commissariats
Question de :
M. Gilles Artigues
Loire (1re circonscription) - Union pour la Démocratie Française
Question posée en séance, et publiée le 13 mars 2003
garde à vue et dignité de la personne
M. le président. La parole est à M. Gilles Artigues.
M. Gilles Artigues. Monsieur le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, le groupe UDF a toujours soutenu, depuis votre arrivée au Gouvernement, votre politique de sécurité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
La fermeté était nécessaire dans notre pays pour rétablir l'ordre. Si nous vous avons suivis dans cette démarche, monsieur le ministre, c'est parce que votre politique est équilibrée. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Vous avez toujours tenu à nous dire que vous ne souhaitiez pas être « tout répressif », et d'ailleurs lorsque vous vous rendez dans les banlieues, vous n'hésitez pas à tendre la main à ceux qui veulent s'en sortir, ce que nous apprécions. (Rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Un grand quotidien du soir fait état d'instructions que vous avez données hier au directeur général de la police nationale et au directeur général de la gendarmerie à propos de la garde à vue, et en particulier de votre souci de préserver la dignité des personnes qui se trouvent dans cette situation. Nous aimerions connaître les mesures que vous entendez prendre en ce domaine, particulièrement sensible. Nous nous souvenons en effet qu'en 2000 la loi sur la présomption d'innocence avait créée un trouble certain.
M. Bernard Roman. Vous l'avez votée !
M. Gilles Artigues. De quelle manière comptez-vous agir, monsieur le ministre ? Nous savons que nos policiers sont confrontés à des prévenus de plus en plus violents, de plus en plus dangereux et de plus en plus armés. Une nouvelle preuve nous en a d'ailleurs été donnée ce matin avec la spectaculaire évasion de la prison de Fresnes.
Monsieur le ministre, comment allez-vous concilier la nécessaire modernisation de notre police et le traitement digne des personnes interrogées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Union pour la démocratie française et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Monsieur le député, c'est un sujet très important. Je rappelle que chaque année on compte 370 000 gardes à vue dans notre pays. Or chacun de ceux qui sont gardés à vue est présumé innocent. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
Une police moderne, c'est une police qui sait allier l'efficacité et le respect scrupuleux de la dignité humaine. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Depuis trop d'années, on polémique en se demandant comment respecter scrupuleusement la dignité humaine sans compliquer en rien la tâche des policiers et des gendarmes.
Constatant que de nombreuses personnes gardées à vue avaient à juste titre estimé que leur dignité n'était pas respectée, le Gouvernement a décidé d'agir - c'était une préoccupation tout à la fois du Président de la République et du Premier ministre. Dans la patrie des droits de l'homme, c'est un problème qui nous concerne tous, quelle que soit notre place sur les bancs de cette Assemblée.
M. Robert Pandraud. Très bien !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. J'ai donc décidé, premièrement, que le menottage ne serait plus automatique, mais qu'il serait fonction de la dangerosité des délinquants ou des présumé délinquants mis en garde à vue. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française.)
M. Daniel Vaillant. Nous y avions pensé avant vous !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je sais, monsieur Vaillant, vous y aviez pensé, mais vous aviez omis de le faire ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Daniel Vaillant. Ce n'est pas vrai !
M. Bernard Roman. C'est scandaleux ! C'est une attaque personnelle.
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Je sais, je connais la chanson. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. - « Voyou ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Messieurs, calmez-vous !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Deuxièmement, si les palpations de sécurité seront faites automatiquement, nous considérons qu'il est inutile de procéder à des fouilles à corps et de déshabiller systématiquement des gens placés en garde à vue, sauf en cas de danger pour les fonctionnaires qui surveillent la garde à vue ou pour la personne gardée à vue. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)
Mme Martine David et M. Jean-Jack Queyranne. Ce n'est pas nouveau, ça !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Troisièmement, il y aura désormais dans chaque commissariat de police, c'est important, un gradé de la garde à vue qui ne sera pas le policier en charge de l'interrogatoire, pour que celui qui garantit les droits de la personne gardée à vue ne soit pas le même que celui qui interroge.
Quatrièmement, nous allons, dans les mois prochains, veiller à ce que les locaux de gardés à vue soient des locaux spécifiques et non pas systématiquement des cellules. En effet, puisque le gardé à vue est présumé innocent, il n'est pas normal qu'il soit placé dans une cellule.
M. Bernard Roman. Mais c'est déjà dans la loi de 2000 !
M. le président. Monsieur Roman !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Enfin, le gardé à vue a le droit de manger chaud, aux heures normales des repas et non pas à n'importe quelle heure du jour et de la nuit.
M. Bernard Roman. C'est la loi Guigou çà !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mesdames et messieurs les députés, comme vous le voyez, sous l'impulsion du Premier ministre, le Gouvernement mettra autant d'énergie à poursuivre et à arrêter les délinquants qu'à faire respecter la dignité humaine partout et pour qui que cela soit.
Mme Martine David. Ce n'est pas nouveau ! C'est déjà la loi, ça !
M. Bernard Roman. Arrêtez de baratiner !
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. Mais, à la différence de la loi de Mme Guigou, nous le ferons en soutenant policiers et gendarmes et en obtenant des résultats ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Union pour la démocratie française. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Mme Martine David. Baratin !
M. Bernard Roman. C'est encore une attaque personnelle !
Plusieurs députés du groupe socialiste. Voyou !
M. le président. Monsieur Roman, si vous pouviez montrer l'exemple, ce serait très bien ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Bernard Roman. Alors, qu'il cesse les mises en cause personnelles !
Auteur : M. Gilles Artigues
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Police
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 mars 2003