convention sur les armes classiques produisant des effets traumatiques
Question de :
Mme Christiane Taubira
Guyane (1re circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 26 octobre 2006
BOMBES A SOUS-MUNITIONS
M. le président. La parole est à Mme Christiane Taubira, pour le groupe socialiste.Mme Christiane Taubira. Monsieur le président, oui, chers collègues d'en face (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) si l'heure de la digestion convient bien à vos plaisanteries, le sujet de ma question ne s'y prête pas ! (Vives protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous allez vous en rendre compte !
Je ne peux m'empêcher de dire à quel point les Guyanais sont sensibles à la sollicitude du Gouvernement face aux difficultés qu'ils rencontrent, même s'ils sont évidemment frappés par son exposé misérabiliste. Nous aurions préféré une évaluation de la politique menée (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et, notamment, une explication du retour en Guyane de tous ces expulsés trois heures après leur expulsion ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Madame la ministre de la défense, la France, représentée par l'ambassadeur François Rivasseau, présidera la troisième Conférence d'examen des États parties à la Convention de 1980 sur certaines armes classiques qui se tiendra à Genève du 7 au 17 novembre. Cinq protocoles de cette convention réglementent ou interdisent l'usage d'armes qui frappent les populations civiles sans distinction ou qui provoquent des traumatismes excessifs. Les bombes à sous-munitions - les BASM - ne sont pas concernées par ces interdits.
Les BASM sont des obus, des missiles ou des roquettes remplis de dizaines ou de centaines de petites bombes appelées sous-munitions.
Ces bombes à sous-munitions sont prises par les enfants pour des jouets ou des friandises.
M. Guy Teissier. Ce n'est pas du misérabilisme, ça ?
Mme Christiane Taubira. En fait, la plupart d'entre elles équivalent à des mines antipersonnel, armes interdites d'usage et de fabrication par la convention internationale d'Ottawa.
Il est donc évident que leur usage est un crime, avec circonstances aggravantes : préméditation, parce que ces armes ne sont pas réservées aux affrontements entre combattants et confondent les cibles militaires et les populations civiles, intention manifeste de dévaster, puisqu'on les appelle également des armes de saturation de zone, et délit de fuite : selon les conditions climatiques et topographiques, 30 % d'entre elles en moyenne n'explosent qu'après les conflits.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. La question !
Mme Christiane Taubira. Ce n'est donc pas un dysfonctionnement mais bien leur fonctionnement qui en fait des restes explosifs de guerre, et l'on en connaît parfaitement les effets retards, 69 % des victimes étant des enfants.
Puisque la communauté internationale a élaboré un droit de la guerre à travers les conventions de Genève, êtes-vous disposée à prendre en considération la gravité des faits et à introduire cette question à l'ordre du jour de la conférence de Genève ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe des député-e-s communistes et républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. La problématique spécifique des armes à sous-munitions, c'est effectivement l'existence de munitions non explosées à la fin du conflit, qui explosent par la suite, causant de lourds dégâts à la population.
Nous sommes particulièrement sensibles aux conséquences désastreuses de ces munitions, sur le plan humanitaire et même sur le plan de la reconstruction. Je rappelle que l'armée française participe largement au déminage, notamment en Afghanistan et au Liban.
M. Jean-Claude Lenoir. Absolument !
Mme la ministre de la défense. Un militaire français est mort au mois de mai au cours d'une telle opération. Je pense qu'il serait souhaitable que nous lui rendions tous hommage.
Madame Taubira, la France est attachée à l'application du droit international humanitaire en matière de protection des populations civiles, mais les armes à sous-munition sont légales en droit international, même si leur usage est réglementé par le droit international humanitaire. Une convention internationale a ainsi établi en 2002, pour les États parties seulement, malheureusement, une obligation de dépollution après la fin du conflit et un cadre d'assistance internationale en la matière.
La plupart des États détenteurs ou utilisateurs de telles armes sont opposés à leur interdiction totale. La France, soucieuse de garantir la protection des populations, a présenté une initiative visant au moins à fiabiliser toutes les munitions, dont les sous-munitions, dans un but de protection.
La France possède effectivement des armes à sous-munitions, mais notre doctrine d'emploi permet une stricte protection des populations civiles. En tout état de cause, de telles armes n'ont plus été utilisées depuis 1991. Les dernières à avoir été fabriquées en France l'ont été au début de l'année 2002, avant mon arrivée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française.)
Auteur : Mme Christiane Taubira
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Traités et conventions
Ministère interrogé : défense
Ministère répondant : défense
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 octobre 2006