Question au Gouvernement n° 2791 :
GDF

12e Législature

Question de : M. François Brottes
Isère (5e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 7 juin 2006

PRIVATISATION DE GAZ DE FRANCE

M. le président. La parole est à M. François Brottes, pour le groupe socialiste.
M. François Brottes. Vous l'avez annoncé, monsieur le Premier ministre, Gaz de France est à vendre,...
M. Alain Madelin. Enfin !
M. François Brottes. ...au mépris de la parole donnée en 2004 par Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'économie, dont je note qu'il est totalement complice de ce revirement.
EDF-GDF, l'un de nos fleurons industriels, est démantelé. Le service public de l'énergie est bradé, et le prix de l'énergie, qui devient insupportable pour les familles, comme pour les industriels (" Eh oui ! " sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains), sera demain totalement dépendant de la décision d'actionnaires privés.
Cette privatisation aura d'ailleurs, comme toutes celles qui ont déjà eu lieu, pour première conséquence de nouvelles augmentations du prix du gaz, destinées à donner des gages aux actionnaires. (" Eh oui ! " sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
Non content d'annoncer cette privatisation, vous vous apprêtez à passer à l'acte dès la semaine prochaine, dans l'improvisation la plus totale : aucune étude de l'impact de cette opération pour les usagers n'a été réalisée ; la Commission européenne n'a pas été consultée ; la parité entre les actions GDF et celles de Suez n'est d'aucune façon établie ; les questions posées par les représentants syndicaux n'ont reçu aucune réponse satisfaisante.
Vous allez donc, monsieur le Premier ministre, demander un " chèque en blanc " au Parlement, et ce sont les Français qui vont payer la note d'une privatisation qui n'est qu'une nouvelle trahison du service public.
M. Yves Nicolin. Baratin !
M. François Brottes. Or, aujourd'hui, de grands pays se délivrent de l'obsession de privatiser les entreprises publiques de l'énergie et de libéraliser les prix et les marchés dans laquelle vous foncez tête baissée, au moment où ils encadrent et réglementent les tarifs de l'énergie ! (" Baratin ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous dire ce qu'ont à gagner les Français à la privatisation de Gaz de France ? Mais peut-être allez-vous nous annoncer aujourd'hui que vous renoncez à votre funeste projet, comme le laisse entendre la presse du soir. On y fait dire en effet au président de notre commission des finances qu' " il y a un peu d'eau dans le gaz " de ce dossier ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. De mai 1999 à mai 2000, monsieur le député, le prix du gaz a augmenté de 30 %.
M. François Brottes. Hors sujet !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Qu'avez-vous fait contre ça ? Rien du tout ! Vous vous êtes contentés d'attendre que ça se passe ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Christian Bataille. Ce n'est pas la question !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons, nous, décidé, tenant compte de l'évolution actuelle du marché de l'énergie, de répondre positivement à la proposition de Gaz de France et à celle de Suez.
M. Patrick Lemasle. C'est vous qui l'avez suscitée !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Aucune de ces deux entreprises ne dispose, hélas ! de la " masse critique " qui leur permettrait de répondre aux défis d'aujourd'hui.
M. Patrick Lemasle. C'est votre projet !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous me permettrez de vous dire quels sont ces défis, puisque vous les ignorez : un marché de l'énergie dont le caractère toujours plus concurrentiel nous impose certains choix si nous voulons faire face à nos besoins dans le respect de l'intérêt général ; la nécessité de sécuriser nos approvisionnements ; celle d'accroître notre faculté de peser sur les coûts de l'énergie.
Telle est la réalité du monde moderne, monsieur Brottes : il est temps d'ouvrir les yeux ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. André Chassaigne. C'est la réalité libérale !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Rien de tout cela n'exclut la concertation, vous avez raison. C'est aussi la volonté du Premier ministre, qui m'a confié le soin de la mener.
Celle-ci se déroulera en trois étapes. Déjà, pendant près de trois mois, plus de trente rendez-vous ont réuni absolument toutes les organisations syndicales. À cette occasion, 71 questions ont été posées, notamment à propos de la consultation de la Commission européenne ou du Conseil d'État, qui ont toutes reçu une réponse.
La deuxième phase de la concertation engagera le Parlement. En effet, ce n'est pas le Gouvernement, mais vous, mesdames et messieurs les parlementaires, qui déciderez si vous voulez mener à bien ce projet.
Mme Martine David. C'est pareil !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Le 14 juin, dans cet hémicycle, vous aurez tout loisir de vous exprimer, et de formuler vos propositions au cas où vous refuseriez ce projet : il vous reviendra alors de dire ce qu'on fera d'un Gaz de France sans partenaire, ou d'un Suez isolé, sur lequel pèsent les risques que vous savez.
Telle est la responsabilité à laquelle nous sommes tous appelés à faire face : j'espère que vous saurez y répondre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)

Données clés

Auteur : M. François Brottes

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 7 juin 2006

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