesselles. Ces propos sont scandaleux !
M. Arnaud Montebourg. C'est une gravissime affaire d'État, comprenant de graves dysfonctionnements politiques, qui ne peut donc pas rester sans sanction politique. Nous savons désormais, monsieur le Premier ministre, que vous avez menti à la représentation nationale et que, hier, vous avez menti aux Français. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
La seule question, que nous vous posons tous ici est celle ci : quand allez-vous prendre enfin vos responsabilités...
M. Yves Nicolin. Procureur !
M. Arnaud Montebourg. ...et remettre enfin à M. le Président de la République votre lettre de démission ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. M. le député de Saône-et-Loire est bien connu de notre hémicycle et nous aurions été surpris, monsieur Montebourg, que vous ne fassiez pas votre miel de quelque affaire que ce soit.
Vous êtes un ancien avocat,...
M. Georges Tron. Très ancien !
M. Lucien Degauchy. Un " avocaillon " !
M. le garde des sceaux. ...mais je suis frappé de constater combien vous oubliez les principes élémentaires du code de procédure pénale. Vous avez l'air de vous réjouir...
M. Francis Delattre. C'est un politicien, un politicard !
M. le garde des sceaux. ...de voir le secret de l'instruction, sans doute partiellement malmené, livré aux lecteurs de journaux sans qu'il le soit au garde des sceaux lui-même. C'est en effet dans Le Monde que j'ai découvert ce que la justice reproche au Premier ministre.
M. François Hollande. Demandez-le plutôt à M. de Villepin !
M. le garde des sceaux. Vous ne pouvez fonder la moindre construction sur des articles de presse qui n'ont rien à voir avec l'enquête judiciaire. Je voudrais que l'Assemblée tout entière fasse la part entre le politicien et la justice.
M. Christian Bataille. Le titre du Monde, est-il vrai ou faux ?
M. le garde des sceaux. La calomnie est facile, mais il y a une chose que vous devriez savoir plus qu'un autre, monsieur Montebourg : le temps de la justice n'est pas le temps de la politique. Vous faites de la politique : laissez à la justice le temps de dire la vérité ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Arnaud Montebourg
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mai 2006