Question au Gouvernement n° 2941 :
fonctionnement

12e Législature

Question de : Mme Élisabeth Guigou
Seine-Saint-Denis (9e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 25 octobre 2006

REFORME DE LA JUSTICE

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Guigou, pour le groupe socialiste.
Mme Élisabeth Guigou. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
L'affaire d'Outreau a été une tragédie judiciaire et, vous venez de le rappeler, monsieur le Premier ministre, un drame national. Quatorze personnes ont passé des années en détention provisoire avant d'être innocentées par la justice et l'une d'entre elles est morte. Ce drame, qui a bouleversé notre pays, a donné lieu à une réflexion sans précédent sur la justice. La commission d'enquête créée à l'Assemblée nationale et excellemment présidée par notre collègue André Vallini a effectué un travail considérable (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Et le rapporteur ? Sectaire !
Mme Élisabeth Guigou. ...dans un consensus entre députés de tous bords politiques. Ses travaux ont été suivis par un grand nombre de nos concitoyens et ont donné lieu à des propositions pour une réforme de grande ampleur de notre système judiciaire, formulées dans le rapport de notre rapporteur. (" Dites son nom ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Ces propositions auraient mérité un grand débat dans notre pays pour aller au fond des problèmes et recueillir plus largement les témoignages de nos concitoyens. Au lieu de cela, depuis plusieurs semaines, le Gouvernement donne le spectacle affligeant de l'improvisation, de l'incohérence et des cafouillages. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il y a deux jours, monsieur le Premier ministre, vous avez apporté un démenti public aux propos du ministre de la justice sur le projet de réforme élaboré par votre gouvernement.
M. Jean-Marc Roubaud. La question !
Mme Élisabeth Guigou. La justice française mérite mieux qu'une réforme bâclée, des effets d'annonce contradictoires et des mesures d'affichage, qui risquent d'accroître les désordres plutôt que de résoudre les problèmes.
Pourquoi, avant toute nouvelle réforme, ne pas faire réaliser une évaluation des effets des multiples textes sur la justice que votre majorité a votés ? Pourquoi ne pas remédier immédiatement à un problème majeur qui ne demande pas de loi nouvelle : la dramatique insuffisance des personnels des greffes ? C'est en effet à cause de cette pénurie que les justiciables ne sont pas convenablement accueillis dans les tribunaux, que les avocats attendent parfois plusieurs mois pour obtenir copie des dossiers de leurs clients (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)...
M. le président. Posez votre question, madame.
Mme Élisabeth Guigou. ...ou que les décisions de justice ne sont pas notifiées et exécutées.
Monsieur le Premier ministre (Brouhaha sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), pourquoi ne pas prendre sans attendre ces mesures concrètes et de bon sens ?
M. le président. Ne m'obligez pas, madame, à vous interrompre !
Mme Élisabeth Guigou. Pourquoi ne pas reporter après l'élection présidentielle des modifications des lois et de la Constitution, qui exigent un débat approfondi et serein, un consensus national sur les moyens de la justice (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire),...
M. le président. Merci.
Mme Élisabeth Guigou. ...afin que la réforme soit à la hauteur du drame d'Outreau et des attentes de nos concitoyens ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Je rappelle, madame, que le rapporteur était M. Houillon et que j'ai toujours veillé, depuis que je suis président, à respecter l'équilibre politique au sein des commissions d'enquête. Je souhaite qu'on le reconnaisse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, les travaux de la commission d'Outreau ont clairement inspiré les trois projets de loi que j'ai présentés ce matin en conseil des ministres puisque j'ai repris vingt-trois des trente et une propositions d'ordre législatif. Le premier projet porte sur la responsabilité des magistrats et il n'a jamais été question de le retirer, excepté la partie pointée par le Conseil d'État. Le deuxième texte introduit, avec la saisine du médiateur, un droit nouveau pour les justiciables français. Le troisième apporte des réponses pragmatiques aux questions posées par l'affaire d'Outreau : par quel moyen arrêter l'emballement de la machine de la détention provisoire ? Comment briser la solitude du juge d'instruction ? Comment faire en sorte que le juge d'instruction ne donne pas le sentiment d'instruire plus à charge qu'à décharge ?
Vous avez critiqué le budget de la justice, madame Guigou. Je ne me permettrai pas de le comparer à ce qu'il était lorsque vous étiez vous-même garde des sceaux. (" Si ! " sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je rappellerai simplement que le Président de la République, au début de son quinquennat, a fait de la justice une priorité et que la parole a été tenue !
Mme Martine David. Non !
M. le garde des sceaux. En moins de cinq ans, le budget de la justice a augmenté de 38 %,...
M. Bernard Roman. 5 % !
M. le garde des sceaux. ...contre un peu moins de la moitié pour le vôtre. Nous avons créé 700 postes nets de magistrats et recruté 2 000 fonctionnaires nets, greffiers compris. Si je reconnais que ces derniers sont encore en nombre insuffisant aujourd'hui, ils seront 900 sur le terrain l'année prochaine ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous sommes donc parvenus à faire de ce budget, en fin de quinquennat, un budget privilégié et, cette année, le premier budget de l'État, ce qui n'était jamais arrivé. Merci de m'avoir donné l'occasion de le rappeler ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Données clés

Auteur : Mme Élisabeth Guigou

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 octobre 2006

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